Depuis qu'un tir d'arme lourde a traversé le mur d'un appartement pour arriver dans une chambre d'enfant, plusieurs habitants des deux quartiers prioritaires de Valence décrivent une dégradation de leurs conditions de vie et appellent les pouvoirs publics à intervenir
Selon le témoignage d'un père de famille domicilié dans le quartier du Plan à Valence, un tir d'arme lourde a traversé le mur de son immeuble pour achever sa course dans la chambre de sa fille dans la nuit du 20 au 21 novembre.
Dans le quartier, de nombreux habitants identifient très bien l'appartement en question et se disent inquiets mais "pas surpris".
C'est le cas d'un jeune père de famille qui explique que la situation se dégrade ces derniers mois. De vives tensions entre les deux quartiers s'affichent en toute lettres sur les murs. Une rivalité historique entre deux secteurs classés parmi les quartiers prioritaires de la Politique de la Ville. Les bagarres entre Le Plan et Fontbarlettes, certains le reconnaissent "ça a toujours existé".
Mais ces rivalités sont désormais exacerbées "par la crise et une perte de repères depuis le COVID" estime une mère de famille qui décrit des tirs de mortiers quotidiens entre les quartiers.
"On essaie de ne plus les écouter mais c'est dur. On ne sait jamais si ce sont des armes ou autre chose.On ne dort pas toujours bien."
"Ça se dégrade fortement depuis ces six derniers mois" regrette le collectif des Mamans Indignées. Un groupe de mère de famille qui organisent des activités pour tirer leurs familles vers le haut dans un cadre qui tend à les "tirer vers le bas".
Inquiets pour leurs enfants
"Avant l'été il y a eu beaucoup de déménagements explique Sophie Mimoun, co-fondatrice du collectif. Elle note "une fuite physique des familles. On continue de protéger nos enfants de leur donner la meilleure éducation mais chacun son rôle...On attend que les services de l'Etat interviennent".
"On a la sensation que deux mondes se côtoient… Celui des habitants qui se mobilisent, investis dans les écoles et les activités et celui de l'économie parallèle et de la criminalité.
Moi je suis inquiète pour mes enfants car je ne sais pas jusqu'à quand je pourrai les protéger de cela."
Une arme dans un buisson
C'est également le ressenti d'Aicha, mère de cinq enfants. Il y a quelques mois, son fils a trouvé une arme et des gants dans un buisson. Il les a rapportés "aux grands du quartier". "C'est trop grave ça!" . Lorsqu'un autre adulte a décidé d'appeler le commissariat pour signaler les faits, il se serait vu répondre : "vous n'avez qu'à vous entretuer". "C'est pas normal ça!" s'indigne Aïcha.
Cette famille a décidé il y a un mois de changer de vie. Avec leurs enfants ils sont partis vivre en Algérie. "Je ne crois plus à la devise française, liberté égalité fraternité" affirme Aïcha. En tant que musulmane, vivant dans un quartier prioritaire cette franco-algérienne avait le sentiment de ne pas compter dans son pays de naissance, de ne pas être entendue. "Alors si je ne suis pas contente en France, je ne vais pas essayer de la changer, je préfère partir."
"Ceux qui peuvent fuient" raconte Sophie Mimoun du collectif des mamans Indignées. Elle aussi croise régulièrement des douilles en bas de chez elle, "c'est courant" dit-elle sur un ton mi-dénonciateur, mi-désabusé. Ce qui l'inquiète le plus, ce sont les logements vacants car "même s'ils sont sécurisés" cela peut attirer les marchands de sommeil et donner de faux espoirs à des familles encore plus vulnérables dans ce contexte déjà tendu.
Une enquête de police en cours
D'après nos confrères du Dauphiné, la police aurait retrouvé plusieurs étuis de kalachnikov en cours d'analyse. Les enquêteurs cherchent à déterminer dans quel contexte ces coups de feu ont été tirés.