Dans les Hautes-Alpes, le Rassemblement national a investi Jérôme Sainte-Marie, chargé de la formation des cadres du parti depuis 2023. Il se présente dans la 1ʳᵉ circonscription face à la députée sortante Renaissance, Pascale Boyer.
"On a dans cette circonscription, un comportement électoral qui ressemble de plus en plus au comportement des Français en général." Comme il l'a fait pendant des années, ce lundi 17 juin, Jérôme Sainte-Marie décortique les votes des dernières élections européennes. Mais cette fois, c'est pour y décrypter ses chances de l'emporter dans les Hautes-Alpes aux prochaines élections législatives anticipées. Son suppléant, Eric Sarlin, candidat malheureux en 2022, convoitait l'investiture du Rassemblement national, mais le parti lui a préféré ce conseiller de l'ombre de Marine Le Pen depuis des années. Le politologue et directeur de l'Institut PollingVox est parachuté dans la 1ʳᵉ circonscription face à la députée macroniste sortante, Pascale Boyer.
"Ce parachutage RN est un véritable mépris pour les Hautes-Alpes !, a réagi sur le réseau social X, Pascale Boyer, les Haut-Alpins confieront-ils leur avenir et leur beau territoire à une personne issue de tractations politiciennes de la capitale ?" .
Ce parachutage #RN est un véritable mépris pour les Hautes-Alpes !
— Pascale Boyer (@PascaleBoyerEM) June 12, 2024
Les hauts-alpins confieront-ils leur avenir et leur beau territoire à une personne issue de tractations politiciennes de la capitale ?#Legislatives
Jérôme Sainte-Marie réfute le terme de parachutage. "Les Hauts-Alpins me découvrent, mais je ne découvre pas les Hautes-Alpes, car j'y réside depuis une dizaine d'années à Saint-André de Rosans, c'est là où je vote, c'est là où je paie mes impôts", souligne le candidat, affirmant y habiter trois ou quatre jours par semaine et le reste à Paris, "comme le font les députés".
De spécialiste de l'opinion à candidat
Né à Alger, où ses parents étaient coopérants, Jérôme Sainte-Marie a grandi à Nice. Proche de la Ligue communiste révolutionnaire, il a été encarté à ses débuts au Mouvement des Citoyens de Jean-Pierre Chevènement mais n'a pas poussé plus loin son engagement en politique. Diplômé de Sciences Po Paris et de la Sorbonne, il a notamment travaillé au service d'Information du gouvernement sous Michel Rocard, puis comme directeur d'étude à l'Institut Harris et directeur du département opinion à BVA.
Théoricien d'une société divisée entre "bloc élitaire" et "bloc populaire", avec un "intérêt très prononcé pour le mouvement des gilets jaunes", il se définit comme "souverainiste", opposé à Maastricht en 1992 et tenant du non au référendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen.
En 2013, il fonde sa société d'études et de conseils, PollingVox, spécialisée dans les enjeux d'opinion. Un peu plus de 10 ans après, le politologue passe le pas et se lance comme homme politique. "C'est effectivement ma première campagne, comme énormément de Français, je suis saisi d'une forme d'inquiétude pour l'avenir du pays" et c'est "ce sentiment d'urgence" qui, dit-il, l'a convaincu de se lancer dans la bataille avec le RN dans la 1ʳᵉ circonscription des Hautes-Alpes.
"Ce qui est très frappant, c'est la progression du vote RN dans cette circonscription, on voit bien que c'est le fruit d'un travail d'implantation", analyse Jérôme Sainte-Marie. Pendant plusieurs décennies, il a livré son expertise sur les plateaux de télévision et dans les grands médias français. Même si le vote RN est plus bas dans les Hautes-Alpes que dans le reste de la France, le politologue pense pouvoir rafler ce siège. Il s'appuie sur une progression de 10 points du parti lepeniste depuis les dernières Européennes. Le candidat table par ailleurs sur "une participation assez forte", "plutôt bon signe" pour le Rassemblement national, "qui a une forte implantation dans les classes moyennes et les catégories populaires". "Plus les gens vont voter, plus le score du Rassemblement national augmente, c'est le slogan de Marine Le Pen : quand le peuple vote, le peuple gagne", note-t-il.
Celui "qui murmure à l'oreille de Marine Le Pen"
Présenté en janvier 2020 par l'Express comme "le sondeur qui murmure à l'oreille de Marine Le Pen", Jérôme Sainte-Marie a secrètement conseillé la présidente du Front national dès 2016, selon l'hebdomadaire. Il a régulièrement participé à "des réunions confidentielles en petit comité" au siège de campagne de la candidate à la présidentielle de 2017. Si, à l'époque, il ne se cache pas de lui prodiguer ses analyses, il conteste tout contrat avec Marine Le Pen.
En charge de "l'école des cadres" du RN
En mars 2023, l'analyste politique, non encarté au RN, s'affiche sans complexe aux côtés de Marine Le Pen et son poulain lors du lancement officiel de Campus Héméra. Longtemps discret sur sa collaboration avec le RN, Jérôme Sainte-Marie officialise enfin son "partenariat" avec le parti lepeniste en 2022. C'est Jordan Bardella qui le met en lumière lorsqu'il annonce le lancement de son grand projet d'école de formation des cadres du parti, "pour faire émerger une nouvelle élite pour le pays".
Après l’implantation, la formation : faire émerger une nouvelle élite pour le pays, c’est la 2ème grande ambition de ma présidence. En partenariat avec Jérôme Sainte-Marie, je souhaite doter le RN d’un campus performant capable de former et d’occuper le terrain des idées. pic.twitter.com/Ck7NX2U2Zj
— Jordan Bardella (@J_Bardella) November 9, 2022
"Quand je suis invité dans une émission de télé, on précise maintenant à chaque fois que j'ai un contrat avec le RN. Mais pendant trente ans, on n'a jamais demandé avec qui je travaillais", s'agace l'ancien sondeur dans Le Parisien, le 21 février 2023. Sa proximité affichée avec Marine Le Pen lui vaudra en octobre 2023 d'être écarté de LCI, où il intervenait comme chroniqueur.
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Pour ce baptême électoral, Jérôme Sainte-Marie va affronter la députée sortante, Pascale Boyer (Ensemble), réélue en 2022, dans un duel très serré avec Michel Philippo, le candidat de la NUPES, devancé d'à peine 199 voix. Trois autres candidats sont en lice dans cette 1ʳᵉ circonscription des Hautes-Alpes qui couvre notamment les cantons de Gap, Laragnes et Veynes : Marie-José Allemand (Nouveau Front Populaire), Véronique Buisson (Lutte Ouvrière) et Dorian Deininger (Les Républicains).