Surnommée "route de la mort" par de nombreux auvergnats, la RCEA est tristement connue pour les accidents mortels qui se produisent régulièrement sur son tracé.
A Montbeugny, on a l'habitude de voir des accidents graves sur la RCEA. Pas plus tard que le 17 septembre 2015, une voiture et un camion s'étaient déjà percutés sur la commune, faisant 2 morts et un blessé grave. Le 22 août 2012, un carambolage entre 6 véhicules dont 3 camions faisait 4 blessés graves. Le 17 avril 2010, un accident faisait 3 morts ...
Et il n'y a pas qu'à Montbeugny. Tout au long de son tracé, la Route Centre-Europe-Atlantique a provoqué une triste et longue liste de drames. Depuis le milieu des années 90, la route fait chaque année des victimes dans l'Allier : 10 morts en 1996, 8 en 2000, 10 en 2002, 9 en 2009, 14 morts en 2010, 10 en 2011 ... Et plus encore si l'on compte le département voisin de Saône-et-Loire.
Au départ : un axe touristique
Imaginée en 1954 sous l'impulsion de Louis Escande (député-maire de Mâcon) de Georges Rougeron (Président du Conseil Général de l'Allier), des chambres de commerce et d'industrie de Bordeaux et de Genève, la Route Centre-Europe-Atlantique devait représenter un axe touristique entre les villes de son tracé. Les tronçons sont aménagés progressivement à partir des années 60 et lors des décennies qui suivent.La configuration de la RCEA est particulière, notamment dans l'Allier. Sur les zones non réaménagées, les ouvrages d'art sont dimensionnés pour une route à deux fois deux voies et les entrées / sorties se font via des carrefours dénivelés (comme sur une autoroute) mais la chaussée a été initialement construite avec seulement une voie dans chaque sens, sans rail de sécurité au milieu.
Un trafic de poids lourds beaucoup plus important que prévu
Au fil de sa construction, cet itinéraire gratuit devient surtout prisé par les poids lourds et les échanges économiques l'emportent rapidement sur sa vocation première. La RCEA rallie l'A71 et l'A6 et surtout, elle est un des itinéraires les plus courts entre l'est de l'Europe et la péninsule ibérique.Au début des années 2000, plus de la moitié du trafic est constitué de camions (contre à peine plus d'un dixième sur les autres nationales françaises non concédées). Les accidents sont de plus en plus nombreux et souvent mortels. Les chocs frontaux impliquant des poids lourds sont fréquents.
Une mise à 2 fois deux voies de certains tronçons est rapidement envisagée, mais les travaux traînent faute d'argent pour les financer. Quelques créneaux sont progressivement aménagés à partir des années 90. Des panneaux d'avertissement, des radars et des "bandes sonores" sont installés de même que des lignes élargies entre les deux chaussées.
En tout, selon le secrétaire d'Etat aux transports Alain Vidalies, interviewé sur France Info, le total des investissements sur la RCEA s'élève à prés d'un milliard d'euros. Pourtant, de nombreux tronçons restent en 2x1 voies dans l'Allier (en 2010, seul un tiers du trajet est passé en 2x2 voies dans le département).
La question de la concession
Les problèmes de financement posent rapidement la question de la mise en concession pour le privé, qui va devenir le débat central.Dés le milieu des années 90, certains élus estiment que la mise en place d'un péage permettrait de financer les travaux, mais le débat divise et les positions changent à plusieurs reprises. Des désaccords existent également entre les élus de Saône-et-Loire et ceux de l'Allier.
Après un débat public en 2010, l'Etat décidé la mise en concession autoroutière de l'ensemble du parcours mais la décision est gelée par l'arrivée de la gauche au pouvoir. Finalement, en 2013, le ministre des transports Frédéric Cuvillier reconnaît l'urgence de l'aménagement et remet l'idée sur les rails.
Dans ce projet, le financement, la réalisation et l'aménagement de la partie de la RCEA qui se trouve dans l'Allier seront confiés à un concessionnaire pour un montant des travaux estimé à 361 millions d'euros. La signature de ce contrat de concession à une société privée doivent avoir lieu en 2017. Les premiers coups de pioche seraient programmés dès 2018 pour une mise en service prévue en 2020.
L'accident de ce jeudi montre une nouvelle fois la nécessité de les terminer rapidement.