Un homme de 58 ans comparaît depuis ce lundi 25 septembre 2023 devant la cour d'assises de la Drôme, à Valence, pour le viol et le meurtre d'une mère de famille. Un crime pour lequel il n'a pas été inquiété pendant 22 ans.
Chantal de Chillou de Saint-Albert, une mère célibataire de 55 ans, a été tuée début août 2001, dans une clairière de Chatuzange-le-Goubet, près de Romans-sur-Isère. Un homme est jugé devant les assises de la Drôme du lundi 25 au jeudi 28 septembre 2023, plus de deux décennies après les faits. L'homme, aujourd'hui âgé de 58 ans, sera d'ailleurs également jugé pour viols sur mineures. Il est accusé de deux viols incestueux en 2000, sur deux jeunes filles de sa famille, alors âgées de 14 et 16 ans.
Affaire criminelle
Le crime remonte au 2 août 2001. Ce jour-là, le corps partiellement dénudé de Chantal de Chillou de Saint-Albert, mère célibataire de 55 ans, était retrouvé par un chasseur, le long d'un sentier à Chatuzange-le-Goubet, près de Romans-sur-Isère. Le corps comportait de profondes blessures au crâne et des traces de combustion à l'entrejambe. L'autopsie a révélé que la victime est décédée des suites "d'un traumatisme crânio-cérébral gravissime associé à des signes d'asphyxie mécanique par strangulation".
La veille, la quinquagénaire avait pris un train près de Marseille. Elle se rendait dans les Hautes-Alpes, près de Gap, afin de postuler pour un emploi de femme de ménage dans une colonie de vacances. Après avoir raté sa correspondance en gare de Valence-TGV, la quinquagénaire avait décidé de chercher un hôtel pour la nuit. C'est la dernière fois qu'elle a été vue vivante.
ADN inconnu et non-lieu
Sur les lieux du crime, aucune arme n'avait été retrouvée ce 2 août 2001. En revanche, un mégot et un gobelet prélevés près du corps révèlent la présence d'ADN masculin inconnu. Les échantillons avaient été enregistrés au Fichier national des empreintes génétiques (FNAEG). Mais les comparaisons avec le profil de près de 300 ouvriers, chasseurs et riverains n'avaient rien donné. Aucune correspondance n'avait été trouvée à l'époque.
Des auditions de témoins, des rapprochements avec d'autres procédures criminelles et l'étude de l'entourage de la victime étaient restés tout aussi vains. Fin 2012, onze ans après la mort de Chantal de Chillou de Saint-Albert, une ordonnance de non-lieu avait été rendue.
Cold Case : enfin un nom, 22 ans après le crime
En 2019, la division d'investigation spécialisée dans les affaires non élucidées (DiANE) du pôle judiciaire de la gendarmerie de Pontoise, a ressorti le dossier. Et le parquet de Valence a rouvert l'enquête pour assassinat. À l'époque, il s'agissait notamment de vérifier si Nordahl Lelandais avait pu commettre d'autres crimes dans la région. Cette seconde enquête a finalement permis d'aboutir à l'identification d'un suspect.
Comment les enquêteurs de cette unité de recherches ont-ils réussi à élucider ce cold case drômois ? Ils avaient constaté qu'il existait dans cette affaire des scellés anciens pouvant être confrontés aux techniques modernes de la police scientifique.
C'est ainsi que l'ADN relevé sur le mégot retrouvé près du corps, mais aussi sur le t-shirt et dans les prélèvements vaginaux de la victime, a été identifié.
L'enquête aurait-elle pu être résolue plus tôt ?
Raymond T. a finalement été interpellé en juin 2020. L'homme est un habitant de Romans-sur-Isère à l'époque des faits. Lors de sa garde à vue, il a reconnu partiellement les faits dans de nombreuses déclarations fluctuantes. Selon l'une d'elles, rapportée dans l'ordonnance de mise en accusation, cet homme au parcours de vie chaotique aurait eu "une relation sexuelle consentie" avec la victime croisée près d'un bar. Selon une autre, il aurait reconnu une dispute avec Chantal Chillou de Saint-Albert dans sa voiture. "J'ai porté des coups, c'est sûr, de l'avoir tuée, je sais plus. Je n'en ai plus de souvenir", dira-t-il, assurant avoir beaucoup bu le soir des faits. Mis en examen pour meurtre précédé de viol, Raymond T. a été placé en détention provisoire.
Les empreintes génétiques de Raymond T., condamné pour des faits de violences intrafamiliales, ont été enregistrées dans le FNAEG dès 2008, selon Me Caroline Jean-Meire. "La justice s'est-elle donnée les moyens suffisants et nécessaires pour résoudre l'enquête au plus tôt ?", s'est interrogée l'avocate du fils de la victime avant l'ouverture du procès. Le procès doit durer quatre jours. L'accusé encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu ce jeudi 28 septembre.