Pendant le week-end de l'ascension, la ville d'Annecy a enregistré une fréquentation record. Une aubaine pour les commerçants, un cauchemar qui se répète pour les résidents. En quelques années, ils ont vu leur quartier changer de visage. Pour le pire.
On l’appelle la petite Venise des Alpes. Avec ses paysages de carte postale, Annecy (Haute-Savoie) séduit le monde entier. "C'est merveilleux !", s'exclame une touriste étrangère. "C’est agréable de visiter le lieu, mais il y a beaucoup trop de monde", déplore une visiteuse espagnole.
En ce dimanche 12 mai, dernier jour du week-end de l'Ascension, il n’est pas toujours facile de se frayer un chemin. Dans le quartier historique, les terrasses s’étalent et les magasins de souvenirs se multiplient. La situation est devenue invivable pour les résidents du cœur de ville.
Plus de 3 millions de touristes par an
"Ce niveau de surtourisme chasse les habitants hors de leur lieu d’habitation, c’est impossible de supporter cette fréquentation, car ça élimine tous les commerces de proximité, tacle Brigitte Cottet, présidente de l'association des Résidents de la vieille ville d'Annecy. "Donc c’est la destruction d’une identité, de l’âme du quartier."
Sur 170 commerces, plus de la moitié est des restaurants et des bars. Le reste est un concentré de glaciers ou d’enseignes. "La vieille ville d’Annecy, c'est une rue qui fait 800 mètres de long et c’est un quartier qui fait 500 mètres de large, souligne Aurélien Soustre, secrétaire de l'association. Et aujourd’hui, on a un peu plus de 3 millions de touristes à l’année."
Eric, commerçant dans l'hypercentre, côtoie les touristes depuis quarante ans. "Ces gens-là sont en droit de venir se balader, manger une glace. Et ça ne doit pas profiter aux Annéciens qui habitent au-dessus."
Avant "c'était joli", maintenant "c'est un restaurant"
Près du canal, Laurette Sicamois, résidente d'Annecy depuis 1988, explique subir certaines nuisances sonores depuis une dizaine d’années. Dans sa chambre, la fenêtre triple vitrage est condamnée. Un environnement bien différent de celui des années 80.
"On voit absolument la dégradation de la rue. Regardez avant en bas de chez nous comme c’était joli… Maintenant, c'est un restaurant. Ça m’attriste énormément parce que je connais cet endroit depuis longtemps."
Résignée, Laurette Sicamois reste calfeutrée chez elle durant les grands pics de fréquentation comme ce week-end. D'autres riverains se disent même prêts à quitter le quartier.
Un reportage de Solène Anson et Benjamin Métral