"Aujourd'hui, il fait 35°C, on va arrêter à 14h" : les chantiers s'adaptent comme le veut le Code du travail

Depuis quelques étés, les températures s'envolent et mettent en difficulté les travailleurs exposés à cette chaleur. En première ligne, les salariés de la construction. Si le Code du travail continue d'ignorer ce changement climatique. Un décret le prend désormais en compte.

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Ce jeudi 1ᵉʳ août, les départements du Var et des Alpes-Maritimes sont encore en vigilance orange. Les températures ont atteint les 37°C dans les communes varoises de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume et de Gonfaron. Dans les Alpes-Maritimes, il faut remonter dans les terres pour atteindre 24°C à Puget-Théniers.

En revanche, si les températures dépassent peu les 30°C en journée, la nuit, elles ne descendent pas en dessous des 27°C. C'est la définition même de la canicule.

Météo-France caractérise la canicule comme un épisode "de températures élevées, de jour comme de nuit, sur une période prolongée (au moins trois jours)". Pour les identifier, les météorologues ont défini des seuils de température et de durée qui varient selon les départements.

Dans le sud du pays, la canicule est avérée lorsque les températures ne descendent pas en dessous de 35 °C le jour et 20 °C la nuit. Dans le Nord, les seuils sont légèrement plus bas : 33 °C le jour et 18 °C la nuit.

Météo-France

À titre de comparaison, les records de chaleur en France hexagonale, depuis l'existence des relevés de Météo France, ont eu lieu le 28 juin 2019 : 46,0 °C à Vérargues (Hérault) et 45,9 °C à Gallargues-le-Montueux (Gard). Selon Météo France, la fréquence des canicules devrait doubler d'ici 2025.

La construction : attention malaise

Dans un rapport de l'OIT, l'Organisation International du Travail, désigne la construction comme un secteur "particulièrement à risque parce qu’elle exige plus d’efforts physiques et/ou s’exerce à l’extérieur".

On s'hydrate beaucoup, c'est la seule solution. Le seuil de tolérance est de 34°C. Aujourd'hui il fait 35°C. On a démarré il était 6h ce matin, on va arrêter à 14h.

Un ouvrier sur un chantier à Draguignan

L'OIT précise "À 33-34 °C, et pour une intensité de travail modérée, la performance du travailleur chute de 50 pour cent. L’exposition à des niveaux de chaleur excessifs peut entraîner des coups de chaleur, parfois mortels." À noter, le souci de la productivité, le lecteur appréciera.

Le BTP, c’est un accident grave toutes les 5 minutes et un mort par jour travaillé. Avec les vagues de chaleur ,nous avons observé plus d’évanouissements pour cause de déshydratation, ce qui augmente les risques de chute mortelle.

CGT Construction, 2022.

Cela peut paraître incroyable, mais le Code du travail n'indique aucune limite en ce qui concerne la température maximale où les salariés sont amenés à travailler, en extérieur ou en intérieur. Il existe seulement des dispositions générales, prévu à l'article L 4131-1, qui permettent à un salarié d'exercer son droit de retrait, s'il considère que les conditions dans lesquelles il travaille présentent "un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé".

Au-delà de 30 °C pour une activité sédentaire et 28° pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés.

L'Institut national de recherche et de sécurité (INRS), spécialisé dans la recherche sur la santé au travail.

Néanmoins, l’employeur doit prendre des mesures pour "assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés".

Pour ce faire, il doit mener des actions de prévention des risques professionnels, d’information et de formation auprès de ses salariés, mettre en place une organisation et des moyens adaptés.

Le ministère du Travail indique que l'entreprise doit "mettre à disposition un local de repos adapté aux conditions climatiques ou aménager le chantier" pour permettre des pauses, et fournir "trois litres d'eau potable et fraîche au minimum par jour et par salarié". Elle doit "ajuster l'aménagement de la charge de travail" et "l'organisation du travail".

Juin 2024 : les salariés peuvent (enfin) être indemnisés

La canicule, par décret le 28 juin 2024, fait son entrée dans la liste des conditions atmosphériques permettant de déclencher l'indemnisation des arrêts de chantier pour cause d'intempéries.

Le texte de loi fixe pour l'instant les conditions de remboursement. Un arrêté du ministre chargé de l'emploi doit (encore) définir les conditions atmosphériques, comme les seuils de températures, pouvant être prises en charge par le dispositif d’indemnisation.

Concrètement, lorsque Météo France déclenche un niveau orange ou rouge de vigilance canicule, les salariés pourront désormais percevoir des indemnités pour les périodes d'arrêt de travail. Soit environ 75 % de leurs revenus.

Du côté des entrepreneurs, c'est également le soulagement.

Désormais, lorsque nous ne pourrons pas respecter les délais de livraison d'un chantier, en raison d'un trop grande chaleur, nous ne serons plus soumis aux pénalités de retard.

Patrick Moulard, président de la Fédération du Bâtiment et des Travaux Publics des Alpes-Maritimes

De son côté, la CGT, principale organisation syndicale dans la construction, "salue la publication du décret « Intempéries » pour le BTP s’agissant des périodes caniculaires. Périodes qui devraient monter en fréquence et en intensité selon les scientifiques du climat."

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