Marseille ne veut plus de cirques animaliers et relance le débat sur les animaux en captivité

Lions, tigres, éléphants... ils font des prouesses sur les pistes. Mais le premier adjoint de la ville de Marseille, Benoît Payan, ne veut plus qu'ils foulent le sol de la cité phocéenne. Il vient d'exprimer son souhait d'interdire les cirques avec animaux. 

L'essentiel du jour : notre sélection exclusive
Chaque jour, notre rédaction vous réserve le meilleur de l'info régionale. Une sélection rien que pour vous, pour rester en lien avec vos régions.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "L'essentiel du jour : notre sélection exclusive". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Le tweet de Benoit Payan donne l’impression qu’il a vu la vidéo de trop.

On y voit un rhinocéros tourner en rond, inlassablement, dans un enclos. Un trouble du comportement probablement provoqué par un état d’anxiété permanent.

Le commentaire du premier adjoint de Marseille est clair : "Ces images sont insoutenables. À Marseille nous allons interdire les cirques avec des animaux."

Au passage, même si l'intention peut être louable, précisons que bien sûr la scène ne se déroule pas dans un cirque français et encore moins sur le territoire national. Mais le débat est (re)lancé. 

L’association PAZ, Paris Animaux Zoopolis commente cette décision et s'en réjouit. Fondée en 2017, elle milite contre la captivité des animaux dans des cirques.

Dans la catégorie des "grandes villes", Paris, Montpellier et Lille se sont déjà engagées à ne plus les recevoir. Selon PAZ, plus de 400 villes de France refusent la captivité des animaux dans les cirques.

André-Joseph Bouglione abandonne les spectacles avec animaux sauvages. Ancien dompteur, ce membre de la famille du "grand" cirque Joseph Bouglione crée un "écocirque" avec des animaux en hologrammes.

Car le public se montre de moins en moins amateur de ce type de numéro. Selon PAZ, le cirque Arlette Gruss a perdu 20% de son public en 2018.

"La Fédération des Vétérinaires Européens s'est positionnée sans ambiguïté", explique dans un communiqué l'association.

"Elle constate une impossibilité absolue de répondre aux besoins physiologiques, mentaux et sociaux des animaux sauvages et recommande donc à toutes les autorités compétentes d’interdire l’utilisation de mammifères sauvages dans les cirques itinérants en Europe".

La cause progresse petit à petit. PAZ souhaite avant tout un recensement exhaustif des animaux sauvages dans les cirques. Après des mois de travaux ministériels, le gouvernement n'est pas apte à donner le nombre d'animaux captifs. Voilà pour le constat, côté opposants. 

Prenons la même histoire, vue du cirque

L'Association de défense des cirques de famille (ADCF) regroupe une centaine de cirques en France. Du tout petit au très gros Bouglione.

Les artistes du cirque ont évidemment un autre regard sur la question. Sur les images, d'abord. Le rhinocéros qui a fait réagir le premier adjoint de la ville de Marseille est à Valence, en Espagne. Le cirque aussi est Espagnol. 

D'après Cyrille Emery, membre de l'ADCF, on ne trouve aucun rhinocéros dans les cirques de France. De la même façon qu'on ne verra jamais de fauves traversant des cerceaux en feu.

Les pires images circulent sur internet, tout le monde fait l'amalgame. Ce numéro en photo avec trois hippopotames n'est pas réalisé en France non plus. Un cirque avec trois hippopotames n'existe pas.

Il existe bien un Bouli, connu pour avoir obligé un cirque français à faire un entracte pendant qu’il refusait d’interrompre son festin d’herbe fraîche. Personne ne pouvait obliger l’hippopotame à se déplacer, évidemment.

"Tous les animaux de cirque sont nés dans un cirque", assure Cyrille Emery.

Depuis quarante ans, et la convention de Washington, l’importation d’animaux sauvages est interdite. Les espèces autorisées sont déterminées. Un sanglier, par exemple, ne peut pas intégrer un cirque.

Les cirques sont contrôlés par la Direction de la protection des Populations et par des vétérinaires.

