Interne à l'AP-HM et suivi par plus de 84.000 personnes sur les réseaux sociaux, Amine a été contacté sur son compte Instagram "Et ça se dit médecin" par une mystérieuse agence de communication. Comme d'autres influenceurs, elle lui proposait de dénigrer le vaccin Pfizer-BioNTech pour 2000€.
Interne en médecine, Amine a créé les comptes "Et ça se dit médecin" sur Facebook, Twitter ou Instagram, des comptes où il partage des moments de sa vie à l'hôpital de la Timone, démonte des fake news et vulgarise des questions de santé auprès de ses dizaines de milliers d'abonnés.
Le 20 mai dernier, il a expliqué avoir été sollicité par email et par message privé pour une demande de partenariat rémunéré sur Instagram, de la part d'un client préférant "rester icognito". La proposition : dénigrer le vaccin Pfizer BioNTech, contre une rémunération de 2000 euros.
MDR je viens de recevoir sur Instagram une demande de partenariat rémunéré genre 2000€ la story pour décrédibiliser le vaccin Pfizer-BioNTech (genre dire des effets indésirables graves, etc.) ?. Si vous voyez ce genre de post chez des "influenceurs méfiez-vous.
— Et ça se dit Médecin ????⚕️⚕️ (@ecsdmed) May 20, 2021
Comme le Youtubeur Léo Grasset, qui anime la chaîne Dirty Biology, Amine explique avoir reçu une liste de conditions précises à respecter pour ce partenariat : entre autres, affirmer que le taux de mortalité est trois fois plus élevé chez les personnes vaccinées par Pfizer plutôt qu'AstraZeneca, et ne pas révéler que la publication est une vidéo sponsorisée et rémunérée.
"C'est minable, c'est dangereux, c'est irresponsable", a estimé le ministre de la Santé Olivier Véran, interrogé ce mardi lors d'un déplacement à Avignon. "Les Français sont largement majoritaires à souhaiter le vaccin aujourd'hui et je ne crois pas que des velléités (...) visant à essayer de faire de la communication négative soient de nature à détourner les Français de la vaccination", a-t-il ajouté.
Les influenceurs Youtube et TikTok concernés ont aussi reçu une supposée fuite de mails internes à AstraZeneca, qui prouveraient que le vaccin Pfizer provoque plus d'effets négatifs que le leur. Face à la polémique, le groupe pharmaceutique suédo-britannique a nié toute forme d'implication dans la campagne.
Une mystérieuse agence à l'existence fantôme
L'agence qui a contacté Amine se fait appeler Fazze, et se présente comme une entreprise de marketing basée à Londres. Toutefois, elle semble n'avoir ni clients, ni existence légale, et une recherche rapide sur Google Maps montre que l'adresse indiquée sur son site ne correspond pas - il s'agit en effet d'un centre esthétique. De plus, ses comptes réseaux sociaux possèdent très peu d'abonnés, et il n'y a aucune trace de ses précédents projets.
Incroyable.
— Léo Grasset (@dirtybiology) May 24, 2021
L'adresse de l'agence londonienne qui m'a contacté est bidon. Ils n'ont jamais eu de locaux là bas, c'est un centre laser esthétique ! Tous les employés ont des profils LinkedIn chelous... qui disparaissent depuis ce matin. Tout le monde a bossé en Russie avant.
WTF pic.twitter.com/RKiEpYoMgV
Le média en ligne spécialisé dans la technologie Numerama relève aussi que cette "campagne informationnelle" reprend les mêmes arguments que la campagne officielle du vaccin russe Sputnik V sur Twitter. Les soupçons se portent donc vers la Russie, même s'il n'y a pour le moment aucune preuve de son implication.
Le ministre de la Santé, de son côté a expliqué qu'il ne se "permettrait pas de faire des hypothèses" sur l'origine de cette campagne à ce stade.