Faut-il changer le calendrier des Coupes du monde de ski alpin à cause du manque de neige en Europe au mois de décembre? L'annulation des étapes françaises de Courchevel et de Val d'Isère relance le débat, mais les conséquences économiques risquent d'être lourdes.
Le "Critérium de la première neige" de Val d'Isère ne doit pas son nom au hasard: au milieu des années 50, l'ouverture des compétitions, jusque-là fixée en janvier, avait alors été avancée. "C'était un levier pour lancer plus tôt la saison touristique", rappelle un hôtelier.
Revers de la médaille: ces dernières années, le manque de neige et les températures clémentes, qui ont empêché l'emploi des canons, ont plusieurs fois obligé Val d'Isère à annuler totalement ou partiellement ses épreuves masculines et féminines.
C'est le cas le week-end prochain, après des précédents en 2003, 2004, 2006, 2007 et 2011). Idem pour l'étape de Courchevel cette année.
Une série noire sur le grand cirque blanc qui conduit à se demander si le calendrier est toujours adapté.
Or blanc
"Le mieux serait de rester une semaine de plus aux Etats-Unis et n'attaquer en Europe qu'en troisième semaine de décembre. Depuis quelques années, c'est toujours difficile en Europe", avance Gilles Brenier, directeur de l'équipe de France masculine de ski alpin.Une solution idéale sportivement mais qui se heurte au principe de réalité économique. Car se profile le début des vacances de Noël, deux semaines d'affluence touristique qui vont déterminer la réussite de la saison d'hiver. En cette saison, le client est roi: l'or blanc est à ce prix.
Dans ce contexte, la descente masculine de Bormio en Italie, une des plus prestigieuses du circuit, est annulée cette année. Trop mal placée entre Noël et le Nouvel An.
En Italie toujours, Santa Cristina, localité de la Val Gardena, qui donne son nom à la piste, accueille depuis 1973 une étape de vitesse messieurs (super-G et descente), les vendredi et samedi d'avant Noël. "C'était le seul créneau pour intégrer la Coupe du monde. Et personne d'autre n'en voulait si près des fêtes", rappelle Stefania Demetz, directrice de l'organisation. "Changer les dates? C'est très difficile", estime-t-elle.
Kitzbühel en Autriche, la Mecque du Grand cirque blanc, et Garmisch en Allemagne sont des stations de basse altitude. Elles doivent souvent leur salut aux canons à neige, qui ne fonctionnent que par températures négatives. Elles n'échangeraient donc en aucun cas leur dates de janvier, le mois du blanc.
Assurances récalcitrantes
"Les organisateurs en Europe ne veulent plus accepter les premières compétitions de décembre, il n'y a pas de garantie de neige", remarque Markus Waldner, directeur des compétitions masculines à la Fédération internationale de ski (FIS)."Les assurances rechignent à prendre en charge l'organisation de courses. Il faut réfléchir, trouver des dates plus sûres. C'est pourquoi on réfléchit éventuellement de rester une semaine de plus aux USA, nous en parlons avec Aspen", assure-t-il.
Ainsi, Courchevel s'était assurée seulement pour 75% sur les droits de télévision et de marketing. Et les quelque 600.000 à 700.000 euros escomptés par l'hôtellerie, la restauration, les loueurs et les remontées mécaniques ne sont pas assurés.
"L'hiver commençant plus tard", Markus Waldner évoque aussi la possibilité de décaler le calendrier pour terminer en avril. Mais les opérateurs de tourisme et fabricants de ski grimacent: en avril, les gens ont déjà la tête à l'été.
Au début du troisième millénaire, la Fédération internationale de ski (FIS) avait projeté de réduire le nombre des étapes et de regrouper filles et garçons sur un même lieu, à l'instar des finales de mars.
"C'était trop lourd à organiser, compliqué", se rappelle Michel Vion, président de la Fédération française de ski (FFS). Selon lui, "il n'y a pas de solution miracle". Hans Pum, directeur sportif des équipes d'Autriche, va plus loin: "Nous ne pouvons rien faire contre la météo, seul le bon Dieu le peut".