Le quartier de la Cayolle, dans le 9e arrondissement de Marseille, est en proie à des affrontements liés au trafic de drogue. Les trafiquants ont installé leur point de deal en face de l'école primaire. Inquiètes pour la sécurité de leurs enfants, deux mères de famille ont accepté de témoigner pour France 3 Provence-Alpes.
"On voit dans la rue des jeunes qui passent sur des deux-roues, à une vitesse incroyable, sur les trottoirs, avec des armes". À visage couvert, par crainte des représailles, deux mères de famille témoignent de leur quotidien à la Cayolle, un quartier gangréné par le trafic de drogue. "La dernière fois, à 16h30 j'allais récupérer mes enfants, quand on a vu un gamin, de 13 ans ou 14 ans, qui sortait de la cité avec une arme à la main en essayant de la cacher. Qu'est-ce que je réponds aux questions de mes filles ? "Maman pourquoi il avait une arme ? C'était une vraie ?" Je ne peux rien répondre."
La deuxième mère renchérit : "Le jour où ça a tiré, j'allais amener ma fille faire du roller. Ils sont passés juste à côté avec les kalash devant le parc."
Désormais, les trafiquants ne se cachent plus. Leur point de deal se situe juste en face de l'école primaire. Les tarifs sont taggés sur les murs. D'après ces mères, les violences dans le quartier ont explosé depuis le printemps. Le 23 août dernier, à 21 heures, un adolescent a été blessé par balles, un autre a été blessé par un éclat à la jambe. Le 14 août dans la cité, un homme de 25 ans est mort, tué par arme à feu.
Des tirs devant l'école
"L'endroit où les jeunes ont été visés, c'est l'entrée de l'école", insiste une mère. Des impacts sont encore présents sur le portail d'enceinte du bâtiment. "Depuis le début de l'été, on entend des coups de feu réguliers. On ne sait pas si c'est des pétards ou des coups de feu. Ou des pétards qui masquent les coups de feu."
Cette mère d'une enfant de 6 ans et d'une autre, sur le point d'entrer au collège, poursuit : "avant, je laissais ma fille sortir dans le quartier. C'était tout nouveau pour elle. Elle grandit donc on voulait lui laisser de l'autonomie. Il y a quelques semaines elle a reçu un texto d'une de ses copines. "Attention, ils sont dehors, ils veulent nous tuer, ils sont cagoulés." J'essayais de la rassurer, mais comment être rassurant si nous-même on a peur ? Elle a peur de sortir, de se balader dans le quartier. Même si nous on ne la laisserait pas aller au collège toute seule, elle ne veut pas, elle a peur."
Partout, les riverains de la Cayolle craignent de recevoir une balle perdue. "Je vis juste en face du point de deal, ma fille n'ose même plus sortir jouer sur le balcon. Elle a peur", raconte cette autre mère.
Partir ? Ce n'est pas forcément aisé, raconte la première. Il n'y a pas si longtemps, les dealers semblaient faire leur trafic sans menacer les habitants, c'est à ce moment-là que le couple a investi dans le quartier. Au pied des Calanques, la cité ne manque pas de charme. Vendre maintenant la maison familiale représenterait une perte financière dont ils n'ont pas les moyens.
Alors, ces mères tentent d'agir, comme elles le peuvent. Elles ont accepté de témoigner, malgré la peur. Elles ont écrit des lettres aux services de la Préfecture, de la mairie, qui sont restées sans réponse. Elles demandent à ce que la police soit présente "tout le temps" devant l'école, pas seulement de passage. Elles voudraient des caméras aussi, sur le point de deal. Et avant toute chose : "que le trafic cesse dans notre quartier."