Il y a quelques mois, la vie de Jean-Pierre Vidal, un habitant d'Espinat, près d'Aurillac dans le Cantal, a vacillé. Alors qu'il croyait être né sous X, il a découvert, à 62 ans, que l'administration avait fait une erreur, le privant du droit d'obtenir l'identité de sa mère biologique.
L'histoire de Jean-Pierre Vidal, un habitant d'Espinat dans le Cantal, c'est celle d'un drame qui dévaste, une erreur administrative qui hypothèque toute une vie. L’histoire d’un petit garçon à qui l’on a toujours affirmé qu’il était né sous X, abandonné par sa mère dès la naissance.
Pourtant la réalité est toute autre, et ce n’est que 62 ans après que Jean-Pierre l’a apprise lors d’une énième démarche entreprise en avril dernier. Mais cette fois-là, c'est la bonne : une éducatrice découvre enfin les malfaçons et saisit la commission parisienne.
« La commission nous a alors fait savoir que mon dossier n’avait jamais été tenu par le secret de ma mère biologique et qu’on aurait pu me remettre tous les documents à ma majorité ! C’est comme ça que j’ai découvert que je n’étais pas né sous X mais d’une mère biologique qui m’a reconnu et qui malheureusement m’a abandonné au bout de deux ans en raison de difficultés financières, déplore Jean-Pierre. Le problème c’est que la DDASS du Cantal avait fait un document qui prétendait que j’étais né sous X et que j’avais été abandonné alors que j’avais moins d’un an ».
De foyers
en familles d'accueil
Un document comportant de fausses informations qui a eu des conséquences dramatiques sur la vie de Jean-Pierre, le ballottant de familles d'accueil en foyers, pour finalement le laisser s'évaporer dans la nature à 16 ans, adolescent brisé et sans racines qui va même connaître la rue.
« J’ai pourtant aussi découvert que ma mère avait même autorisé à ce que je sois adopté ! Quand j’étais enfant, il y avait justement une famille qui voulait m’adopter mais à cause de cette erreur, cela n’a pas été possible. Vous imaginez la vie que j’aurais eue ? On m’aurait ensuite dit d’où je venais et j’aurais été un enfant heureux », regrette Jean-Pierre .
Mais pour lui, le plus insupportable aujourd’hui est de réaliser que l’erreur de l’administration l’a privé de la possibilité de retrouver la trace de sa mère.
« Comme je ne suis pas né sous X, j’aurais dû automatiquement, à ma majorité, avoir le droit d'accéder à tous les documents que ma mère avait laissés. Ce qui m’aurait permis de connaître ma mère et le reste de ma famille ».
Aujourd’hui, Jean-Pierre ne comprend pas pourquoi cette erreur n’a jamais été corrigée : « Quand vous êtes né sous X, quand on vous place dans une famille d’accueil, quand on vous met dans une école ou dans un centre, il y a toujours des rapports qui sont faits pour être mis dans votre dossier. Ce dossier est toujours dans les mains des assistantes sociales ! Elles auraient pu voir très facilement qu’il y avait une erreur ! «
"Aujourd’hui, c’est devant une tombe
que je lui parle"
Marié et père de famille, Jean-Pierre apprend aujourd'hui à parler de sa mère, et de sa sœur dont il a retrouvé la trace. « En 1985, j’avais déjà relancé les choses, et à l’époque on m’avait redit que j’étais né sous X. Si à ce moment là, on m’avait permis d’accéder à mon dossier, j’aurai pu retrouver ma maman, avoir un dialogue avec elle et en profiter. Aujourd’hui, c’est devant une tombe que je lui parle, puisqu’elle est décédée en 1996 ».
Dans sa plus grande froideur, l'administration n'a pas daigné s'excuser.
« Je n’ai pas eu un mot d’excuse, je n’ai eu aucun soutien de leur part. On m’a fait même fait payer les photocopies que j’ai faites du dossier ! C’est pas la somme qui me pose problème, c’est la façon de faire de ces gens qui ont gâché ma vie… »