Affaire du schizophrène meurtrier: réactions des avocats après le renvoi d'un médecin et de l'hôpital psychiatrique de Saint-Egrève devant la justice

C'est une décision rare. Un hôpital psychiatrique et un médecin vont devoir répondre des actes d'un de leurs patients. Jean-Pierre Guillaud, un schizophrène, avait tué un étudiant de Grenoble, en 2008, alors qu'il avait échappé à leur surveillance. 

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L'hôpital psychiatrique de Saint-Egrève et le Dr Gujadhur vont être jugés pour homicide involontaire, devant un tribunal correctionnel. Ainsi en a décidé la cour d'appel de Grenoble, ce mercredi 19 novembre. A l'origine de cet appel, il y avait la famille de Luc Meunier victime d'un coup de couteau mortel, donné le 12 novembre 2008 par Jean-Pierre Guillaud. 

"C'est un soulagement", se réjouit Me Hervé Gerbi, avocat de la famille de l'étudiant. Celle-ci "a eu raison de s'accrocher et de croire en la justice", ajoute-t-il, rappelant que deux ordonnances de non-lieu avaient été rendues avant ce renvoi en correctionnelle. Pour autant, le défenseur des proches de Luc Meunier ne souhaite pas que l'audience attendue se transforme en procès du système hospitalier français.

Interview Me Gerbi

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Me Hervé Gerbi, avocat de la famille de l'étudiant ©INA

L'avocat du Dr Gujadhur, lui, s'étonne que son client soit le seul poursuivi. La responsabilité des deux autres mis en examen, un médecin superviseur et un autre qui remplaçait le Dr Gujadhur en son absence, a en effet été écartée par la cour d'appel. "On ne comprend pas pourquoi un seul médecin serait poursuivi et pas les deux autres", critique Me Jean-Yves Balestas qui assure que le diagnostic était partagé par l'ensemble de l'équipe médicale.

Interview de Me Balestas
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Me Jean-Yves Balestas, avocat du Dr Gujadhur, ©INA

Rappel du parcours judiciaire de l'affaire

Dès 2011, Jean-Pierre Guillaud, déjà auteur de plusieurs agressions à l'arme blanche, avait été déclaré pénalement irresponsable de son acte et hospitalisé en unité pour malades difficiles. Une information judiciaire avait cependant été ouverte pour déterminer les éventuelles responsabilités des médecins, à la suite d'une plainte contre X de la famille Meunier.

Le 9 avril 2013, le juge d'instruction avait rendu une ordonnance de non-lieu. La famille Meunier décidait malgré tout de faire appel et obtenait gain de cause, en novembre 2013, devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel. La mise en examen de l'hôpital et de trois médecins était alors prononcée.

La cour d'appel avait pointé "un défaut d'appréciation de la dangerosité" de M. Guillaud. Citant de "multiples alertes" comme "l'épisode délirant" de juillet 2008, durant lequel le malade disait entendre des voix lui commandant "de trancher la gorge d'un autre patient". La cour avait estimé que ses médecins auraient dû "mieux encadrer ses permissions de sortie".

Malgré ses fugues passées, des épisodes hallucinatoires et des pulsions morbides, l'agresseur avait été autorisé à sortir sans accompagnement dans le parc non surveillé et non clôturé de l'hôpital. C'est lors d'une de ces sorties, après avoir retiré de l'argent à la trésorerie de l'hôpital, que M. Guillaud avait franchi la porte de l'établissement, sans difficulté. Il s'était rendu en car à Grenoble, avait acheté un couteau dans une quincaillerie et tué Luc Meunier en sortant de la boutique.

Il est parfaitement légitime et sain qu'il y ait un débat public"


La justice reproche par ailleurs à l'hôpital de ne pas avoir réévalué "un dispositif de sécurité (...) manifestement défectueux". Depuis les faits, des clôtures ont été érigées autour des pavillons de l'hôpital. "Il est parfaitement légitime et sain qu'il y ait un débat public devant la juridiction" dans cette affaire, a réagi Me Denis Dreyfus, avocat de l'hôpital. "Cela permettra de poser clairement le problème des moyens des centres hospitaliers en France par rapport à ce type de patients", a-t-il ajouté.




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