Pour ce premier numéro de l'année, "Vue sur mer" accoste au Pôle écoles Méditerranée de la Marine nationale, à Saint-Mandrier dans le Var.
Pour celui qui ne connaît pas, avant d’y arriver, le trajet est un peu long. Il faut traverser la ville de la Seyne, ses embouteillages matinaux, dépasser la corniche Tamaris, longer les chantiers navals… et au bout de la presqu’île se trouve enfin Saint-Mandrier. Sa mairie, son petit port et ses troquets, bien vides en cette saison. Et enfin le Pôle écoles Méditerranée et ses 8 000 stagiaires formés chaque année.
De l’extérieur, le bâtiment ne paye pas de mine, mais une fois la barrière de sécurité passée, on comprend qu’ici, personne ne vient pour rigoler. Il est 7h15 et le lever des couleurs est déjà passé, au bout du ponton, les premiers exercices vont avoir lieu.
"J’ai toujours su que je ferais cette école"
Elora est la seule femme du groupe d’une trentaine d’élèves plongeurs de bord. Une formation de plusieurs semaines pour pouvoir ensuite travailler à bord d’un bateau (marine nationale, gendarmerie, pompiers, armée de terre, armée de l’air) et intervenir pour tous les travaux sous l’eau.
Avec sa combinaison orange, ses bouteilles sur le dos et ses 20 ans, elle semble un peu fragile. Mais au ton de la voix, on entend immédiatement la détermination. Si elle est là, c'est que la jeune femme en veut et qu’elle est très compétente. "Mon grand-père a fait cette école également, il était aussi plongeur de bord, sourit-elle. J’ai toujours su que je ferais cette école. Depuis toute petite, c'est mon but."
La jeune femme met son masque sur le visage, son détendeur dans la bouche et rejoint et les autres plongeurs en se jetant à l’eau. "Soyez méthodique !", hurle l’un des instructeurs.
Par équipe de deux, ils vont tour à tour simuler, sous l’eau, un malaise. C’est au coéquipier de venir en aide au blessé. Tous disparaissent sous la surface.
Des explosions sous-marines
Prochaine étape, un chaland multi-missions qui conduit à un chantier de pétardement, un exercice très secret auquel France 3 Paca peut assister de façon exceptionnelle.
Vincent est élève plongeur démineur. Une formation qui dure presque un an. Il a 35 ans et il est déjà dans la marine nationale. "C’est le dernier exercice de l’année, souffle-t-il. Il va valider notre année de formation."
Ce métier est comme une évidence pour lui. "Nous formons une équipe. Nous avons une confiance absolue en nos binômes. Le danger ? Non, je n’y pense pas, assure Vincent. Bien sûr qu’il existe. Mais il faut répéter et encore répéter pour le maitriser."
"C’est plus qu’un métier, c'est une passion. Une passion aussi pour ma patrie."
Vincentà France 3 Paca
Cette nuit, l’équipe de formateurs a caché dans la rade de Toulon, sous l’eau, des explosifs.
A proximité, discrètement, un bateau est resté pour surveiller les charges bien réelles.
En quelques heures, Vincent et les autres plongeurs démineurs stagiaires, doivent remettre la main sur ces charges avec les indices donnés par leurs formateurs.
"Trois, deux, un… destruction !"
Un instructeur, qui souhaite rester anonyme, prend la parole. "Notre métier est sans doute l’un des seuls au monde ou la moindre erreur est fatale, martèle-t-il. Sous l’eau, chaque mouvement doit être réfléchi, précis et net. Il faut être un excellent plongeur et connaitre tous les types de mines. Il faut aussi être capable de contrôler son stress. C’est lui qui peut causer notre mort."
L’un des explosifs vient d’être repéré. L’heure n’est plus à la discussion. Rapidement, la charge qui ressemble, vue du bateau, à un gros paquet gris, est emmenée au large, tractée derrière l'une des embarcations. C’est ensuite un petit zodiac qui l’éloigne encore un peu.
"Trois, deux, un… destruction !" Dans la cabine, un des élèves entame un décompte sur son talkie-walkie. Il est en lien avec les autres stagiaires du zodiac. Ce sont eux qui appuieront sur le bouton pour faire comme "péter la charge".
Plus personne ne parle. Même les mouettes semblent s’être éloignées. Elles ont bien raison.
Après le bruit puissant et sourd, une onde de choc secoue le bateau, pourtant bien lourd. Les mouettes reviennent. Elles ont l’air d’avoir l’habitude.
A la surface, les débris de la charge… mais aussi des dizaines de poissons le ventre à l’air. Un festin pour les oiseaux. Sur le bateau, le bruit de conversation reprend. En France, on compte à peine 200 plongeurs démineurs.
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