Visée par une plainte pour harcèlement moral, la présidente du Grand Annecy a été confrontée par les élus, jeudi 15 février, en conseil communautaire. Certains lui ont suggéré de se mettre en retrait, le temps que la justice mène son enquête préliminaire. Frédérique Lardet l'a exclu d'emblée.
L'heure était aux règlements de comptes. Réunis en conseil communautaire, les élus de l'agglomération d'Annecy ont fait part de leur colère, jeudi 15 février, à l'encontre de leur présidente, Frédérique Lardet (Renaissance). "Les syndicats nous alertent, les agents nous alertent et même des élus nous alertent. Pour vous, c'est toujours la faute des autres", a entamé Denis Duperthuy, vice-président aux finances du Grand Annecy.
Depuis plusieurs mois, l'agglomération traverse une grave crise. Et elle s'est accélérée ces derniers jours. Le parquet d'Annecy a ouvert une enquête préliminaire pour harcèlement moral contre X, il y a quinze jours, et trois cadres du Grand Annecy ont déposé une plainte contre Frédérique Lardet pour des faits de harcèlement, mardi 13 février.
Les élus en faveur d'une mise en retrait
Pendant plus d'une demi-heure, plusieurs élus ont ainsi interpellé la présidente. "Si chaque fois qu’un élu prend la parole dans cette assemblée, il doit se demander si vous n’allez pas porter plainte contre lui, alors où se situe le débat démocratique ?", s'est insurgé Raymond Pélissier, conseiller communautaire d'opposition.
Lors d'un précédent conseil, en décembre, le maire de Menthon-Saint-Bernard, Antoine de Menthon, a fait savoir qu'il allait saisir la procureure de la République au sujet de faits relevant de "harcèlement moral". Frédérique Lardet avait ensuite porté plainte contre l'élu pour "dénonciation calomnieuse".
"Madame la présidente, nous aurions pu attendre de votre part un mot de compassion pour les agents en souffrance, a déploré la députée EELV Fabienne Grébert. Pour celles et ceux qui ont vu leurs vies marquées à tout jamais par les violences verbales, par les faits de harcèlement."
Certains ont même suggéré la possibilité, pour Frédérique Lardet, de quitter ses fonctions le temps de l'enquête. "Lorsque madame la maire adjointe à la mobilité d’Annecy a été soumise à une enquête judiciaire pour soupçon de prise illégale d’intérêt, vous aviez jugé utile de l’enlever de la commission mobilité au niveau de l’agglomération, a rappelé Tony Pessey, conseiller communautaire. Est-ce que cette règle ne pourrait pas devenir une mesure générale lorsqu’il y a une enquête judiciaire qui est engagée ?" "Retirez-vous de votre poste", a ajouté Fabienne Grébert.
"Je suis particulièrement confiante"
Visiblement irritée, la présidente a balayé la suggestion d'un sourire crispé. "Ça n'a strictement aucun rapport. Concernant l’enquête en cours, je suis particulièrement confiante. Je vais enfin pouvoir moi aussi m’exprimer sur l'état de l’agglomération et ma réalité", a-t-elle répondu.
"Ça me déprime d'avoir une présidente dans une telle certitude, alors que les agents sont dans une telle souffrance. Ce n'est pas digne du service public", lâche Fabienne Grébert, au lendemain de ce conseil explosif. Il faut que les élus se battent pour qu'elle ne décapite pas l'institution."
Elle estime que la démission temporaire de la présidente de ses fonctions est "une solution totalement envisageable". "Aujourd'hui, ce n'est pas quelqu'un qui fait la preuve de son efficacité." Denis Duperthuy s'inquiète lui d'une "atmosphère dégradée" qui risque de perdurer "tout du long de l'enquête".
En parallèle de ces échanges tendus, plusieurs conseillers communautaires du Grand Annecy ont adressé un courrier, jeudi 15 février, à Frédérique Lardet, que France 3 Alpes a pu consulter. Ils y demandent "une réaction immédiate et collective, sans attendre le résultat de l’enquête menée par la justice, pour sortir de cette crise et retrouver la sérénité d’une gouvernance apaisée et constructive pour le territoire, son personnel et le service public".