Convaincu que la droite n'a pas dit son dernier mot, mercredi 8 juin, Christian Jacob est venu soutenir Julien Martinez, le candidat des Républicains dans l'Ain face à l'ex-LR Damien Abad. Le ministre dans la tourmente passe désormais pour un traître dans son ancienne famille. Dans la 5e circonscription de l'Ain, le député sortant brigue un troisième mandat.
"On a besoin de gens qui ont un ancrage, des convictions solides. Vous avez avec Julien (Martinez) quelqu'un qui a ces qualités (...) Il ne tient qu'à vous de l'aider", a lancé le patron de LR lors d'une réunion publique du candidat Julien Martinez dans le hall de l'usine Novap, à Bellignat près d'Oyonnax.
"Trahison" et duel fratricide
Ce soutien de Christian Jacob, qui enchaînait un marathon Rhône-Ain-Pas-de-Calais dans la journée ce mercredi 8 juin, était lourd de symboles. La 5e circonscription de l'Ain était, pourtant, jusqu'à il y a quelques semaines, une chasse gardée des Républicains.
Le 20 mai dernier, le président du groupe LR à l'Assemblée nationale, Damien Abad, est passé avec pertes et profits à la macronie, en devenant ministre des Solidarités dans le gouvernement Borne. Une trahison pour LR, qui a aussitôt investi Julien Martinez, un proche de Xavier Bertrand pour l'affronter le 12 juin prochain, lors du 1er tour des élections législatives.
"L'attitude de Damien Abad est au-delà de l'imaginable", a lancé Christian Jacob à des journalistes, à son arrivée. "Qu'un président de groupe parlementaire se serve de sa fonction pour aller se prostituer pour un poste gouvernemental est d'une perversité totale, et ne peut inspirer que dégoût et mépris", a-t-il ajouté.
Par contraste, il a vanté l' "authenticité" et la "fidélité" de Julien Martinez, conseiller municipal d'Oyonnax de 33 ans, qui joue lui aussi à fond la carte de l'ancrage local.
"C'est un territoire que je connais par coeur, j'y suis né, j'y ai grandi. Je ne suis pas déconnecté", affirme-t-il, alors que Damien Abad "a été parachuté ici depuis 2012".
"On est une terre de rugby ici, on ne triche pas" , lance celui qui vilipende la "trahison" de Damien Abad, qui selon lui "revient tout le temps" dans la bouche des électeurs.
- Petit Poucet -
Quant à l'"autre affaire", celle des accusations d'agressions sexuelles qui visent l'ancien LR, "c'est très gênant" et les gens lui en parlent "énormément", assure Julien Martinez qui "ne commente pas" et ne veut en faire "aucun argument politique".
Une position maintenue sur le plateau de France 3 Rhône-Alpes mercredi après-midi, lors du débat organisé entre 4 des candidats de la 5e circonscription de l'Ain, dont Damien Abad.
"On y va avec beaucoup d'humilité, on est parti trop tard parce qu'il nous a baladés tout du long (...) mais j'y vais avec l'énergie et la force de mes convictions", a ajouté celui qui sait qu'il fait figure de Petit Poucet, même s'il peut se targuer du soutien de Laurent Wauquiez, président LR de la région Auvergne Rhône-Alpes.
Dans le hall de l'usine, où elle attend le début de la réunion publique, Chantal, 50 ans, se montre dubitative: " La majorité des gens n'ont pas intégré que le candidat de LR est Julien Martinez, pas Damien Abad...".
Après les législatives ...
Pour Christian Jacob, qui s'apprête à passer la main à la tête de LR, il s'agissait aussi de rappeler que la droite compte rester dans le jeu après les législatives, malgré sa déroute (4,8%) à la présidentielle. Les sondages donnent autour de 30 à 60 sièges à la droite, certes beaucoup moins que la centaine de députés qui en font aujourd'hui le principal groupe d'opposition. Mais les instituts n'excluent pas que la macronie échoue à avoir seule une majorité absolue.
"On est dans une situation politique où on a une capacité de faire bouger les choses. Le vote utile, c'est nous", a assuré lors de la réunion Christian Jacob. "Il ne s'agit pas de faire une coalition, en revanche être une opposition utile, une force de proposition... et qu'on assume de voter des textes qui vont dans le bon sens, à condition qu'on puisse modifier les textes, qu'on soit entendus", a-t-il ajouté.
