Comme beaucoup de ses confrères, David Dall’Acqua, médecin urgentiste à l’hôpital de Vichy, dans l’Allier, a démissionné de ses fonctions administratives. Début février, il ne sera plus chef du service des urgences. Il nous explique pourquoi.
Cela faisait plus de quatre ans qu’il était chef de service des urgences de l’hôpital de Vichy, dans l’Allier. À 47 ans, David Dall’Acqua a décidé de présenter sa démission à la direction de l’hôpital. Dès le mois de février, il ne sera plus chef de service des urgences. Plusieurs raisons ont motivé sa décision.
"Les mesures du ministère de la Santé sont insuffisantes"
« Je suis signataire de l’appel démissionnaire du collectif inter-hôpitaux depuis le début du mouvement, explique David Dall’Acqua. Le service est en grève depuis six mois. Les mesures annoncées par le ministère de la Santé sont insuffisantes et ne correspondent pas à nos attentes ». Tout est une question de moyens. Le chef de service évoque un constat national : la fermeture des lits, des moyens matériels réduits, l’hospitalisation des patients sur des brancards et la suppression des postes.Conférence de presse le 14 janvier à 11h00 à Paris et en région ➡️ lettre de démission collective pic.twitter.com/0WG5zYC4t2
— COLLECTIF INTER-HOPITAUX (@CollectInterHop) January 9, 2020
Mais ce n’est pas l’unique raison qui motive le médecin urgentiste. « Depuis des mois, nous alertons sur notre impossibilité de travailler de plus en plus avec moins de moyens. Il y a moins de lits, on supprime des postes de paramédicaux. Depuis trois ans, il y a eu 60 suppressions de postes paramédicaux ».
"S'il y a un accident, il n'y aura plus de SMUR"
Le plus inquiétant pour le chef de service démissionnaire se passe aux urgences : « J’ai 10,5 équipes au total, alors qu’il en faudrait 21,6. Quand le SMUR est en mission, ils ne sont plus aux urgences. Depuis plusieurs mois, en plus, nous n’avons plus qu’une ligne de médecins au SMUR 24h/24. Malgré le recours à l’intérim, le temps supplémentaire des médecins urgentistes, et l’aide du GHT (Groupement hospitalier de territoire), on n’arrive pas à atteindre le nombre de médecins ».Mais les conséquences sont plus graves pour David Dall’Acqua. « La population est en danger, on n’arrive pas à assurer les soins. Par exemple, pour le transfert d’un patient au CHU de Clermont-Ferrand, il faut 3 heures. Pendant ce temps, il n’y a pas d’équipe de SMUR aux alentours. S’il y a un accident, il y aura les pompiers, mais il n’y aura plus de SMUR ».
"Je ne veux plus gérer une équipe en souffrance"
Aux urgences, l’activité ne désemplit pas. Chaque jour, en moyenne, 95 patients viennent aux urgences, indique le médecin. « Quand on est trois à faire le travail au lieu de cinq, à la fin de la journée ce n’est pas possible, on ne tiendra pas. Et avec les épidémies qui arrivent, ça va être terrible », alerte le médecin de 47 ans.Malgré tout, les équipes s’organisent. « Je suis obligé de faire appel à d’autres spécialistes de l’hôpital, des réanimateurs ou encore des neurologues. Dernièrement, on essaye de boucher les absences du planning. Le 25 décembre, je me suis retrouvé tout seul avec un médecin de SMUR. On a contacté les médecins des autres services pour les autres jours, seulement deux médecins se sont portés volontaires », raconte David Dall’Acqua avant de continuer « les médecins des urgences sont épuisés. Ils ne vont pas tenir. Certains m’ont dit qu’ils allaient partir. L’activité est devenue trop compliquée. Je ne veux plus gérer une équipe en souffrance ».
Le chef de service a donc posé sa démission plus tôt que prévu, démission qu’il a confirmé lundi 6 janvier au directeur de l’hôpital. Une autre collègue, médecin du SMUR, a décidé de faire la démarche. Selon le chef de service des urgences, personne ne serait prêt à vouloir reprendre son poste.