Le phénomène Uber shit ou la revente décomplexée de drogue sur les réseaux sociaux

Se faire livrer de la drogue à domicile en quelques clics. À Marseille comme dans les grandes villes françaises, les dealers se réinventent et proposent la livraison à domicile. Un mode d’approvisionnement privilégié par les consommateurs implantés dans les quartiers huppés de la cité phocéenne.

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La démarche est simple, aussi simple que la commande d’un repas. Sur les réseaux sociaux tels que Snapchat ou WhatsApp, il suffit d’envoyer un message, préciser la drogue, la quantité souhaitée et son adresse.

Un livreur arrive en scooter ou à vélo au pied de votre porte, dans l’heure qui suit. Depuis la crise du coronavirus, les trafiquants de drogue se professionnalisent.

Ils développent de nouvelles techniques commerciales pour satisfaire le consommateur et déjouer les actions de pilonnage sur les points de vente.

"C’est comme se faire livrer une pizza"

Le phénomène de la livraison à domicile, également appelé « Uber Shit » n’est pas récent à Marseille, il s’est considérablement accéléré pendant le confinement.

"Il fallait un motif pour se déplacer. Les professionnels, sous couvert de livraison de repas, ont usurpé cette qualité, glacière au dos, pour revendre des stupéfiants", précise Philippe Brunoni, commissaire et chef de la Division Centre de Marseille.   

Pour se procurer cannabis, cocaïne, MDMA et ecstasy, le consommateur n’a plus besoin "d’aller au four ", un confort non négligeable. "C’est un gain de temps, on ne se prend plus la tête. C’est comme se faire livrer une pizza. Les livreurs prennent le risque, pas moi. Depuis le confinement, je n’ai pas mis un pied dans les quartiers nord ", avoue un client.   

Pour le reportage, nous décidons de nous faire passer pour un consommateur. Sur une application, nous prenons contact avec une plateforme de livraison. En moins d’une minute, une réponse.

Un rendez-vous est pris. Munis d’une caméra espion cachée, nous enregistrons l’interaction avec le livreur. Il arrive en scooter banalisé et demande à entrer dans le hall d’immeuble.

Le jeune homme, ancien livreur de nourriture, avoue avoir changé de métier au début de la crise sanitaire, sa nouvelle activité s’avère plus rentable.

"Je suis qu’un salarié, celui qui prend les sous c’est le boss. Moi je vais juste d’un point A à un point B", explique-t-il.

Plusieurs dizaines de livraisons par jour au compteur, il avoue ne pas avoir de périmètre précis.

"Je parcours tout Marseille", contrairement aux livreurs de nourriture traditionnels, il n’est pas payé à la course.

" Je suis payé à la journée. Tu dois respecter des horaires, c’est un salariat, c’est comme en entreprise », précise-t-il sourire aux lèvres.

Voir le reportage

Les dealers s'adaptent, la police aussi

Les livreurs, comme lui, sont dans le collimateur des autorités. Les policiers du centre-ville deviennent peu à peu aguerris à cette pratique et traquent ces trafiquants connectés.

"On intervient de manière totalement classique. On contrôle les véhicules, les scooters, parfois des odeurs suspectes nous interpellent", explique le commissaire Brunoni.   

Autre constat réalisé : les profils variés des trafiquants. "La pratique Uber shit est plurielle. On va du simple revendeur avec son carnet d’adresses, aux réseaux bien implantés dans les cités". 

 Il n’existe pas de profil type de livreur. "On pourrait croire que n’importe qui pourrait, du jour au lendemain, décider d’être revendeur. Parfois, une personne qui n’a aucun rapport à la délinquance se met à livrer en auto-entrepreneur", détaille Philippe Brunoni.

"Elle conditionne, découpe, confectionne et revend des produits stupéfiants. Il existe aussi des personnes qui se mettent à disposition des trafiquants comme dans les points de vente traditionnels ", souligne le commissaire.   

Les trafiquants 2.0 ne lésinent pas sur les moyens

Depuis 2020, les consommateurs de stupéfiants peuvent se voir infliger une amende forfaitaire délictuelle de 200 euros et l’inscription des faits au casier judiciaire.

Pour attirer les clients, les trafiquants 2.0 ne lésinent pas sur les moyens et adoptent les codes de la grande distribution. Marketing offensif, packaging et promotions circulent sur les réseaux sociaux. Tout est fait pour que le client achète tout en esquivant cette nouvelle procédure.   

"On se rend compte que les méthodes destinées à attirer les consommateurs sont de plus en plus agressives, visuelles, publicitaires. On voit des couleurs vives, des paquets qui font référence à des dessins animés", détaille Philippe Brunoni.

Une vente décomplexée qui représente un véritable danger pour les mineurs, principaux utilisateurs des applications comme SnapChat. 

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