Cette nuit, le pilote Pascal Fauret a rejoint son collègue isérois Pascal Fauré, incarcéré depuis mardi à la prison des Baumettes à Marseille.
Pascal Fauret, le second pilote mis en cause dans l'affaire Air Cocaïne, a été placé ce jeudi 5 novembre en détention provisoire par les juges d'instruction chargés du dossier à Marseille après une quinzaine d'heures d'interrogatoire, au surlendemain de l'incarcération du premier pilote, Bruno Odos. Vers une heuredu matin, le juge des libertés et de la détention (JLD) a statué sur le placement en détention provisoire de ce pilote qui a rejoint ainsi son collègue Bruno Odos, incarcéré mardi à la prison des Baumettes à Marseille.
Me Jean Reinhart a déploré que les explications et les réponses "limpides" de son client n'aient pas infléchi la décision des juges: "l'institution judiciaire a repris ses travers en mettant en détention provisoire M. Fauret", a-t-il déclaré en sortant de la comparution devant le JLD, évoquant "une décision inique" et un appel prochain. L'avocat a indiqué que son client "très fatigué" au terme d'une longue journée d'interrogatoire et de débats, n'avait pas eu la force de réagir à cette décision.
Ce sont les premières auditions de ces pilotes par les juges d'instruction Christine Saunier-Ruellan, Guillaume Cotelle et Christophe Perruaux, depuis que les deux hommes ont fui la République dominicaine où ils ont été condamnés à vingt ans de prison. Les deux pilotes, arrêtés en mars 2013 en République dominicaine aux commandes d'un avion où étaient entassées des valises contenant 680 kg de cocaïne, sont visés depuis leur fuite de ce pays par un mandat d'arrêt international, mais Paris a écarté l'hypothèse d'une extradition.
A la mi-journée, Me Reinhart avait indiqué que "Pascal Fauret répond(ait) à toutes les questions (des magistrats instructeurs)", précisant qu'elles portaient notamment sur "les conditions du retour, les raisons pour lesquelles il est revenu en France, et toute une série de questions sur la préparation des vols". "Ils n'ont pas ouvert les valises" transportées par dizaines à bord d'un Falcon 50, ce ne sont pas des protagonistes du trafic de drogue transatlantique sur lequel enquêtent les juges, avait alors martelé l'avocat.
Le dossier a été ouvert début 2013 à Marseille, sur la base d'un renseignement des gendarmes, en décembre 2012, sur le "comportement suspect" de passagers d'un Falcon 50 ayant atterri un mois plus tôt à Saint-Tropez (Var). Plusieurs vols de cet avion, mis en location par la société SNTHS, basée à Bron (Rhône), sont suspects aux yeux de la justice française. La justice soupçonne les pilotes, ainsi que deux autres Français, Nicolas Pisapia et Alain Castany, condamnés comme eux en République dominicaine - et qui s'y trouvent toujours - d'avoir importé de la cocaïne en France dans les valises chargées dans le jet privé.
Un douanier en poste à Toulon est également soupçonné de complicité. Un homme d'affaires, Franck Colin, actuellement en détention provisoire à la prison de Luynes (Bouches-du-Rhône), a reconnu avoir affrété l'avion et les deux patrons de la SNTHS sont également suspectés d'être impliqués. Outre les enjeux diplomatiques vis-à-vis de Saint-Domingue, le dossier "est devenu extrêmement sensible et peut-être même politique", a déploré Me Reinhart.
Le nom de l'ancien président Nicolas Sarkozy est en effet apparu de manière incidente dans le dossier, car trois vols avaient été affrétés pour son compte auprès de la même compagnie SNTHS par la société Lov Group de son ami Stéphane Courbit. Ce volet de l'enquête sur un éventuel abus de biens sociaux a été transféré à Paris. M. Sarkozy s'est insurgé que la juge marseillaise ait pu faire géolocaliser en 2013 son téléphone dans ce cadre, et a appelé mercredi à "réallouer les moyens" utilisés à surveiller plutôt des "terroristes". La veille, le Premier ministre Manuel Valls a assuré que le gouvernement n'avait pas été tenu au courant de cette géolocalisation.
Mercredi, le Front national a pris ses distances avec cette affaire, alors que deux membres du parti d'extrême droite, le député européen Aymeric Chauprade et son assistant parlementaire, ont participé à la fuite des deux pilotes. "Le Front national n'est rien allé faire dans cette galère du tout. Ce sont des personnes, des individus. M. Chauprade l'a fait dans sa vie privée - il est responsable de ses actes", a assuré sur France Info Florian Philippot, l'un des vice-présidents du FN.