Dans son point de situation du lundi 20 avril, l’Agence régionale de santé (ARS) Auvergne Rhône-Alpes en appelle à la vigilance des consommateurs de compléments alimentaires contenant des dérivés d’acide salicylique et des anti-inflammatoires végétaux, en pleine épidémie de Covid-19.
Curcuma, reine des prés, bouleau, saule, peuplier… La liste des plantes et compléments alimentaires à bannir de son alimentation pendant l’épidémie de Covid-19 est encore longue.
Dans son communiqué de presse quotidien, l’Agence régionale de santé, relayant une recommandation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), a invité, lundi 20 avril, les consommateurs de compléments alimentaires et de "plantes contenant des dérivés d’acide salicylique (analogues à l’aspirine)" ou "contenant d’autres anti-inflammatoires végétaux" à suspendre leur prise "dans un but préventif".
Pour les patients ayant des "pathologies inflammatoires chroniques", elle recommande de "discuter impérativement avec leur médecin de la pertinence de poursuivre ou non leur consommation".
Pour mieux comprendre, nous avons posé trois questions à Aymeric Dopter, adjoint au chef d'unité d'évaluation des risques liés à la nutrition à l'Anses (Agence régionale de santé, relayant une recommandation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail).
Pourquoi faut-il les éviter pendant cette épidémie de Covid-19?
AD: Il ne s’agit pas d’éviter à tout prix de consommer des compléments alimentaires contenant des plantes ayant des propriétés anti-inflammatoires ou immunomodulatrices pendant l’épidémie que nous vivons. Lorsqu’ils sont consommés en accord avec un médecin, par exemple dans le cadre de la prise en charge d’une maladie inflammatoire chronique, il ne faut surtout pas arrêter de les consommer de son propre chef, car cet arrêt pourrait rompre l’équilibre instauré dans le cadre du suivi médical. En revanche, si l’on consomme ces compléments alimentaires en dehors de tout suivi médical, il faut être conscient que ces produits contiennent des actifs qui vont potentiellement brider la réponse inflammatoire. Or, on sait que la mise en place d’une réponse immunitaire adaptée commence par un processus inflammatoire. Tant qu’il n’y a pas d’infection, la consommation de ces plantes ne pose pas de problème mais dès que les premiers symptômes d’une infection apparaissent (maux de gorge, fièvre, toux…), alors il est préférable de ne pas gêner la mise en place de la réponse immunitaire. Mieux vaut donc s’abstenir de consommer des compléments alimentaires contenant ces plantes.Comment agissent-ils sur le corps et interfèrent-ils avec le Covid-19, en cas de contamination?
AD: Les mécanismes par lesquels le virus SARS-Cov-2 provoquent la maladie COVID-19 ne sont pas encore bien connus. Mais, comme pour toutes les infections, l’entrée du virus dans l’organisme provoque une réaction non spécifique qui déclenche immédiatement un processus inflammatoire. Celui-ci par une cascade complexe d’activation et de sécrétion de nombreux médiateurs chimiques va aboutir à la mise en ordre de bataille des cellules chargées de repérer et de neutraliser le virus. C’est donc, dès le départ, que l’inflammation va jouer un rôle crucial pour organiser la défense de l’organisme. Or, les plantes que nous avons identifiées ont la capacité d’interférer à différents niveaux de ces premières étapes de la réponse immunitaire, soit en inhibant certaines enzymes, soit en bloquant la production de certaines cytokines pro-inflammatoires.Les symptômes d'un patient atteint par le Covid-19 peuvent-ils s'aggraver en cas de consommation ?
AD: Les données publiées à ce jour ne rapportent pas de cas de patients infectés par le SARS-CoV-2 qui auraient vu leur état se dégrader à la suite de la consommation de compléments alimentaires contenant ces plantes. En revanche, il existe des données de pharmacovigilance montrant que des patients présentant des infections, notamment respiratoires, ont vu leur état se dégrader après avoir consommé des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Par extrapolation, sachant que les plantes concernées par l'avis de l'Anses contiennent des substances se comportant comme des AINS, il n’est pas exclu que la consommation de compléments alimentaires contenant ces plantes puissent elles aussi entraîner des complications infectieuses. Toutefois, il ne s’agit pas de bannir totalement les anti-inflammatoires de l’arsenal thérapeutique: si l’inflammation est une alliée dans les premiers stades d’une infection, elle peut devenir une ennemie lorsqu’elle s’emballe à des stades plus avancés de la maladie, en provoquant par exemple le développement d’une fibrose. Il revient alors au médecin de faire usage des anti-inflammatoires au bon moment. C’est pour cette raison qu’il est très important de déclarer à son médecin tout médicament ou tout complément alimentaire consommé afin que celui-ci ait toutes les cartes en main pour vous soigner au mieux.Compléments alimentaires et plantes à éviter pendant l'épidémie de Covid-19
- Plantes contenant des dérivés de l’acide salicylique (analogues de l’aspirine) :
- Reine des prés
- Bouleau
- Peuplier
- Verge d’or
- Polygalas
- Plantes contenant d’autres anti-inflammatoires végétaux
- Echinacées
- Curcuma
- Griffe du chat (aussi appelée liane du Pérou)
- Plantes des genres Boswellia et Commiphora (appelées respectivement « encens » et « myrrhe »)