A Avignon, la peur de revivre l'annulation du festival de 2003

Les commerçants d'Avignon redoutent une annulation du festival d'Avignon. La CGT vient de reconduire ce jeudi le préavis de grève pour le mois de juillet et appelle à la "grève massive" le jour de l'ouverture du festival le 4 juillet. Une catastrophe pour les restaurateurs et hôteliers de la ville. 

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"Un désastre", une "catastrophe"... Hôteliers, restaurateurs et commerçants d'Avignon s'inquiètent déjà d'une éventuelle annulation du festival "in", avec en mémoire l'été noir de 2003, où une ambiance délétère avait plombé la ville.

Le mois de juillet, c'est le plus gros mois : trois fois le chiffre d'affaires de juin, près d'un quart du chiffre de l'année"


Wesley Major, dont la boutique de glaces donne sur la place de l'Horloge, en plein centre d'Avignon, résume ainsi l'enjeu pour les commerçants de la ville.

Donc si le festival n'a pas lieu, oui, c'est inquiétant. Je dois tripler mon personnel pour cette période, mais là, je suis dans l'attente"


explique ce jeune patron en nettoyant sa vitrine.

"Une catastrophe économique"

Un peu plus loin sur cette place historique du vieil Avignon, où les terrasses de cafés et restaurants s'enchaînent, et sont encore loin de faire le plein en cette avant-saison, la responsable de l'hôtel Kyriad anticipe "une catastrophe économique", si le festival ne se déroule pas du 4 au 27 juillet du fait du mouvement des intermittents du spectacle.

C'est comme si Cannes était annulé. Les gens viennent uniquement pour le festival".


Même si, comme en 2003, le festival "off" se tient dans sa quasi-totalité, "il y aura des conséquences", prédit-elle : "Par exemple, les clients réservent 5-6
nuits et ne restent que deux nuits. Pour nous, c'est une perte sèche car, derrière, on ne reloue pas
".

"Une ambiance délétère en ville"

Emmanuel Perrin, propriétaire du café-restaurant Le Moutardier, qui fait face au Palais des Papes, se souvient également de 2003. "Je n'ai pas tant perdu que ça cette année-là en termes de chiffre", reconnaît-il, "mais il y avait une ambiance délétère en ville. Tout le monde était triste, et tirait une gueule de six pieds de long". La période du 1er juin au 30 septembre représente 60% de son activité et le mois de juillet est "le plus gros des mois", dit-il. Pour autant, il n'en veut pas aux intermittents.

On travaille avec des intermittents en permanence. Leur vie, on la connaît. Ce n'est pas des gens qui râlent toute l'année"


dit-il, tout en affirmant "ne pas comprendre qu'on puisse en arriver là".

2015 et 2016 menacés également

Le directeur du festival "in", Olivier Py, a prévenu: l'annulation sera probable si le projet de future convention chômage, contesté par les intermittents, est
agréé par le gouvernement. Le festival représente 25 millions d'euros de revenus pour la ville, selon lui. Des chiffres en partie confirmés par l'Agence de développement du Vaucluse. Cette estimation se base sur une étude menée au début des années 2000, qui évaluait alors à 22,9 millions les retombées économiques du célèbre festival de théâtre, dont 8 millions de retombées directes (billetterie, hôtellerie, restauration principalement) et 14,8 millions d'indirectes (achats divers liés à la présence de festivaliers).

Une perte de 4 millions d'euros pour les organisateurs

"Ca n'arrivera pas", espère Paul Rondin, directeur délégué du festival. Mais il reconnaît que l'impact serait "effrayant", pour les commerçants... et encore plus pour le festival. L'annulation représenterait une perte de 4 millions d'euros minimum (bien 4 millions) pour l'association organisatrice. "Nos partenaires financiers nous ont déjà prévenus qu'ils n'auraient pas la capacité d'éponger les pertes", prévient-il. Une telle perspective rendrait extrêmement incertaine l'organisation du "in" 2015, voire 2016. "Or, c'est quand même le moteur" de toute cette activité économique, souligne-t-il,
évoquant l'"effet de marque" du festival, et les dégâts "si l'identité de cette marque" était remise en question.

Une couverture médiatique unique

Une image dont a bien conscience M. Perrin, le cafetier installé face au palais des Papes. "J'ai des collègues hôteliers restaurateurs sur la Côte, à Saint-Tropez, dans des endroits bien plus prestigieux. Mais ils ne bénéficient pas de cette couverture médiatique", souligne-t-il. Quant à la ville, qui avait épongé une bonne partie du déficit de l'association en 2003, "elle est dans une situation financière bien plus délicate" cette fois-ci et dispose "de très peu de marge de manoeuvre", prévient une élue municipale de la nouvelle majorité - socialiste - de la ville.
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