Selon les dernières études, la consommation de tabac s'est accentuée pendant la crise sanitaire et les périodes de confinement en France. Ce n'est pas la seule addiction à monter en flèche.
En cette journée mondiale sans tabac, l'heure est au bilan. Et les derniers chiffres ne sont pas à la fête. Après une baisse du tabagisme remarquée depuis sept ans (-1,9 millions de fumeurs quotidiens entre 2014 et 1019), l'année 2020 signe une "stabilisation", selon Santé publique France.
En 2020, 25,5% des plus de 18 ans ont déclaré fumer quotidiennement, contre 24% en 2019. Les non-fumeurs, eux, sont passés de 37,7% de la population à 35,5%.
[#Tabac] Après une baisse du tabagisme de 1,9 million de fumeurs quotidiens en moins entre 2014 et 2019 en France métropolitaine, la prévalence se stabilise avec 25,5% de fumeurs quotidiens en 2020.
— SantépubliqueFrance (@SantePubliqueFr) May 27, 2021
? Lire le #BEH https://t.co/PD1WCkRdEk pic.twitter.com/2xcLV2R4Vc
Les effets de la crise sanitaire
L'enquête nationale baptisée "Addictions et crise sanitaire" réalisée par l'association Addictions France en partenariat avec BVA Santé va plus loin. Selon les résultats de cette étude, 53% des gros fumeurs (plus de 10 cigarettes par jour) ont augmenté leur consommation de tabac.
Toujours selon la même étude, près de 4 Français sur 10 disent avoir eu des difficultés à maîtriser leur consommation pendant le confinement.
Santé publique France a de son côté lancé depuis le début du confinement une étude pour connaître les comportements de la population sur la consommation d'alcool et de tabac.
Selon les derniers résultats publiés, 27% des fumeurs déclarent que leur consommation de tabac a augmenté depuis le confinement, 55% disent qu'elle est stable, pour 19% des Français elle a diminué.
La hausse de la consommation de tabac est plus fréquente chez les 25-34 ans (41%) et les actifs travaillant à domicile (37%).
Des inégalités sociales marquées
La hausse régulière des prix des paquets de cigarettes ne semble pas avoir eu d'effet sur la consommation. Les personnes les plus pauvres seraient les plus concernées par cette hausse du tabagisme.
D’après les résultats du Baromètre de Santé publique France publiés dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 26 mai 2021, la consommation de tabac quotidien a augmenté significativement parmi le tiers de la population dont les revenus sont les moins élevés (de 30% en 2019 à 33% en 2020).
Selon l'enquête BVA, 56% des personnes en situation financière difficile admettent qu’il était dur de maîtriser certaines consommations à risques en période de confinement (vs 38% en moyenne).
? Communiqué | Crise sanitaire et inégalités
— Association Addictions France (ex ANPAA) (@AddictionsFr) May 27, 2021
Consommations en ↗️, besoin d'un accompagnement renforcé... La crise a un impact considérable sur les personnes suivies pour des #addictions.
Et maintenant ? Continuons d’agir, ne les abandonnons pas. https://t.co/7jiTRcWuhL pic.twitter.com/HTtIXwXtPD
Ennui, manque d'activité, stress, recherche de plaisir
Selon l'enquête BVA, l’anxiété et l’ennui arrivent en 1ère et 2ème positions dans les causes de cette hausse du tabac pendant la crise sanitaire. Viennent ensuite le sentiment d’isolement ou de solitude et le plaisir.
Ces résultats n'étonnent pas Violaine Gubler, addictologue à la Casamance, hôpital privé d'Aubagne. Loin s'en faut. Selon la spécialiste, le constat est identique en Paca et cette hausse dépasse les frontières du pays. "Cela fait suite à un état de stress chronique lié aux effets de la pandémie. Les gens décompensent et les addictions explosent".
"Tabac, alcool, cannabis, écrans...", la psychiatre et addictologue énumère les addictions décuplées par le stress lié à la crise sanitaire. Mais elle évoque aussi la hausse vertigineuse des troubles du comportement alimentaire (TCA), des suicides chez les enfants et notamment chez les moins de 10 ans, des violences intrafamiliales.
"Ça fait un an que l'on sait qu'il va y avoir ça. Il n'y a pas que les vaccins pour sauver des vies. C'est dramatique ce qui se passe, on n'a jamais vu ça", déplore-t-elle.
Si les beaux jours peuvent être synonyme d'accalmie, au moins au niveau des chiffres du Covid, la psychiatre s'attend à de longues et "terribles" répercussions, dès l'automne prochain. "Entre collègues on se dit : 'reposons-nous cet été'. Car on sait que ça va être très dur ensuite".