Avenir du nucléaire dans la Drôme : "on ne veut pas finir en chair à neutrons pour EDF" explique Stop Tricastin

Dans une lettre adressée à son PDG et signée par la présidente (LR) de la Drôme Marie-Pierre Mouton, de nombreux élus proposent à EDF la candidature du Tricastin pour accueillir des réacteurs nucléaires nouvelle génération de type EPR. Une prise de position contestée par "Stop Tricastin". 

Il se murmure, dans la presse et le monde politique, que, dans les projets d'EDF, deux sites basés en Auvergne Rhône-Alpes seraient en concurrence pour accueillir un nouvel EPR : le site du Bugey, dans l'Ain, ou celui de Pierrelatte, dans la Drôme. C'est pour "emporter la partie" qu'une démarche a été entreprise par la présidente (LR) de la Drôme, Marie-Pierre Mouton, sous la forme d'une lettre de candidature.

Le courrier, communiqué à la presse lundi 1er février, a été cosigné par des élus du département de la Drôme, du Vaucluse, du Gard et de l’Ardèche parmi lesquels on trouve Pascal Terrasse ancien président (PS) du département de l’Ardèche, Jean Michel Catelinois, maire (LREM) de Saint-Paul-Trois-Châteaux et président de la Communauté de communes de Drôme sud ou encore Alain Gallu (DVD), maire de Pierrelatte.

Notre communiqué de presse du jeudi 4 février: Nous souhaitons, par cette tribune, répondre point par point à la lettre...

Publiée par STOP Tricastin sur Jeudi 4 février 2021

Dans un communiqué récent, l'association "Stop Tricastin", composée d'habitants opposés au nucléaire, balaye l'ensemble des arguments présentés dans ce courrier en faveur d'un tel projet.

Ils nient tout d'abord "l'acceptation du nucléaire par la population" qui est évoquée : "Dans le sondage BVA /ORANO évoqué dans la lettre des élus 29% des sondés autour de Tricastin estiment que la centrale est un handicap pour la région. Et rappelons que notre pétition pour la fermeture du réacteur numéro 1 du Tricastin a recueilli plus de 41 000 signatures dont 1024 en Drôme et 987 en Ardèche." répond l'association.

Des arguments défavorables au projet

Autre argument : pour "Stop-Tricastin", il ne faut pas négliger les risques que représenterait l'implantation d'un nouveau réacteur dans une zone sismique : "On ne pourra donc se prononcer sur la centrale du Tricastin que lorsque l’IRSN et le CNRS auront terminé leur évaluation du séisme de référence à prendre en compte, tout en sachant, Fukushima nous l’a montré, qu’un séisme nettement supérieur au séisme historique est toujours possible lorsque le site de la centrale se trouve en zone sismique." est-il expliqué.

Les opposants s'interrogent également sur l'avenir des déchets radioactifs "dont on ne sait que faire et que personne ne veut... leur gestion et le coût de celle-ci reposeront sur les générations futures." Enfin, ils estiment que ces réacteurs nucléaires de nouvelle génération représenteraient un coût trop important, qui reviendra, au final, au consommateur ou au contribuable.

Contactés par nos soins, le porte-parole de "Stop Tricastin" soulève d'autres points qu'il estime problématiques dans ce projet.

Le premier est très politique. Il concerne la présidente (LR) de la Drôme, Marie-Pierre Mouton. "Elle est également présidente de la Commission d'Information des citoyens sur le nucléaire autour de Tricastin, et ouvertement pro-nucléaire. Nous lui prêtons des arrière-pensées politiques, notamment les futures élections cantonales où elle compte se présenter." De leur côté, les opposants au nucléaire fondent beaucoup d'espoir sur une éventuelle victoire des écologistes aux futures élections régionales, officiellement hostiles à l'implantation d'un EPR à Tricastin. "Ils ont remporté Grenoble, Lyon, Annecy et d'autres villes. C'est maintenant ou jamais." commente-t-il. 

Une autre solution serait possible

Concernant l'emploi, les anti-EPR réfutent l'argument avancé par les élus chiffrant à 7000 salariés la mise en oeuvre d'un grand chantier EPR. Selon eux, on peut à l'inverse tout à fait développer des emplois d'une autre manière : "Notre région bénéficie d’un potentiel exceptionnel en matière d’énergies renouvelables (éolien, solaire, biomasse, hydraulique et géothermie) et une grande partie des travailleurs du nucléaire pourraient utiliser leurs compétences et leur savoir-faire dans le développement de nouvelles filières énergétiques permettant de fournir de l’électricité décarbonnée et d’accroitre notre indépendance énergétique." explique Alain Volle.

Il cite l'implantation à Valence des concepteurs du projet "Négawatt", qui, depuis les années 2000, travaillent en faveur d’une transition énergétique réaliste et soutenable pour la France. "Leur scénario de transition écologique régional pourrait parfaitement s'appliquer ici." estime Stop Tricastin. "Il suffirait simplement de faire un grand audit social des compétences de la région. Et, à côté du démantèlement, on pourrait reconvertir très largement toutes ces personnes". Le scénario envisagé par Négawatt estime qu'il est possible de se passer de centrale nucléaire, à condition de réduire de 50% notre consommation en énergie au préalable, d'améliorer l'efficacité énergétique en isolant les bâtiments, ou en améliorant les moteurs. 

RTE travaille sur un scénario alternatif à l'horizon 2050

Stop Tricastin a d'autres raisons de se montrer optimiste. Leur association met en avant un rapport très récent, auquel collabore RTE, montrant une étude sur les conditions d'un système électrique à forte part d’énergies renouvelables en France à l’horizon 2050. "Bien qu'il n'y ait aucune barrière technique infranchissable a priori, il faut regarder les faits scientifiques, techniques et industriels", relevait en janvier 2021 Xavier Piechaczyk, président de RTE. "Il reste beaucoup de sujets à résoudre. Le rapport suggère une méthode et des feuilles de route pour traiter ces enjeux". 

La ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a salué cette annonce. "Ce rapport constitue un moment copernicien pour le monde de l'énergie. Nous avons désormais la confirmation que tendre vers 100% d'électricité renouvelable est techniquement possible", a-t-elle commenté. Pour Alain Volle, de Stop-Tricastin, "Cela veut clairement dire qu'aujourd'hui, même au gouvernement, tout le monde n'est pas d'accord avec EDF". conclut-il.

En conclusion, l'association opposée à cette implantation d'un EPR à Tricastin estime qu'EDF pratiquerait "une fuite en avant, et une politique du fait accompli." Pour appuyer cette opinion, ils rappellent que l'entreprise a déjà commandé à Framatome au Creusot des pièces pour ce futur EPR 2, alors que le projet n'a pas encore été validé par l'Etat. "EDF est une espèce d'Etat dans l'Etat, totalement obsédé par le nucléaire. Nous, les riverains, on est inquiets, parce qu'on n'a pas envie d'être de la chair à neutrons. On aime notre région et on n'a pas envie de se retrouver demain ou évacués ou...mort". ajoute Alain Volle. "On ne veut pas d'un nouvel EPR à Tricastin, et on est solidaires de nos copains du Bugey, qui n'en veulent pas non plus." 

 

 

 

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