Ni bus ni train à des kilomètres à la ronde : où sont les "zones blanches" des transports en commun en Centre-Val de Loire ?

L'UFC-Que Choisir pointe du doigt les "zones blanches" de la mobilité, dont les habitants ne peuvent trouver aucune solution proche de transport public. En Centre-Val de Loire, la situation n'est pas aussi mauvaise qu'ailleurs. Mais ni la région, ni les usagers ne refuseraient de nouvelles lignes de train.

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Tout comme certaines parties du territoire ne reçoivent aucune onde téléphonique, certaines ne reçoivent jamais la visite d'un quelconque train ou bus. Dans une étude rendue publique le 26 novembre, l'UFC-Que Choisir dresse le bilan de ces "zones blanches" de l'accès aux transports publics. Et le constat est peu surprenant : 10 millions de Français n'ont pas accès aux transports en commun.

Sans surprise, la ruralité est la plus touchée par ces difficultés. En Centre-Val de Loire, l'Indre est particulièrement concerné, 44% de ses habitants n'ayant aucune solution de transport collective à moins de 10 minutes à pied. Ce qui en fait le 14e département le moins bien doté de France, selon les données transmises à France 3 par l'UFC-Que Choisir. Le Cher est 26e, avec 38%.

Et, a priori, cela semble logique, l'Indre étant le département le moins densément peuplé du Centre-Val de Loire. "Ça ne m'étonne pas", glisse Vincent Degeorge, président régional de la Fédération nationale des associations d'usagers de transports (Fnaut). "Il n'y a qu'une seule ligne de train, qui ne fonctionne pas très bien en plus. Et on est toujours, pour les réseaux de cars, sur un schéma centré sur les préfectures et imperméable entre les départements."

Des réseaux hérités du passé

Car, même si la région a récupéré la compétence des réseaux de cars, auparavant apanage des conseils départementaux, les vieilles habitudes persistent. Il n'y a qu'à ouvrir une carte des réseaux du Berry : la quasi-intégralité des lignes converge vers Bourges ou Châteauroux, les transversales sont presque inexistantes, et peu osent franchir la frontière Cher-Indre. "Ça ne correspond plus forcément aux besoins", estime Vincent Degeorge.

Au-delà de l'Indre, le président de la Fnaut CVDL note que d'autres "zones blanches" des transports publics tachent la région, comme "l'est du Loiret, le sud du Cher ou le nord-ouest de la Touraine". Et effectivement, malgré les trois lignes ferroviaires structurantes qui traversent le Loiret, le département se retrouve à égalité avec l'Indre sur l'accès de sa population au train. Selon l'UFC-Que Choisir, dans les deux départements, 71% de la population n'a accès à aucune gare à moins de 10 minutes de vélo. Dans le Cher, c'est 69%.

La carte des communes sans aucun arrêt de bus, fournie par l'UFC, est également éloquente : le sud de l'Indre et du Cher est presque totalement rouge, tout comme de nombreuses communes de Beauce en Eure-et-Loir et en Loir-et-Cher.

Le joker transport à la demande

De là à dire que ces zones sont complètement oubliées ? "Je ne veux plus qu'on dise qu'il y a des zones blanches de la mobilité", assène Philippe Fournié, le vice-président (PS) de la région, chargé des transports.

L'Indre, une zone blanche ? Depuis le 1er septembre, ce n'est pas vrai. Car dans quasiment toute la région -on est en train de le déployer- il y a le transport à la demande.

Philippe Fournier, vice-président aux transports du conseil régional de Centre-Val de Loire

Le transport à la demande, ça se réserve à l'avance, et ça permet "de rabattre, on amène une personne vers un arrêt de transport en commun, ou bien pendant une demi-journée d'amener des gens vers un marché, un supermarché, une maison France services...", liste l'élu. "Je ne dis pas que c'est la panacée, mais c'est une réponse aux questions de transports infraterritoriales". Car, reconnaît-il, dans ces territoires, beaucoup se retrouvent "assignés à résidence", faute de vraies solutions de transports publics.

