Bernadette Dimet est jugée depuis hier devant les assises de Grenoble pour l’assassinat de son mari violent en 2012. A l'issue des réquisitions ce vendredi 5 février 2016, l'accusée s'est écroulée en sanglots silencieux, disparaissant derrière le box des accusés.
L’affaire remonte à janvier 2012. Les gendarmes retrouvaient le corps de Bernard Bert dans un pré de Parmilieu, dans le Nord Isère. En garde à vue, sa femme, Bernadette, avait avoué avoir tiré, avec un fusil de chasse, deux coups de feu sur son époux. Une balle l'avait touché mortellement.
"Je suis partie dans l'intention de me suicider. Il m'a poursuivie, s'est approché de moi et m'a fait peur. Le coup est parti", a-t-elle affirmé durant le procès.
L'avocate générale, Thérèse Brunisso a contesté cette version dans son réquisitoire, soulignant que l'accusée n'avait pas besoin de se munir de quatre cartouches si elle voulait se suicider et qu'elle avait dû appuyer à deux reprises sur la gâchette avec "une force importante".
"Elle ne tire pas pour lui faire peur. Sinon, elle aurait tiré en l'air ou dans les jambes", a-t-elle accusé. En outre, "il est très improbable que Bernard Bert ait suivi son épouse, avec qui il était en conflit, dans une clairière où il lui était impossible de se protéger, alors qu'il la savait armée d'un fusil chargé", a estimé l'avocate générale.
La magistrate n'a pas nié les "violences physiques et psychologiques", le "harcèlement", les "menaces" dont l'accusée dit avoir été victime pendant quarante années de vie conjugale. Mais ces violences ne donnent "pas de permis de tuer", a-t-elle lancé.
"Ne pas renvoyer Bernadette Dimet en prison serait dénier à Bernard Bert sa qualité d'humain." Thérèse Brunisso a demandé une condamnation à 8 ans de prison.
Après le réquisitoire, l'accusée s'est effondrée. Elle ne voulait plus sortir du box. Elle est ensuite revenue à l'audience soutenue physiquement par ses sœurs, ne parvenant plus à marcher seule.
Vous n'êtes pas Dieu!"
Pour défendre sa cliente, Me Frédéric Doyez a, lui, évoqué un moment la légitime défense pour faire écho, sans doute, à l'affaire Jacqueline Sauvage. Pour lui, il y a sans doute "une forme de légitime défense différé quand on vit un calvaire depuis presque 40 ans", même si l'avocat a ensuite reconnu que cette notion n'avait pas lieu d'être dans ce procès.
Me Doyez a lancé à l'avocate générale: "vous n'êtes pas Dieu!". "Vous ne pouvez pas être sûre de ce que Bernardette Dimet pensait au moment où elle a tiré."
Me Frédéric Doyez a lu un passage où elle racontait comment son mari traitait ses chiens de chasse, qu'ils tuaient les préférés de Bernadette. Le défenseur estime qu'elle s'identifiaient à ses chiens. "Quand il n'avait plus besoin de moi (sexuellement) il aurait voulu que je reste dans le congélateur", "il me reprochait même de manger".
Elle voulait "en finir avec elle-même"
Le défenseur est revenu en détail sur ce jour où l'accusée a dit à son mari: "je monte au château d'Eau" de Subtilieu. "Un endroit qu'elle chérit et où elle a des souvenirs de famille (...) son frère y est mort dans un accident de mobylette." Elle voulait "en finir avec elle-même". L'avocat pense que la première balle n'était pas destinée à Bernard Bert. Bernardette se la destinait."Elle va et doit être condamnée", a expliqué l'avocat, mais "une peine n'est pas forcément une privation de liberté. Cette femme doit demeurer libre aujourd'hui."
Bernadette Dimet, 60 ans, cheveux courts et petites lunettes rectangulaires, a effectué 10 mois de détention provisoire de janvier à novembre 2012 mais encourt la réclusion criminelle à perpétuité pour assassinat.
En matinée, l'audience avait permis d'entendre une expert, le professeur Liliane Daligand, elle préside l'association VIFF-SOS Femmes qui accueille et héberge des femmes et enfants victimes de violences à Villeurbanne.
Extrait 12/13 France 3 Alpes