En mai 2020, au début de la crise Covid, entre les deux tours des élections municipales, Serge Grouard, alors candidat à la mairie d’Orléans, distribue 80 000 masques. A grand renfort de communication. Deux mois plus tard, le parquet ouvre une enquête pour « suspicion de financement illégal de campagne. » Aujourd’hui, ce même parquet classe l’affaire sans suite.
Revenons au printemps 2020. La pandémie de Covid-19 sévit en France et s'invite dans la campagne pour les municipales. En mai 2020 donc, Serge Grouard, alors candidat à la mairie d’Orléans, distribue 80 000 masques. Période où les masques sont rares et réservés aux professionnels de santé en priorité. La campagne de communication est bien orchestrée par l’entourage de M.Grouard. Le candidat se mettant en scène en train de distribuer les masques chirurgicaux auprès de l’Ordre des médecins, aux syndicats des restaurateurs, aux taxis d’Orléans… Le problème, ce sont la provenance de ces masques. Ils ont été commandés par l’association des maires du Loiret, et ce sont des entreprises privées qui les ont financés. Et pas n’importe quelles entreprises privées, parmi les 11 entreprises, le groupe Roy énergie est dirigé par un colistier de Serge Grouard, et deux autres colistiers sont salariés chez Orcom, une autre entreprise qui finance les masques.
D’après le Code électoral, les candidats ont interdiction de recevoir des dons d’une personne morale (entreprise ou association). Et c’est pour cela qu'en juillet 2020, Tahar Ben Chabaane, ancien conseiller municipal orléanais, fait un signalement au parquet d’Orléans, qui ouvre une enquête préliminaire pour " suspicion de financement illégal de campagne."
Affaire classée
Aujourd’hui, après plus de 4 ans d’enquête, il n’y aura pas de procès pénal contre Serge Grouard, révèlent nos confrères de France Bleu. Une information que la procureure d'Orléans a confirmée à France 3. Pour Emmanuelle Bochenek-Puren, l’affaire est classée sans suite en raison d’une « insuffisante caractérisation de l’infraction ». Autrement dit, il n’y a pas assez d’éléments pour engager des poursuites. Surtout que des sanctions avaient déjà été prises contre Serge Grouard dans cette affaire par la commission nationale des comptes de campagne. Le 3 décembre 2020, estimant que cette distribution de masque aurait dû figurer dans les frais de campagne du candidat, la commission refuse de rembourser à Serge Grouard 25 000 euros de frais de campagne sur les 50.954 euros demandés. Mais ne souhaite pas dispenser une peine d'inéligibilité au candidat ou simplement annuler l'élection.
Question d'appréciations
Et puis, il a fallu apprécier le dossier aussi en fonction du contexte exceptionnel que représentait la crise Covid. Les spécialistes reviennent notamment sur l'intention délictuelle. Pour Maître Louis Le Foyer Du Costil, avocat spécialisé en droit électoral, "si la commission nationale des comptes de campagne n'a pas jugé bon de sanctionner sur une inéligibilité ou une annulation de l'élection, c'est qu'il n'y avait pas de quoi." Dans ce cas, le pénal ne va pas contredire la décision d'une autre institution qui plus est, spécialiste de la question électorale. Ce qui a été sanctionné au niveau administratif, c'est l'intention délictueuse du candidat Serge Grouard. "Il aurait pu faire distribuer ces masques par d'autres associations, là, il sait ce qu'il fait," précise Maitre Le Foyer Du Costil "il le fait devant les caméras". Il n'y aura donc pas de procès. À période exceptionnelle, clémence partielle...