Les avis sont multiples et partagés. A chacun d'en faire son miel. Certains y voient une amélioration du climat déclenchant une profusion de fleurs à butiner quand d'autres préfèrent simplement saluer une météo plus clémente. Tous s'accordent à dire que la récolte à venir est prometteuse.
Philippe Lunel est apiculteur professionnel à Saint-Sernin dans le sud Ardèche. Et comme pour beaucoup de ses collègues apiculteurs, la récolte démarre sous les meilleurs auspices. Contrairement à l'année dernière où la saison avait très mal démarré, cette année s'avère pour le moment exceptionnelle. Et cela n'a rien à voir avec le Coronavirus.
"Le confinement n'y est pour rien du tout là-dedans. C'est uniquement une question de météo. L'hiver a été doux, les ruches ont démarré plus tôt et les pluies sont tombées aux bons moments pour régénérer la campagne, c'est uniquement çà. D'ailleurs et c'est un signe, l'acacia est une fleur très fragile, elle est souvent détruite par le vent où les pluies, cette année on a pu en faire" raconte Philippe Lunel.
Toujours selon Philippe Lunel, la pollution atmosphérique en baisse avec le nombre de véhicules en moins sur les routes ne serait pas un facteur déterminant dans la bonne santé des abeilles. L'apiculteur rappelle que ce sont les multiples pesticides répandus dans la nature qui détruisent les essaims.
"Dans les cultures, les épandages ont continué à se dérouler avec la même fréquence, les agriculteurs ont continué à travailler normalement pendant le confinement" précise Philippe Lunel. Quant au non fauchage des routes qui augmenterait le nombre de fleurs à butiner, "c'est insignifiant" réplique l'apiculteur.
Ce n'est pas tout à fait l'avis de Pascal Binon, apiculteur professionnel et président d'honneur du Groupement de Défense Sanitaire des Abeilles (GDSA) de l'Ardèche. Il pense que le confinement lié au Coronavirus a été profitable aux abeilles sans toutefois pouvoir y apporter des preuves.
"C'est tout à fait plausible que cette diminution de la pollution ait modifié le climat, notamment en terme de différence de températures entre la nuit et le jour, on a tous pu le constater, la lumière du jour était plus limpide... Ce qui aurait profité aux végétaux. Les pousses auraient été plus fortes, la sève aurait été plus dense et les floraisons n'en auraient été que meilleures. Les abeilles en auraient profité davantage en ramenant plus de pollens à la ruche pour alimenter les larves. Ce qui explique qu'actuellement les colonies sont très populeuses" explique Pascal Binon.
Si la météo de fin de printemps et d'été continue à bien se comporter, les miellées pourraient être importantes cette année. Les récoltes ne font que commencer.
D'autres avis divergent encore sur la question. Le GDSA07 qui gère aussi un rucher-école au domaine du Pradel voit passer chaque année plus d'une centaine d'élèves. Et les avis sont souvent nombreux pour comprendre la nature et s'adapter au métier. Certains y voient aussi cette capacité qu'a la nature à une forme de résilience suite à 3 ou 4 années consécutives de sécheresse.
C'est le cas pour le châtaignier en Ardèche. Les arbres ont beaucoup souffert de ce manque d'eau. Comme sa floraison n'a pas encore commencé, il est encore trop tôt pour se prononcer sur sa future production de miel. La saison est encore longue et les apiculteurs prudents de nature, refusent de réjouir trop tôt. Les dictons comme celui-ci issus d'anciens apiculteurs ont la vie dure et se transmettent toujours encore entre générations : "Il ne faut pas vendre le miel avant qu'il ne soit en pot ".