Il ne faut pas comparer Paris et Argenton-sur-Creuse

Autres options : l'autopartage, le covoiturage... À Argenton-sur-Creuse, où l'autopartage est expérimenté (et pourrait se généraliser dans la région à la fin de l'année 2025), les deux voitures stationnées devant la gare "enregistrent 80% de réservation", assure le vice-président du conseil régional. "On a été très surpris" d'un tel succès.

Philippe Fournié estime ainsi que l'étude de l'UFC-Que Choisir démontre une "vision extrêmement parisienne, qui ne prend pas en compte la spécificité des territoires, le côté diffus de la population en ruralité, et la baisse démographique". Car, à l'en croire, impossible de mettre des lignes de bus partout. "On nous dit souvent qu'on déploie des lignes régulières, avec des cars vides... Parfois c'est vrai, parfois ce n'est pas vrai."

Il note cependant que les "lignes virtuelles" de l'Indre, qui ne se déclenchaient "que si on appelait", sont désormais devenues des lignes régulières. Et plusieurs lignes de cars structurantes et très fréquentées, comme Orléans-Gien ou Romorantin-Vierzon, ont vu leur offre se renforcer ces derniers mois. Au-delà de ça, la refonte des réseaux n'est pas à l'ordre du jour.

Plus de trains, toujours plus de trains

Vincent Degeorge, lui, milite pour un réseau de cars repensé, fondé sur des lignes ferroviaires efficaces. Voire, des ouvertures de nouvelles lignes. "Des infrastructures font toujours partie du réseau ferroviaire, mais ne sont plus utilisées", regrette le président régional de la Fnaut.

L'État s'est désengagé, SNCF Réseau n'a pas fait le boulot de rénovation. Du coup, les trains ont ralenti, il y a eu moins de voyageurs, donc moins de trains, etc. C'est un cercle vicieux.

Vincent Degeorge, président de la Fnaut Centre-Val de Loire

Il salue la "volonté politique" du conseil régional, qui a permis la sauvegarde de six lignes de desserte fine du territoire (Tours-Loches, Bourges-Montluçon, Chartres-Courtalain...), grâce à une enveloppe de 250 millions d'euros partagée avec l'État. "Ce n'est pas notre compétence, on aurait aimé mettre cet argent ailleurs, mais si on n'intervenait pas, ces lignes auraient fermé", souffle Philippe Fournié.

Reste, donc, à attendre l'arrivée d'un "gouvernement vraiment pro-train", pour "investir massivement dans des réouvertures de lignes". Comme Orléans-Gien, Orléans-Chartres ou Tours-Châteauroux par exemple.

Autour de ces lignes, Vincent Deorge dégaine l'arme ultime anti-zones blanches : des "cars de rabattement", qui "soient des transversales et emmènent les gens vers les gares". Quant à la question des cars vides en ruralité, il la balaie. "Est-ce que c'est la demande qui crée l'offre, ou l'offre qui crée la demande". Une façon pour lui de réclamer des lignes avec plus de cars pour habituer les habitants et offrir de meilleures possibilités de déplacement.

Quant au transport à la demande et autre autopartage, il n'y voit qu'un pansement. "Tout ça, c'est la dernière solution. La première, c'est le maillage, c'est un transport en commun à 10 minutes de chez tout le monde."

On parle d'attractivité du territoire. Avec le transport à la demande, on ne gagne rien, on n'attire pas les gens. On va juste dépanner les gens qui sont déjà là.

Vincent Degeorge, président Fnaut Centre-Val de Loire

Dans le cadre d'un récent avenant au Contrat de plan État-région, volet mobilités, des études ont été lancées en vue de rouvrir plusieurs lignes ferroviaires au trafic passager. Notamment Loches-Châteauroux, Orléans-Neuville aux Bois et Orléans-Châteauneuf sur Loire. De quoi désenclaver certaines "zones blanches" ? Philippe Fournié craint en tout cas une enveloppe totale de plusieurs milliards d'euros. Les conclusions de ces études sont attendues d'ici un an et demi.

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