"Les cages, les camions, le périmètre autour du chapiteau répondent à des normes. Les tigres doivent disposer d’une piscine à l’intérieur d’un enclos. Les artistes doivent également détenir un certificat de capacité par espèce", détaille le membre de l'association de défense des cirques de famille.

"Pour dresser un lion, il faut commencer après son premier anniversaire, 10 minutes par jour, jusqu’à ses trois ans", explique Cyrille Emery. "Comme les chiens d’aveugle et les chevaux, il est dressé à la récompense. Le fouet, qui impressionne tant le public, est en fait en coton".

Et ces mesures "de bien être" concernent les plus grands comme les plus petits. Pour dresser un perroquet, il faut lui laisser une grande liberté. L'oiseau est très sensible, si le contact se passe mal, il fera une dépression.

Les gens du cirque, pétris de leurs méthodes ancestrales, comprennent que le débat existe sur les animaux. Ils comprennent moins pourquoi on les accuse de les maltraiter.

Toujours d'après l'ADCF, 13 millions de spectateurs remplissent chaque année les chapiteaux. 

"Ceux qui n'aiment pas voir des animaux sauvages ne sont pas obligés de venir au cirque", suggère Cyrille Emery.

Pinder gagne en justice contre La Ciotat 

En 2016, Patrick Boré, maire LR de La Ciotat veut prendre un arrêté municipal pour interdire les cirques animaliers sur sa commune. Le PDG du cirque Pinder, Gilbert Edelstein, attaque en justice, gagne en première intance, puis en appel.

La commune du Luc (Var) a aussi fait les frais d'une décision du tribunal administratif en avril 2018. Son arrêté municipal portant sur l'interdiction des cirques avec animaux sauvages avait fait l'objet d'une annulation.

Car sauf à démontrer que le bien-être animal n'est pas respecté, une commune ne peut pas interdire la venue d'un cirque, défend ADCF. 

"Imaginez qu'on vous interdise l'entrée d'un théâtre, un cinéma ou un opéra", commente Cyrille Emery, de l'ADCF, "ce serait un tollé général, tout le monde crierait à la censure. Et bien là, c'est pareil."

Véterinaire es-animaux sauvages

Florence Ollivet-Courtois est vétérinaire, décrite comme "la seule vraie spécialiste des animaux sauvages en France".

Dans un texte adressé aux militants de la cause animale, cette vétérinaire pose la question : "Qu’est-ce qui permet d’affirmer qu’un animal (de cirque, ndlr) est plus heureux dans la nature ?"

La spécialiste estime que le milieu naturel n'est pas "une issue pour la plupart des animaux captifs".

"Les fauves des cirques n’ont jamais connu cette terre promise, ni même les dix générations qui les précèdent, explique-t-elle. Leur système immunitaire, leur comportement, leur génétique ne savent rien de leur pays d’origine."
Mais alors, où mettre ces animaux de cirque ? Les zoos peuvent-ils les accueillir ?

"Non, ils sont saturés et n’acceptent plus d’héberger des hybrides ou des animaux issus d’établissements sans agrément sanitaire. Et puis les associations sont contre les zoos également de toute façon", ajoute Florence Ollivet-Courtois.

"Dans ce contexte, les cirques doivent-ils être la priorité des associations ?", interroge la spécialiste qui pointe du doigt, "les pratiques barbares de la chasse à courre, de la corrida, du trafic d’animaux pour financer le terrorisme, du braconnage pour fournir les uns en ivoire décoratif, les autres en sous-produits animaux aux vertus médicinales imaginaires".

Reste que la fronde anti-cirques s'organise. Au 23 juillet 2020, 409 communes avaient pris position pour des cirques sans animaux, dont 96 villes de plus de 10.000 habitants, selon le site cirquedefrance.fr.

Selon un sondage IFOP réalisé en 2020 pour la Fondation 30 Millions d'Amis, plus de sept Français sur dix (72 %) seraient favorables à l’interdiction des animaux sauvages dans les cirques.
 
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information