Après l'annonce du pape Benoit XVI de démissionner le 28 février, les réactions se multiplient. Monseigneur Hippolyte Simon, archevêque du diocèse de Clermont-Ferrand et vice-président de la Conférence des évêques de France, a réagi à "un acte pris en conscience devant Dieu".
Monseigneur, vous avez salué la "grandeur de ce geste". En quoi la démission de Benoit XVI est-elle grande?Parce que c'est un acte de liberté et lui seul pouvait prendre cette décision. C'est nécessairement un acte qu'il a pris en conscience devant Dieu et c'est pour le bien de l'Eglise. Ce n'est pas pour lui qu'il fait cela mais pour le bien de l'Eglise. Quelqu'un qui fait passer le bien de l'Eglise avant des considérations personnelles, je crois que ça mérite d'être salué, respecté et admiré.
Cette décision va-t-elle rester comme une exception ou peut-elle devenir la norme au sein de la gouvernance de l'Eglise Catholique?
Je ne peux pas vous dire. Tout dépendra des successeurs mais cette décision rend les successeurs libres. La première fois, c'était sûrement difficile puisque je rappelle que la précédente remonte à 1415, donc ça faisait très longtemps qu'un pape n'avait pas démissionné. Pour la suite, je ne peux pas faire de pronostics, ça dépendra des situations et des personnalités.
D'après vous, d'autres personnalités, politiques par exemple, devraient-elles s'inspirer de cette décision?
Je ne saurai pas donner de conseils à d'autres. Vous savez, dans l'Eglise, c'est un peu particulier parce que le pape n'était pas soumis à réélection, donc c'est lui, seul, en conscience, devant Dieu, qui pouvait juger. Son prédécesseur, Jean-Paul II, avait pris une décision inverse, à partir de la même conviction. La conviction profonde, c'est qu'ils ne sont que des serviteurs et dans l'Eglise, ils ne tiennent pas leur mission d'eux-mêmes, ils l'ont reçu.
La question de l'âge du prochain pape sera-t-elle un enjeu lors du prochain conclave?
Je ne suis pas sûr. Regardez, Jean-Paul II avait 58 ans, son successeur 78 ans, entre les deux, tous les champs sont possibles. Ce qui est levé, c'est l'hypothèque de la maladie. Quelqu'un sera d'autant plus libre pour accepter une responsabilité et si un jour il n'est plus en position d'exercer, il pourra démissionner.
Etes-vous favorable à un pape extra-européen ou faut-il continuer dans cette tradition européenne alors que dans les pays émergents, la foi catholique est très prononcée?
Cette considération est seconde. Ce qui compte, c'est d'abord la personnalité. On n'a pas choisi Jean-Paul II parce qu'il était polonais mais parce que c'était Jean-Paul II. On a choisi le cardinal Ratzinger parce que c'était lui. Vous savez, le conclave, c'est cent seize personnes, des gens qui se connaissent et le coefficient personnel est plus important que la nationalité. Ceci étant, avec le fonctionnement des médias aujourd'hui, on aurait tendance à faire du pape le président de l'Eglise comme si il était investi d'une responsabilité administrative sur toutes les situations alors que ce n'est pas le cas. Il est successeur de Pierre, il nous garde dans la communion et, en même temps, il nous fait confiance.
Propos recueillis par Pierre-Olivier Belle