La grogne des notaires de l'Isère contre le projet de loi Macron

Le projet de loi du ministre de l'économie ne plait pas aux représentants des professions juridiques libérales. Mardi 8 décembre, la Chambre des notaires de l'Isère tient une conférence de presse à Seyssins, en vue de leur mobilisation nationale de ce mercredi.  

On les entend rarement. Mais ce mercredi prochain, ils descendront dans les rues pour faire front commun, face au projet de loi Macron : notaires, huissiers, avocats et juristes. Une première historique ! La manifestation, d'ampleur nationale, devrait rassembler 50 000 personnes. Le choix du mercredi 10 décembre n'est pas anodin, puisqu'il correspond au jour de la présentation du texte de loi en Conseil des Ministres. Ce mercredi, les études notariales et autres instances seront fermées.  

Reportage de Nathalie Rapuc-Mulac, Dominique Bourget et Virginie Muamba

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©INA

"On va tout droit à un notariat low cost"

David Ambrosiano, président de la chambre des notaires de l'Isère, emploie le terme "furieux" pour désigner l'état d'esprit de la profession, si discrète d'habitude. Celle-ci tire la sonnette d'alarme sur les possibles conséquences de la loi Macron : mise en péril de l'accès au droit, fin du conseil gratuit pour tous, déséquilibre du maillage territoriale... Elle exige le retrait du volet "professions juridiques réglementées" du projet de loi, qui vise justement à déréglementer la profession.

Dans une interview donnée au magazine isérois Essor, David Ambrosiano estime que "l'on s'est moqué d'eux" à Bercy, et que l'"on va tout droit à un notariat "low cost". Il reproche au ministère de vouloir casser un modèle qui fonctionne bien : "En immobilier par exemple, qui acceptera de travailler pour moins de 1% de la transaction ? Qui acceptera d'assurer les consultations juridiques gratuites, lesquelles représentent actuellement 40% du temps de travail d'un notaire (..) ?" Avec ce projet de loi qu'elle qualifie de "dogmatique", la profession a le sentiment d'être sacrifiée sur l'autel du libéralisme.  

Ecoutez les inquiétudes de David Ambrosiano. Propos recueillis par Nathalie Rapuc-Mulac et Dominique Bourget : 


Ce que propose le projet de loi pour la "croissance et l'attractivité" 

Négociabilité des tarifs, accès à la profession géré par Bercy... Le ministre de l'Economie a annoncé vouloir créer plus d'études de notaires, afin de stimuler la concurrence, tout en préservant l'équilibre économique du milieu notarial. Première mesure, les tarifs seront revus à la baisse. D'autant plus qu'en en mars 2013, l'IGF (Inspection Générale des Finances) a révélé dans un rapport que les revenus de la profession avaient augmenté de 61% entre 2001 et 2010.

Un plafonnement sera donc instauré pour inciter les notaires à pratiquer des remises, et donc, à faire jouer la concurrence. La nouvelle tarification concerne les actes tels que les contrats de mariage, les successions ou les donations. Le régime des transactions immobilières, en revanche, pourra encore faire l'objet de dérogations. Les prix seront plafonnés jusqu'à un certain seuil. 

La libre installation pour les jeunes diplômés

L'objectif est de faciliter l'installation des jeunes diplômés. Pour l'heure, un arrêté du garde des Sceaux fixe tous les ans le nombre (près d'une quinzaine) et la localisation des offices à pourvoir - c'est le concours de la Chancellerie. Avec la nouvelle loi, les candidats à l'installation pourront faire une simple demande au ministère de la Justice. En cas de refus, c'est l'Autorité de la Concurrence qui doit donner un avis selon des critères démographiques (densité de population sur la zone, nombre d'études de notaires sur place). Si l'arrivée d'un jeune diplômé risque de causer la faillite des offices en place, sa demande sera déboutée. Ce sera à la Chancellerie de trancher. Le droit de présentation est maintenu : c'est-à-dire que le notaire pourra toujours choisir son successeur, "en cas de succession ou de rachat d'offices" sauf contre-ordre du Conseil constitutionnel.

Les notaires pensent avoir une carte à jouer. Selon David Ambrosiano, la profession verse à l'Etat l'équivalent de 22 milliards d'euros d'impôts. Si la loi venait à passer, ils envisagent "d'utiliser tous les moyens légaux pour ralentir le système" : une mesure de rétorsion.   







Les notaires en chiffres (au 31 juillet 2014)
Chiffres-clé
9600 notaires, dont 7033 exercent sous la forme associée au sein de 2 970 sociétés
Plus de 48 000 employés dans les offices 
4561 offices 
34% de femmes notaires
Âge moyen : 48 ans

Activité économique
Chaque année, les notaires :
reçoivent 20 millions de personnes,
traitent des capitaux d'un montant de 600 milliards d'euros,
établissent plus de 4 millions d'actes authentiques,
réalisent un chiffre d'affaires de 6.5 milliards d'euros

Répartition de l'activité notariale suivant le CA
Immobilier, ventes construction, baux : 49 %
Actes liés au crédit : 14 %
Actes de famille, succession : 26 %
Négociation immobilière : 4 %
Droit de l'entreprise, conseil, expertise, conseil patrimonial : 7 %

Source : http://www.notaires.fr/
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