Oublier les sifflets et les larmes: Renaud Lavillenie espère définitivement effacer mardi l'amer souvenir des JO-2016 par un titre mondial au saut à la perche, le seul qui manque à son prestigieux palmarès.
L'échec cuisant en finale du concours de Rio et sa 2e place derrière le héros local Thiago Braz sous les quolibets du public carioca sont tellement restés en travers de la gorge du Français qu'il refuse désormais d'évoquer cet épisode funeste. Le recordman du monde (6,16 m) a été profondément meurtri par cet évènement et ses sanglots sur le podium resteront comme l'une des images marquantes des Jeux. Quoi de mieux qu'un sacre sur les lieux de son premier grand exploit aux JO-2012 pour remettre les points sur les i et refermer cette cicatrice?
Reste à savoir quel Lavillenie se présentera au départ de la finale. L'incontestable N.1 de sa spécialité ou le champion vacillant des derniers mois?
Depuis l'entame de 2017, le Clermontois de 30 ans peine à retrouver son meilleur niveau. Touché à la cuisse, il a mis prématurément un terme à sa saison hivernale, mais en plein air, il n'est pas allé plus haut que 5,87 m (le 6 juillet à Lausanne) et s'est souvent plaint des conditions météorologiques, débarquant à Londres sans référence sur laquelle s'appuyer.
Le Français se sait "attendu au tournant", comme d'habitude. Mais ne plus avoir cette étiquette encombrante de favori N.1, une nouveauté pour lui, comporte aussi ses avantages et il compte bien en profiter.
Me libérer
"Je me retrouve dans une position qui était celle de mes concurrents par le passé. Est-ce que ça va me porter chance? Je ne sais pas. Mais je suis plus concentré sur le fait de sauter, prendre du plaisir et donner le maximum. En tout cas, je n'ai pas d'excès de confiance même si je sais ce que je vaux. Me libérer sera la clé de la réussite", estime-t-il.
La récente naissance de son premier enfant a quelque peu bouleversé son agenda et il avoue avoir connu "des hauts et des bas" à l'entraînement. Les dernières séances ont toutefois laissé entrevoir "une légère montée en puissance".
Il pourra surtout miser sur sa science des grands championnats, qui sera un atout non négligeable pour contrecarrer une armée d'adversaires aux dents longues: si Braz est forfait, Lavillenie devra contrecarrer les ambitions du N.1 au bilan 2017, l'Américain Sam Kendricks (6 m), des Polonais (Wojciechowski, Lisek), du champion du monde 2015 Shawn Barber ou du prodige suédois de 17 ans Armand Duplantis, qui a sauté 5,90 m cette année.
Les qualifications de samedi ont d'ailleurs prouvé que l'expérience des rendez-vous mondiaux pourrait in fine faire la différence: alors que Lavillenie a passé sans trembler 5,70 m au premier essai, Kendricks a dû s'y reprendre à trois fois pour franchir 5,60 m. Un bon présage?
"C'est bon pour la confiance, car ma saison n'a pas toujours été très, très facile et j'ai rarement fait de concours en passant tout au premier essai. A moi de savoir tirer les bons enseignements de ce que j'ai fait. Mardi, il faudra tout lâcher, mais je ne suis pas inquiet pour ça", a-t-il déclaré à l'issue des qualifications.