Emile Allais, monument du ski français, est décédé en Haute-Savoie

25 février 2012, dernière grande sortie publique pour ses 100 ans. Emile Allais était un beau papi souriant, respecté de tous. Le grand-père du ski français s'est éteint. Ses obsèques auront lieu mardi 23 octobre à Megève.

Né en 1912 à Megève, Emile Allais fut le premier médaillé d'or français en ski alpin. Auteur d'un triplé aux championnats du monde en 1937 à Chamonix (descente, slalom, combiné). Un an plus tôt, il avait décroché une médaille de bronze en combiné aux Jeux Olympiques de Garmisch en Allemagne, devant Hitler. Un siècle de vie, quasiment un siècle de ski et d'inventions aussi.

On le présente souvent comme l'inventeur de la méthode de ski française rivale de l'autrichienne jusqu'alors dominante dans le monde mais Emile Allais fut aussi le premier moniteur au pull rouge dont il était si fier. Le premier à comprendre que les stations des Alpes devaient se moderniser, de la chenillette aux pisteurs. Le premier aussi à porter des pantalons à fuseaux aérodynamiques dans ses chaussures !

Une légende, qui, à plus de 100 ans, continuait à skier et descendait, avec la même passion, les pistes de Megève ou de Courchevel. Depuis une semaine, après un malaise, il était hospitalisé à Sallanches en Haute-Savoie.

 

La belle histoire

Imaginez Megève dans les années 20, un village loin de son visage actuel, ce n'était pas encore une station cossue, les parents d'Emile y étaient boulangers, pas le temps de skier. D'ailleurs "skier", c'était un mot tellement abstrait dans cette contrée. Parfois, les gamins passaient chez le menuisier pour se faire confectionner des planches et, avec des fixations improvisées, ils glissaient. C'est ce qu'a fait Emile Allais.

Adolescent, il accompagne les premiers touristes qui débarquent dans l'hôtel de la baronne de Rotschild, portant leurs bagages contre une petite pièce. C'est l'occasion de belles rencontres avec des gens d'ailleurs et notamment avec des moniteurs employés par les riches clients. L'un d'eux, un Autrichien, va lui apprendre quelques trucs pour tourner avec ses skis. Emile est lancé.

Logiquement, il fait son service militaire dans les chasseurs alpins...en Auvergne. Le pied ! pour Emile qui rentre chez les skieurs-éclaireurs. Seulement, la jambe casse. Pas de quoi le faire dérailler, son chemin est tracé et en 1935, alors que la fédération de ski l'a repéré, il décroche sa première médaille dans une course internationale puis il enchaîne en 1936 avec les Jeux Olympiques de Garmisch-Partenkirchen où il terminera troisième de la descente derrière deux Allemands. Il refusera le salut hitlérien. Un symbole.

Cette expérience olympique lui permettra d'en prendre plein les yeux et d'apprendre des autres skieurs, encore des Autrichiens.
Ils ont certes une méthode imparable, une technique de virage en ski que l'on a baptisé la méthode autrichienne, mais un de leurs ressortissants, a testé encore mieux, il transforme la position des skis en parallélisme, c'est Toni Seelos. Emile Allais va beaucoup apprendre de lui et mettre en place la première méthode écrite en France, "Ski français", qui prône les virages skis en parallèle, à l'opposé de la technique autrichienne du chasse-neige.

Un an plus tard, Emile Allais est le héros des championnats du monde à Chamonix. Avec trois médailles d'or, il devient le tout premier champion du monde du ski alpin français, 30 ans avant la période dorée des Killy et Goitschel.

En 1937, avec Georges Blanchon, Charles Diebold, Paul Gignoux et Léo Lagrange, il porte sur les fonds baptismaux l’Ecole Française de Ski, grande sœur de l'Ecole du Ski Français. Emile Allais est le premier moniteur, père de tous les pulls rouges, une belle période dont il parlait souvent.
Exit les moniteurs autrichiens qui prenaient trop de place sur les pentes françaises, le ski tricolore prend ses droits dans ses premières stations.

La guerre passe et le champion olympique pointe d'abord au Bataillon de haute montagne de Chamonix avant de redonner des cours de ski pendant l'occupation et de participer activement à la libération. Cette parenthèse a sûrement compromis sa carrière de sportif de haut niveau. Qu'importe, Emile aura une vie dans le ski, pas sur les podiums mais sur les pentes.

Après 39-45, il prend donc le large, direction les Amériques où il participe à la création de nombreuses stations au Chili et en Californie.

Le skieur voyageur revient dans les Alpes du Nord dans les années 60, à Courchevel, où l'on est loin de l'organisation américaine. Allais pousse alors à l'utilisation de chenillette pour offrir des pistes dignes de ce nom. Cet attachement aux stations françaises l'orientera vers le conseil aux domaines skiables, il a eu l'idée du métier de pisteur secouriste.

Emile Allais ne conseille pas que les stations, les fabricants de ski lui font aussi confiance comme Rossignol. Il donnera son nom à quelques modèles, à des skis en métal totalement novateurs. Un homme très actif, jusqu'à la fin, jusqu'à ses 100 ans. Un homme d'affaires sur le tard et un athlète de légende.


France 3 Alpes se mobilise pour rendre hommage à Emile Allais avec une émission spéciale samedi 20 octobre vers 16H15.
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