Les lustres de Notre-Dame de Paris, endommagés par l'incendie de la cathédrale, sont en cours de restauration à la lustrerie Mathieu à Gargas, dans le Vaucluse. Une exposition gratuite invite à découvrir jusqu'au 22 septembre le savoir-faire des compagnons qui ont rendu leur beauté d'antan.
Cinq ans après l'incendie, les 13 lustres monumentaux, nettoyés et restaurés, retrouveront leur place dans la nef de Notre-Dame de Paris à l'automne. D'ici là, le public peut venir les admirer dans cette exposition gratuite, à la lustrerie Mathieu, à Gargas, qui leur a redonné vie. "On est vraiment fiers de restituer les lustres originaux", confie le fondateur de l'entreprise familiale.
Un "hôpital pour lustres"
Régis Mathieu contemple l'enfilade de lustres illuminés, suspendus au haut plafond de l'atelier, ému du travail colossal réalisé depuis presque deux ans. "Cette pièce était devenue un hôpital pour lustres, on avait tous les lustres noirs, très endommagés", certains "tombés étaient complètement cassés, aplatis, etc.", se souvient-il. La chaleur des flammes avait fait de gros dégâts, tordant et déformant les pièces de bronze et détériorant les dorures.
Pour les refaire "à neuf", il a fallu d'abord procéder à une minutieuse analyse pour déterminer la technique employée par les lustriers à l'époque de la construction de la cathédrale. "Une fois qu'on voit ce qui a été fait et comment ça a été fait, on peut faire pareil", explique le restaurateur.
Les pièces cassées ou détruites ont été remplacées mais "70 à 80 %, c'est le lustre original", souligne l'artisan qui parle de ses protégés avec passion.
On a eu beaucoup de chance que le lustre accepte de se faire restaurer.
Régis Mathieu, fondateur Mathieu LustrerieFrance 3 Provence-Alpes
Un "miracle" tant certains lustres étaient détériorés, notamment par la chute de la nef. "On n'est pas toujours sûrs de pouvoir tout sauver quand on a le lustre entre les mains".
"C'était merveilleux, on a chauffé, on a mis ça dans un gabarit et les pièces sont revenues tout de suite à leur forme originale, comme si elles avaient envie de retourner à la cathédrale", s'extasie le restaurateur. Heureux d'avoir rempli sa mission : "sur la totalité des lustres, toutes les pièces qui sont rentrées à la lustrerie repartent à la cathédrale", confie-t-il.
Des centaines d'essais pour refaire la dorure
Il a aussi fallu tout le savoir-faire de ces compagnons, reconnu dans le monde entier pour ensuite refaire le doré éclatant des lustres parisiens. "C'est très compliqué quand on fait du vernis or sur des parties d'origines, des pièces restaurées et des pièces qu'on rajoute", "on a fait des centaines d'essais pour arriver à homogénéiser tout ça et qu'aujourd'hui, on ait l'impression que c'est un lustre neuf".
Michaël est l'un des trente compagnons mobilisés sur ce chantier à l'atelier. Il s'est inspiré d'une applique épargnée par les flammes pour retrouver la teinte exacte du vernis or, qui caractérise les œuvres d'Eugène Viollet-le-Duc au 19ᵉ siècle. Le compagnon a reproduit le mélange souhaité pour retrouver le brillant d'origine, validé par les experts des monuments historiques. "C'était un challenge, ça faisait peur même, parce qu'il y avait beaucoup de préparation, finalement, Il était avec nous", dit-il, en souriant y voyant un signe du ciel.
Comme neuf et "le plus clinquant possible", c'était une exigence de l'architecte des monuments historiques pour que les lustres soient "à l'unisson" avec Notre-Dame restaurée.
Dans cette cathédrale qui a été blanchie, alors qu'à l'époque, elle était complètement peinte de toutes les couleurs, c'est le lustre qui joue aujourd'hui la partition de la couleur.
Régis Mathieu
Des lustres qui font lever les yeux vers les magnifiques vitraux et l'architecture gothique extraordinaire de la cathédrale de Paris. La restauration de Notre-Dame, qui a mobilisé plus de 1000 artisans en France, et plus de 800 millions de travaux, devrait s'achever à la fin de l'année. La réouverture au public est prévue le 8 décembre.