"On ne demande qu'à travailler" : une clinique en cessation de paiement, 80 salariés dans l'incertitude

La clinique privée de Châtellerault, appartenant au groupe Kapa, vient d'annoncer sa cessation de paiement. Dans un territoire peu doté de médecins, la nouvelle crispe, les personnels médicaux, les syndicats et les élus. Les autorités de santé assurent que tout sera mis en œuvre pour conserver l'offre de soin.

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À quelques jours de Noël, l'annonce passe mal pour les 80 salariés. La clinique privée de Châtellerault est en cessation de paiement. En cause, l'absence de soutien financier du groupe Kapa à son établissement. Celui-ci souhaiterait malgré tout que l'établissement puisse continuer d'assurer son service dans l'attente d'un repreneur. Mais à Châtellerault, la peur se fait tout de même ressentir dans un contexte déjà difficile pour l'offre de soin. "Le Pays Châtelleraudais ne peut pas se payer le luxe de se priver de praticiens", considère le Dr. Josselin Kamga, président de la commission médicale de la clinique privée de Châtellerault. Élus, personnels, syndicats espèrent tous qu'une solution puisse être trouvée

Un "désengagement" progressif

Au mois de juillet dernier, la Haute Autorité de Santé est venue inspecter l'établissement médical. Celle-ci n'a pas renouvelé sa certification, qu'elle accorde pour une durée de quatre ans. "C'est une procédure administrative qui évalue l'établissement sur un certain nombre de critères. Il y a la prise en charge des patients, les protocoles et les procédures administratives, énumère le Dr. Josselin Kamga. Nous avons validé à plus de 90 % sur les volets prise en charge de patients et organisation des praticiens. Dans notre cas, il s'agissait surtout de protocoles administratifs qu'il fallait parfaire."

On espère pouvoir continuer à exercer notre métier et à offrir aux habitants nos spécialités qui sont complémentaires de celles du CHU. On ne demande qu'à travailler.

Docteur Josselin Kamga,

Président de la commission médicale de la clinique privée de Châtellerault

Selon le médecin, ce non-renouvellement n'a aucun lien avec l'annonce de cessation de paiement. Mais depuis, l'Agence Régionale de Santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine accompagnait la clinique, notamment financièrement. Mais cela n'a pas suffi. La direction du groupe signale, depuis 2023, des difficultés financières et n'a pas pu résoudre la situation. "L’absence d’engagement du groupe Kapa de soutenir la clinique sur la durée avec la confirmation récente de son désengagement pur et simple, n’a pas permis d’apporter une nouvelle aide en trésorerie", écrit l'ARS dans un communiqué. Ayant géré jusqu’à 30 établissements de santé en France, le groupe n’en possède aujourd’hui plus que deux.

Malgré son annonce de cessation de paiement auprès du Tribunal de commerce de Poitiers, le groupe Kapa souhaite être placé en redressement judiciaire, le temps de trouver un repreneur. Il espère que l'activité puisse continuer en attendant. "Il y a tout intérêt, car les agendas sont pleins pour l'ensemble des chirurgiens au moins jusqu'à fin mars", pointe le Dr. Josselin Kamga. Avant de poursuivre : "On espère pouvoir continuer à exercer notre métier et à offrir aux habitants nos spécialités qui sont complémentaires de celles du CHU. On ne demande qu'à travailler."

"Une mauvaise nouvelle pour notre territoire"

Car l'inquiétude se concentre à présent sur l'offre de soin à Châtellerault et ses environs. La clinique Kapa possède 100 lits, une perte qui serait dommageable pour le Pays Châtelleraudais. "Cela va reporter cette offre sur l'hôpital public qui a déjà des problèmes pour fonctionner. L'antenne du CHU n'a pas assez de moyens et a fermé ses urgences la nuit", soulève Sophie Ardon, secrétaire régionale de FO Santé.

Il faut retrouver des repreneurs, mais à quel prix ? Il ne faut pas qu'il y ait des diminutions de lits ni de personnel.

Sophie Ardon, secrétaire régionale FO Santé

Des difficultés dont a bien conscience Jean-Pierre Abelin, le maire de Châtellerault. "C’est une mauvaise nouvelle pour notre territoire. Mais je veux rester optimiste pour l’avenir. Cette clinique est une belle structure, reconnue pour son savoir-faire et animée par des professionnels compétents et engagés. Elle peut attirer un repreneur prêt à investir pour préserver cette richesse au service de notre territoire", espère-t-il dans un communiqué. Tout comme l'ARS, il assure que "tout sera mis en œuvre pour protéger et pérenniser l’offre de soins à Châtellerault".

Le 3 janvier prochain, les responsables syndicaux de FO Santé doivent rencontrer le directeur de l'ARS de la Vienne afin de "faire le point sur les établissements de santé du département, qu'ils soient publics ou privés". Sophie Ardon prévient : "Il faut retrouver des repreneurs, mais à quel prix ? Il ne faut pas qu'il y ait des diminutions de lits ni de personnel." Le syndicat demande d'ores-et-déjà qu'en cas de fermeture, le personnel puisse être intégré à l'offre de soin publique, "où il y a des problématiques de recrutement".

L'ARS s'engage de son côté "à trouver toutes les solutions adaptées pour garantir à la fois une solution à tous les professionnels de la clinique et à la fois une prise en charge de qualité pour toute la patientèle de la clinique". Au niveau de l'établissement, le président de la commission médicale de la clinique, Josselin Kamga relève une certaine solidarité au sein du personnel. "On ne se laisse pas abattre", affirme-t-il.

Le tribunal de commerce de Poitiers doit statuer sur la situation de la clinique Kapa, le 10 janvier 2025. D'ici là, l'inquiétude se fait fortement ressentir à Châtellerault.

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