Former les automobilistes français aux bonnes pratiques de l'écoconduite : un marché juteux qui intéresse, depuis une dizaine d'années, toutes les auto-écoles. Apprendre la bonne attitude au volant pour réduire sa consommation de carburant, et limiter les émissions de gaz à effet de serre peut faire réaliser de grosses économies aux particuliers et à certaines entreprises aux flottes de véhicules souvent importantes.
Un permis de conduire associé à un permis de moins polluer : une formule qu'une jeune école de conduite rhônalpine a choisi de proposer à ses clients. Tous les ans, depuis sa création en 2015, cette start-up forme près d'un millier de jeunes ou moins jeunes conducteurs. Mais depuis peu, de nouveaux clients ont émergé : des entreprises qui voudraient former leurs salariés à l'écoconduite.
Ces comportements et techniques de conduite permettent, aux entreprises, de dépenser moins de carburant et d'entretien pour leur flotte de véhicules. Le tout en contribuant à baisser leur empreinte carbone.
Un marché d'un milliard d'euros
"On est de plus en plus sollicité par le monde des entreprises pour ce type de formation", explique Yohann Berthe, le fondateur de l'école chambérienne. "Pour l'heure, le potentiel du marché global de la formation à l'écoconduite en entreprises est estimé à hauteur d'un milliard d'euros en France." Pour le conquérir, le jeune patron, fils de moniteurs d'auto-école, a notamment réussi une levée de fonds de 3 millions d'euros.
"L’écoconduite est un serpent de mer qui revient à chaque hausse du prix du carburant", déclarait il y a quelques mois au site des professionnels de l'auto-école, Bruno Garancher, le président du réseau ECF (Ecole de Conduite Française). D'après le responsable de l'une des plus importantes entreprises formatrices de France, les auto-écoles peuvent encore espérer des marges de 8 à 15 % en dispensant ce type de formation. Soit bien plus que sur la formation au permis B, cheval de bataille de la plupart des professionnels du secteur.
De nombreux professionnels proposent, désormais, leurs propres recettes pour inciter les entreprises à former leur personnel à la "conduite écologique", parfois avec des simulateurs d'économies réalisables grâce à des salariés formés à l'écoconduite, ou avec des stages sur la prévention des risques routiers, ou encore avec un enseignement associant distance et électronique embarquée.
Tous les moyens sont bons pour faire des économies : selon différentes études, pour une entreprise, les dépenses de carburant pèseraient entre 16 et 30 % dans le coût global d'une flotte de véhicules.
Une plate-forme d'enseignement alliant écoconduite et sécurité routière
"Notre objectif, c'est de rendre accessible, engageant et pertinent l’apprentissage de l'écoconduite. Pour les conducteurs de véhicules thermiques aussi bien que pour ceux des véhicules électriques d'aujourd'hui ou de demain", ajoute Yohann Berthe. Son auto-école a, elle, fait le pari du "microlearning", un enseignement à distance par courtes séquences, pour former à l'écoconduite.
Au siège du Crédit Agricole des Savoie, à la Motte-Servolex, environ 10 % des 2 500 collaborateurs présents dans les deux départements, a choisi d'apprendre les bons gestes de l'écoconduite. Même Eglantine, chargée de projets ressources humaines, qui vient chaque jour au siège de la banque à vélo, a franchi le pas.
"Tout est parti d'une volonté de diminuer notre empreinte carbone sur nos déplacements professionnels, mais surtout domicile-travail, explique-t-elle. Jusqu'alors, on avait travaillé sur la mobilité douce en proposant des vélos électriques au personnel. Mais on peut rouler en voiture et ressentir quand même le besoin d'être acteur de la lutte contre le réchauffement climatique."
Une démarche vertueuse, écologiquement, mais aussi financièrement. Si l'on en croit les données de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) sur un parcours autoroutier de 100 km, réduire sa vitesse de 10 km/h permettrait une économie de carburant d'un litre en moyenne.
Des économies en carburant, entretien, sécurité et... assurance
Ce gain de pouvoir d'achat peut s'avérer intéressant sur le long terme : "Pour une entreprise d'environ 3 000 salariés, notre formation aura un coût compris entre 100 000 et 200 000 euros, estime Yohann Berthe. Cela peut paraître cher, mais pas si l'on parle des 100 000 euros d'économies en carburant qui seront réalisés chaque mois grâce à des salariés formés à l'écoconduite."
Ajoutez à cela d'autres économies réalisées sur l'entretien des véhicules, sur les réparations causées par des accidents moins nombreux, sur les primes d'assurances (certaines sociétés proposant déjà de récompenser les nouveaux "écoconducteurs"), et vous comprendrez pourquoi de plus en plus d'entreprises sont tentées de faire lever le pied sur l'accélérateur à leurs employés.