L'arrivée des beaux jours et la levée des mesures sanitaires invitent à la baignade, or le risque de noyade est décuplé par la fermeture des piscines pendant le confinement. Des initiatives gratuites sont mises en place pour apprendre aux enfants à nager, comme à Bédoin, dans le Vaucluse.
On dénombre 1.000 décès par noyade en moyenne chaque année en France, mais cette année, le bilan pourrait être plus lourd. La fermeture des piscines le 15 janvier, jusqu'au 19 mai, conséquence de la crise sanitaire et des mesures pour lutter contre l'épidémie de Covid-19, a privé 800.000 écoliers et collégiens de cours de natation.
Pour pallier ce manque, des initiatives locales se mettent en place. A Bédoin dans la Vaucluse, le maître-nageur Sébastien Jacquemin propose des cours de natation gratuits à l'initiative de la mairie.
Les enfants de 6 à 12 ans peuvent venir apprendre à nager les mercredis, samedis et dimanches.
"Cette initiative d'intérêt public rencontre un franc succès, se réjouit Sébastien. Les parents ont une peur bleue de la noyade. Avec ces cours, ils sont ravis". Le cycle du mois de juin est déjà complet. Un autre cycle de cours est organisé au mois d'août.
"On est prêts pour une saison mouvementée"
A la mer, les secours sont sur le qui-vive. A l'heure des premières fortes chaleurs et des après-midis à la plage, les sauveteurs sont "aiguisés au maximum".
"Nous sommes extrêmement vigilants, assure Olivier Roy, délégué départemental de la SNSM (Société nationale de sauvetage en mer, ndlr) des Bouches-du-Rhône. Nous sommes prêts pour une saison mouvementée".
"2020 a été l'année du grand relâchement. Après des mois de confinement, les gens ont envie de se détendre, ils sont de moins en moins vigilants. Et c'est fort compréhensible, explique-t-il. Les gens ont une envie légitime d'évasion, de liberté".
Cet été 2021 risque de suivre la même trajectoire. Début juin, les interventions SNSM étaient en hausse de 20% par rapport à l'année passée.
La fermeture des piscines n'est pas tant décisive dans cette hausse des accidents, estime Olivier Roy : "Le littoral et la plage sont de toutes les manières dangereux. Il est impératif que les parents aient un oeil sur leurs enfants. Qu'ils aient eu des cours de natation ou pas, les enfants sont à surveiller de près".
La SNSM alerte également sur le risque pour les adultes. "Beaucoup ne tiennent pas compte de leur forme physique avant de se mettre à l’eau". Les secouristes invitent à se rendre de préférence sur les plages surveillées, et incitent à bien apprendre la signification des drapeaux de plage en fonction de leur couleur.
La ministre des Sports sensibilisée au "fléau des noyades"
Dans une lettre transmise à la ministre des Sports Roxana Maracineanu en février dernier, le Syndicat national professionnel des maîtres-nageurs sauveteurs (SNPMNS) lançait un cri d'alerte sur le risque de noyade.
"Sans possibilité de permettre aux différentes populations d’accéder aux établissements de baignade couverts, les capacités acquises vont vite régresser pour ceux qui étaient en cours d’apprentissage ou de perfectionnement, et les populations non-aquatiques n’auront pas la possibilité d’être initiées".
L'inquiétude concerne les enfants qui ne savent pas nager, mais aussi ceux qui ont commencé à apprendre... sans être totalement à l'aise. "Cela veut dire qu’ils se sont familiarisés et qu'ils n’ont plus peur de l’eau (...), ces publics sont particulièrement en danger dans les mois à venir sur la saison estivale", rappelle le syndicat.
La ministre des Sports, Roxana Maracineanu abordait cette question le 14 janvier, la veille de la fermeture des piscines.
Pour prévenir les noyades, il faut acculturer les enfants à l’eau dès le plus jeune âge, quand ils sont les plus vulnérables. Visite d’une classe bleue à Poitiers où 25 enfants suivent une semaine d’aisance aquatique et travaillent en classe sur l’eau et le développement durable pic.twitter.com/3g3dKb2fAL
— Roxana Maracineanu (@RoxaMaracineanu) January 14, 2021
La ministre a renouvelé ses inquiétudes dans les colonnes du Parisien en mars dernier : "A l’approche de l’été, c’est très problématique avec le fléau des noyades qui est en constante augmentation sur cette période. Or, la seule manière de lutter contre ce phénomène, c’est de savoir nager."
Pour répondre à ce problème, le gouvernement a mis en place des solutions d'urgence, a décrit dans la foulée Axel Lamotte, secrétaire général adjoint du SNPMNS sur franceinfo. Comme le déploiement de bassins de quatre mètres par huit dans les écoles et les gymnases.
Le gouvernement a fixé un objectif de 800 bassins qu'il s'engage à financer à hauteur de 50%. La ministre des Sports a également annoncé l'implantation de bassins "mobiles" dans les quartiers populaires pour des cours express de natation.
Présentation au Yacht Club de #Carnac du dispositif « bassins mobiles » de la ligue Bretagne de la fédération de natation par Laurent Guivarc’h, directeur technique régional. pic.twitter.com/9xMs4esErU
— Préfet du Morbihan (@Prefet56) August 21, 2020
La noyade est la première cause de mortalité par accident de la vie courante chez les moins de 25 ans.
Selon une enquête publiée par Santé publique France, en 2018, les enfants de moins de 6 ans ont représenté 28 % des noyades accidentelles et 9 % des décès. Les noyades accidentelles chez les moins de 6 ans ont davantage eu lieu en piscine (privée ou publique). Une nouvelle enquête est effectuée en 2021.
En 2019, le ministère des Sports a lancé le plan "Aisance aquatique", donnant naissance au programme "J'apprends à nager", pour permettre aux enfants âgés de six à 12 ans issus de quartiers prioritaires ou de zones rurales de bénéficier de cours gratuits.
En 2020, quatre villes de la région Paca ont proposé ce programme : la piscine de Frais Vallon et la piscine des Dauphins à Marseille, la piscine Guy Berthier à Arles et la piscine de la Rochette à Manosque.