Travail détaché : des exploitants agricoles condamnés pour l'emploi de saisonniers dans des conditions indignes

La société espagnole Terra Fecundis et des gérants d'exploitations agricoles du Gard et des Bouches-du-Rhône ont été condamnés à des amendes pour "violation des règles européennes du travail détaché" et "travail dissimulé".

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Déjà condamnée l'an dernier à Marseille, la société espagnole Terra Fecundis vient d'être une nouvelle fois condamnée par le tribunal correctionnel de Nîmes à une amende de 375.000 euros pour violation des règles européennes du travail détaché. 

En juillet 2021, elle avait été condamnée pour cela par le tribunal correctionnel de Marseille, qui lui a infligé une amende de 500.000 euros. Ses trois dirigeants espagnols, Juan Jose Lopez Pacheco, son frère Francisco et Celedenio Perea Coll, avaient été condamnés à quatre ans de prison avec sursis et à 100.000 euros d'amende.

Ce nouveau jugement intervenu le 1er avril concerne des faits similaires concernant la période décembre 2017-octobre 2018. L'entreprise de travail temporaire, rebaptisée Work for All, qui envoyait des travailleurs, majoritairement équatoriens, dans des exploitations agricoles du sud de la France est en outre définitivement interdite d'exercer toute activité liée au travail temporaire en France. Les dirigeants de la société espagnole n'étaient pas poursuivis.

Un "état de saleté repoussant"

Les gérants de sept exploitations agricoles du Gard et des Bouches-du-Rhône, qui faisaient appel à ses services pour recruter des employés, notamment pour la cueillette des fruits en été, ont en revanche été condamnés pour "travail dissimulé" et "emploi illégal de travailleurs étrangers". Ils ont tous écopé d'amendes allant de 10.000 à 15.000 euros, dont une partie variable avec sursis.

L'un des gérants, qui possédait notamment un lieu surnommé "El Carcel" (la prison en espagnol) par les travailleurs sud-américains, a en outre été condamné à six mois de prison avec sursis pour avoir hébergé ces saisonniers pendant des années dans des conditions indignes..

Sur un des sites qu'il exploitait, constitué d'un bâtiment en dur et de 11 mobiles-homes installés en plein champ, les inspecteurs du travail avaient constaté que les douches étaient dans un "état de saleté indescriptible", les "cabinets d'aisance dans un état répugnant" et les cuisines dans un "état de saleté repoussant".

Sur un autre de ses sites, des salariés avaient expliqué ne pas pouvoir dormir à l'intérieur en cas de fortes chaleur en raison de l'absence de ventilation et de la condamnation des fenêtres.

5.000 salariés par an dans le sud de la France

Les inspecteurs du travail, dont le rapport a été versé au dossier pénal, concluaient que "les conditions élémentaires d'hygiène et de confort" n'étaient "pas respectées" et les conditions de vie "contraires à la dignité humaine".

Entre 2012 et 2015, le groupe espagnol a fourni plus de 26.000 salariés,
majoritairement sud-américains, à diverses exploitations agricoles françaises. Ils étaient largement privés du paiement de leurs heures supplémentaires, contraints de travailler jusqu'à 70 heures par semaine pour certains.

"C'est évidemment une nouvelle décision très satisfaisante, puisqu'elle enfonce le clou du jugement de Marseille (en ce qui concerne Terra Fecundis) et qu'elle condamne des exploitants agricoles", a commenté Me Vincent Schneegans, avocat du syndicat CFDT, qui s'était constitué partie civile au côté notamment de la CGT et de FO.

"Cela doit constituer un signal d'alerte pour les entreprises agricoles", car cela "concerne 5.000 salariés par an dans le sud de la France", a-t-il ajouté.

Terra Fecundis a également été montrée du doigt en 2020 pour les mauvaises conditions d'hébergement de ses ouvriers agricoles après l'apparition de 258 cas de Covid chez des saisonniers en Provence.

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