Coupures d'eau pour impayés : après des condamnations dans l'Aisne, un sénateur UMP veut légaliser la pratique

Un sénateur UMP a déposé un amendement pour autoriser les sociétés distributrices à couper l'eau des clients qui ne payent pas. Une pratique interdite par la loi Brottes, qui a déjà valu des condamnations à la Lyonnaise des eaux et à la SAUR dans l'Aisne.

Des sénateurs entendent revenir sur une disposition datant de 2013 qui interdit à un distributeur de couper l'eau à un consommateur et ils ont déposé un amendement en ce sens à la loi sur la transition énergétique en cours d'examen.

Par cet amendement, "l'idée est d'instaurer toujours une trêve hivernale mais pour les gens qui sont en difficulté", a indiqué le sénateur Christian Cambon (UMP/Val-de-Marne), auteur de l'amendement et également vice-président du Syndicat des eaux d'Ile-de-France en charge de la distribution d'eau dans 149 communes représentant près de 4 millions d'habitants.

 

Une pratique interdite aujourd'hui


La loi Brottes du 15 avril 2013, dont le décret d'application date du 27 février 2014, interdit désormais à un distributeur de couper l'alimentation en eau dans une résidence principale même en cas d'impayé et cela tout au long de l'année. C'est la même loi qui instituait aussi le principe de trève hivernale pour l'électricité et le gaz et pour tous les consommateurs sans distinction de revenus.

En septembre et décembre 2014, pour avoir coupé l'eau, pendant plusieurs mois, à des clients de l'Aisne qui n'avaient pas réglé leurs factures alors qu'ils étaient dans des situation financières très difficiles, la SMAUR a été condamnée, tout comme la Lyonnaise des Eaux, entre autres.

Un reportage de Julien Guéry, Henri Desaunay et Mathieu Krim. Intervenants : Michel Léveque, Voisin ; Arnaud, 29 ans ; Emmanuel Poilane, Directeur général de France Libertés, Fondation Danielle Mitterrand.

Clarifier la loi pour contrer les clients de "mauvaise foi"


Dans la motivation de leur amendement, les sénateurs indiquent eux que la loi actuelle pourrait "entraîner des comportements non-citoyens", en clair, augmenter le nombre d'impayés.

Les distributeurs d'eau eux jugent "important qu'on clarifie" la loi, a affirmé Tristan Mathieu, délégué général de la Fédération des entreprises de l'eau (FP2E). "L'important est de protéger les plus démunis et c'est au Parlement de définir des critères auxquels nous nous plierons (...) mais nous défendons l'idée qu'il faut pouvoir couper les clients qui peuvent payer et sont de mauvaise foi", a-t-il ajouté.

Des dérives possibles ?


L'association France Libertés s'était portée partie civile dans les contentieux opposant les clients privés d'eau aux distributeurs et qui ont obtenu gain de cause. "Depuis nous avons reçu 500 dossiers de litiges de particuliers", a indiqué Emmanuel Poilâne, directeur de cette association.

Il regrette la démarche des sénateurs, estimant que "tout le concept de la loi Brottes est (...) de faire en sorte que la coupure ne soit pas le premier moyen pour récupérer des impayés". L'association dénonce au contraire "un business de la coupure" de la part des distributeurs, qui entendent recouvrer plus vite les impayés, quelle que soit la situation du client concerné.
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