Avez-vous déjà goûté au porc capelin ? Ce cochon est élevé selon un cahier des charges très précis, dans le Cantal, sur les plateaux de la Margeride, en bordure de Haute-Loire et de Lozère. On vous en dit plus cette race d’exception qui fait la fierté de ses éleveurs.
Dans sa ferme de Maurs, au cœur de la Châtaigneraie cantalienne, Anaïs Sournac est une agricultrice heureuse. Installée au sein du GAEC des Chardonnerets avec son mari, elle élève 100 vaches allaitantes aubrac, produit du jus de pomme mais surtout, elle élève 200 porcs. Mais pas n’importe quels porcs, des capelins. “J’aime bien l’élevage de porcs. J’apprécie l’élevage sur paille” confie-t-elle. En effet, ces porcs sont élevés selon un cahier des charges très précis : “Il faut faire partie du Cantal, ou des monts de la Margeride, ou de la Lozère, ou de la Haute-Loire. Les porcs sont élevés sur litière, de paille ou de copeaux. Dans leurs céréales, il faut qu’il y ait de la châtaigne, pour faire de l’engraissement. Les cochons ont le double de surface par animal par rapport à un élevage classique. Ils ont 1,2 m². Apparemment, on retrouverait un peu le goût de châtaigne dans la viande. Cela conforterait la qualité de la viande”.
Un mode d'élevage plus contraignant
L’élevage de ces porcs capelins nécessite un peu plus de travail que pour des cochons classiques. Anaïs Sournac explique : “A la fin de l’élevage, on doit respecter des critères de poids précis, pour que les porcs rentrent dans la grille capelin. Il faut être plus vigilant. Il faut aussi un bâtiment plus grand que d’habitude pour élever nos animaux”. L’éleveuse indique le circuit de vente de ces porcs capelins : “On vend les animaux vivants. On ne peut pas les vendre transformés. En moyenne, on vend les porcs 20 centimes de plus au kilo qu’un animal classique”. Cela représente environ 20 euros de plus par cochon. L’agricultrice s’enorgueillit d’élever ces porcs capelins : “On est dans la Châtaigneraie cantalienne. L’image du porc capelin nous plaît. On est fier d’élever ces animaux. Ce sont des cochons heureux. Sur paille, ils peuvent exprimer leur comportement naturel”.
"C’est une démarque qualité"
François Sournac, son beau-père, aujourd’hui à la retraite, a été l’un des pionniers à développer ce porc si spécial : “J’étais administrateur à la coopérative dans les années 90 et on a travaillé sur une démarche qualité. Dans un vieux guide des années 1870, on avait vu que les porcs de Maurs étaient réputés pour leur jambon, grâce à leur alimentation à base de châtaigne. Dans les années 90, la filière de la châtaigne s’est aussi développée. On a alors travaillé à un projet commun. C’est comme cela que la marque capelin est née. C’est une démarque qualité. Plutôt que de rester dans les standards, les agriculteurs font ce choix”.
12 000 porcs produits par an
Désormais, une quinzaine d’agriculteurs élèvent ces porcs capelins. Ils sont situés dans le Cantal, la Haute-Loire et la Lozère. Environ 12 000 porcs capelins sont élevés chaque année. Benoît Julhes, président de la CAPP (Coopérative agricole des producteurs de porcs) du Cantal, explique comment les cochons sont nourris : “C’est la Châtaigneraie cantalienne qui fournit des châtaignes déclassées, mais cela ne suffit pas. On en achète aussi en Corrèze”. A la question, “La châtaigne donne-t-elle un goût à la viande?”, l’éleveur est un peu embarrassé : “Je ne cache pas qu’il y a un peu de marketing. Mais historiquement, les cochons de montagne étaient alimentés avec du petit lait. Dans la Châtaigneraie cantalienne, les animaux consommaient des châtaignes dans les bois. On a voulu renouer avec cela. On a adapté cette tradition ancestrale, en y apportant de la modernité”.
Un élevage complémentaire
Les élevages de porcs capelins sont aussi “à taille humaine” et souvent en complément d’une autre production. Le bien-être animal est une préoccupation des éleveurs. Benoît Julhes insiste : “Les éleveurs font ce choix car il y a une meilleure valorisation des animaux, mais en contrepartie le coût de production est plus élevé. Les éleveurs veulent produire quelque chose de différent, avec une production adaptée à leur exploitation. La majorité de ces éleveurs ne sont pas spécialisés dans le cochon et ont d’autres animaux à côté”. La génétique choisie (50 % Large white) permet la production de porcs charcutiers plus lourds. Les porcs sont abattus à 180 jours en moyenne respectant ainsi un poids de carcasse d’environ 95 kg.
Des clients renommés
Le président de la CAPP du Cantal rappelle : “La coopérative collecte les cochons. Elle est propriétaire d’un abattoir à Aurillac et d’un atelier de transformation. Il n’y a pas plus de 30 min de route entre l’élevage et l’abattoir. On découpe les carcasses et on essaie de les commercialiser entières auprès de bouchers traditionnels, notamment à Bordeaux, à Paris. On fait aussi de la découpe. On travaille en direct avec des restaurateurs”. La clientèle est constituée majoritairement de bouchers répartis sur toute la France, livrés en direct ou via des grossistes revendeurs. Il s’agit d’une clientèle exigeante comme des bouchers Meilleurs ouvriers de France, ou des restaurants étoilés parmi lesquels quelques tables renommées (Restaurant Serge Vieira à Chaudes-Aigues, Jean-François Piège, Cuisines de l’Elysée).