Le documentaire "Pelagos, voyage au large de la Méditerranée" permet de découvrir la richesse insoupçonnée qui se cache au large des côtes provençales.
C'est un sanctuaire insoupçonné qui se trouve à seulement quelques kilomètres au large des côtes de Marseille. Dans ce sanctuaire évoluent des animaux tout à fait fascinants tels que des cachalots, des dauphins ou des raies.
La mer Méditerranée représente moins de 1% de la surface totale des océans, mais elle abrite près de 10% de la biodiversité mondiale. Non loin des côtes, vit tout un peuple d’organismes nomades, du plus petit au plus grand. Cet ensemble d’êtres vivants, qui occupe la partie supérieure de la colonne d’eau proche de la surface, est appelé le "pelagos".
C’est ce qui a donné son nom au sanctuaire créé en 1999 par la France, la Principauté de Monaco et l’Italie, afin de protéger les mammifères marins. Dans cette zone de 87.000 km 2 désormais préservée, la biodiversité trouve de nouveau un milieu pour s’exprimer et essaime parfois dans le reste des eaux méditerranéennes.
Le film de Frédéric Larrey et Thomas Roger nous plonge au cœur de cet écosystème d’une grande richesse. Baleines, cachalots, dauphins, tortues, poissons lunes, requins à peau bleue, thons, méduses, crustacés ou organismes planctoniques de toutes sortes… On découvre une foisonnante vie sauvage, des scènes inédites et des comportements parfois insoupçonnés.
Une immersion totale
Le documentaire regorge de séquences fascinantes. Telle la naissance de deux petits cachalots, un événement au cours duquel la femelle est entourée par ses congénères. Ou bien cette scène de chasse d’un dauphin, à la technique imparable. Ou encore l’étonnante position dite "en marguerite" qu’un clan de cachalots adopte pour protéger les plus jeunes des attaques de dauphins de Risso…
La beauté des images, les sons et la musique originale nous immergent totalement dans ce milieu si proche et pourtant si mal connu.
Ce voyage au large des côtes révèle ainsi une grande biodiversité, dans une mer que l’on croyait pourtant très appauvrie. Malgré les pressions liées aux activités humaines – surpêche, hausse constante du trafic maritime, pollutions plastiques et sonores... - la faune pélagique semble résister, constate le film.
Cependant, si certaines espèces sont abondantes, d’autres sont plus fragiles, comme le phoque moine, en danger critique d’extinction, ou le rorqual commun, dont la population ne cesse de diminuer. A l’image de la création du sanctuaire Pelagos, les efforts de préservation doivent se poursuivre...
Dans les coulisses du tournage : une équipe de France 3 a eu la chance de pouvoir suivre les réalisateurs durant une journée
Trois questions à Thomas Roger, co-réalisateur du film
Comment est né le projet de ce film ?
Ce projet de film était une évidence dans la mesure où Frédéric et moi-même côtoyons depuis plus de 20 ans cet écosystème du large. En tant que guides naturalistes, lors de la réalisation de nos premières croisières de découverte du Pelagos nous avons constaté une absence de connaissance du grand public de ces géants peuplant la haute mer.
Passionnés également d’images, nous avons réalisé en 2013 le livre Pelagos, voyage naturaliste au large de la Méditerranée, qui recevra le prix mondial d’images sous-marines.
Lors des missions photographiques, nous avons commencé à accumuler des images filmées dans l’idée d’en faire un jour un film. Ces 3 dernières années, nous n’avons fait que tourner et accumuler des images et des comportements animaliers parfois inédits.
Le dénominateur commun, que nous prenions la casquette de guide naturaliste, de photographe ou bien celle de chef opérateur/ réalisateur, est de révéler par l'image un écosystème encore trop méconnu situé à quelques kilomètres de nos côtes, abritant des géants, comme le second plus grand animal de la planète.
Pour tourner ces séquences spectaculaires, parfois rares, au plus près des animaux, quelles précautions particulières avez-vous dû prendre ?
Concernant les baleines et dauphins, la préfecture nous a délivré une autorisation nous permettant de plonger au plus près des animaux, car il faut savoir que depuis 2011 une loi interdit toute approche des cétacés à moins de 100 mètres en Méditerranée française.
Approcher et filmer ces animaux requiert une connaissance de ceux-ci et de leur lieu de vie. Depuis 17 ans, notre terrain de jeu est situé au large du Cap Sicié et des îles d’Hyères. Un habitat constitué de plateaux, canyons et plaines abyssales que nous connaissons parfaitement et où nous savons trouver telle ou telle espèce en fonction des saisons. Trouver les animaux est une chose, les approcher puis les filmer en est une autre.
En observant le comportement des animaux, nous savons si nous pouvons avoir des bonnes chances de les approcher, puis les filmer. Dès lors que les animaux ne sont pas réceptifs, nous abandonnons notre approche et continuons notre route. Certaines espèces comme les baleines ont été très compliquées à filmer car extrêmement farouches.
La clé de la réussite a été la persévérance, prendre le plus possible la mer pour arriver à trouver le groupe ou l’individu "bon client" à se laisser approcher, voire ignorer notre présence. Je tiens à préciser que l’ensemble des images filmées ont été réalisées en apnée, technique la plus efficace pour se déplacer et suivre ces grands nomades. Les centaines de journée en mer nous ont permis d’être parfois "au bon endroit, au bon moment".
Comme Frédéric Larrey, vous connaissez bien ce milieu et son incroyable diversité, mais qu’est-ce qui vous a le plus marqué, ému ou surpris peut-être, durant ce tournage ?
Au cours de toutes ces années de vagabondage en haute mer, Mère Nature nous a offert de très beaux cadeaux, de grands moments de vie sauvage… Je retiens souvent les premières fois, qui ont une saveur particulière pour le naturaliste que je suis. Durant ces 3 dernières années de tournage, nous avons pu capter des scènes inédites, telle cette attaque d’un groupe de dauphins de Risso sur des cachalots, ou bien encore l’approche au plus près d'une baleine endormie en surface et filmer son réveil.
Il y a encore quelques jours, nous avons pu passer 4 heures aux côtés d’un grand mâle de tortue caouanne escorté d’une centaine de poissons pilotes, et assister à la parade nuptiale d’une dizaine de raies manta de Méditerranée, appelées diables de mer.
Notre passion pour cet écosystème, qui a besoin d’être montré pour être mieux protégé, nous pousse à continuer de rapporter des scènes de vie et nous entraîne vers de nouveaux projets.
Pelagos, voyage au large de la Méditerranée
Un film de 52 mn de Frédéric Larrey et Thomas Roger.
Une coproduction Les films du vivant / Fanny Productions / France Télévisions, en collaboration avec Regard du vivant.
Première publication septembre 2023