Un ancien enfant placé, aujourd'hui âgé de 21 ans, longtemps fasciné par le Troisième Reich, a été condamné ce vendredi 17 novembre à neuf ans de prison par le tribunal correctionnel de Paris. En 2022, le jeune Ardéchois avait menacé sur les réseaux sociaux de commettre une tuerie de masse à caractère raciste.
Poursuivi pour "entreprise individuelle terroriste", Angel B. vient d'écoper d'une condamnation plus sévère que la peine requise à l'audience qui s'est déroulée la semaine dernière devant le tribunal correctionnel de Paris.
Le parquet avait requis une peine de sept ans de prison. Cette condamnation à neuf années de prison est assortie d'une période de sûreté des deux tiers, et d'un suivi socio-judiciaire de neuf ans à l'issue de la peine, avec obligation de soin. "Nous allons faire appel, évidemment", a déclaré à l'AFP l'un des avocats du prévenu, Me Antoine Ory.
Le tribunal a invoqué dans sa décision la "radicalité" et la "dangerosité" du prévenu. Il a estimé "qu'un projet d'action violente était susceptible d'être mis à exécution de façon imminente" au moment de son arrestation.
Messages menaçants
Abandonné par ses parents et balloté entre plusieurs familles d'accueil et foyers de l'Aide sociale à l'enfance, Angel B. a été interpellé et placé en détention provisoire en juin 2022 en Ardèche.
Le jeune homme a été arrêté dans une commune située entre la Drôme et l’Ardèche, où il résidait. Surveillé par les enquêteurs de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), ses messages avaient été repérés sur les réseaux sociaux et sur des messageries cryptées. Sous le pseudonyme HeinrichHimmler88, il y qualifiait les juifs de "race impure qui doit être exterminée", et s'en prenait aux "nègres" et aux "bougnoules". Dans des conversations interceptées par les enquêteurs, il avait également évoqué la préparation d'un "nettoyage ethnique" ou d'un "attentat dans la rue".
L'enquête avait aussi permis d'établir qu'il avait entamé des démarches pour acheter une arme de manière illicite. Ses avocats ont plaidé que leur client avait abandonné lui-même ces démarches. Le tribunal ne les a pas suivis sur ce point.
Un passage à l'acte était-il possible ? Imminent ? Le jeune homme a affirmé devant le tribunal qu'il ne serait "jamais passé à l'acte". "Je n'avais aucun projet sérieux, je suis lucide et rationnel", a déclaré le jeune homme, d'une voix claire et posée.
Abandon et désir de vengeance ?
Selon les enquêteurs, le suspect avait développé un intérêt pour le nazisme, dès l'âge de huit ou dix ans, pour se "venger" de son père qui l'avait abandonné. À la barre, le jeune homme a expliqué ses propos violents sur Telegram par "l'effet de groupe". "Je voulais me rendre intéressant. Ça dépassait ma pensée, je ne le pensais pas réellement", a assuré l'Ardéchois.
"Sur le long terme, j'aimerais faire de la politique", mais "avec des propos plus mesurés, qui restent dans le cadre de la loi", a-t-il ajouté. Le jeune homme dit avoir "réfléchi" en prison. Se définissant comme un "patriote souverainiste", il confie avoir voté l'an dernier pour la candidate du RN Marine Le Pen, mais dit ne se reconnaitre dans aucun parti.
Convictions
"Il n'a jamais renié ses convictions", a cependant estimé la représentante du parquet, qui avait requis sept ans de prison. "Convaincu par l'idéologie de la mouvance d'ultradroite, il a tenté de se procurer une arme tout en exprimant ses désirs de passage à l'acte violent", a-t-elle martelé, soulignant qu'Angel B., dans sa cellule de prison, était allé jusqu'à se graver un sigle SS sur le torse avec un objet métallique.
Pour Me David Bocobza, l'un de ses défenseurs, le jeune homme est certes "inquiétant, mais parfaitement inoffensif". "Rejeté par tout le monde", Angel B. a voulu être "visible" en tant que nazi, car "c'est ce qui fait le plus peur à la société", mais à aucun moment, il n'a voulu "mener à bien" un projet criminel, selon l'avocat.