"C'est hors norme d'aller aussi vite" : l'incroyable défi de Kilian Jornet, à l'assaut des plus hauts sommets des Alpes

Depuis deux semaines, la star de l'ultra-trail Kilian Jornet tente de gravir le plus vite possible tous les sommets alpins de plus de 4000 mètres d'altitude. Ce jeudi, il avait déjà atteint 59 sommets sur 82. L'alpiniste chamoniard Vivian Bruchez, proche du Catalan, explique la portée surhumaine de ce projet.

Tous les plus hauts sommets des Alpes comme objectif. Depuis près de deux semaines, la star de l'ultra-trail et des sports de montagne, Kilian Jornet, poursuit son projet exceptionnel de gravir le plus grand nombre de sommets alpins de plus de 4 000 mètres d'altitude.

Après une quinzaine de jours passés en Suisse, le Catalan s'est attaqué aux cimes du massif du Mont-Blanc. Les chiffres de son "Alpine Connections" sont à faire tourner la tête : déjà 59 sommets atteints sur 82, plus de 800 km parcourus à pied ou à vélo et près de 53 000 mètres de dénivelé positif sous la semelle.

Ce mercredi 28 août, Kilian Jornet n'a fait qu'une bouchée des Grandes Jorasses, au-dessus de Chamonix, alors que la commune s'apprête à vivre ce week-end au rythme de l'Ultra-trail du Mont-Blanc (UTMB). L'Espagnol ne sera pas sur la ligne de départ et poursuivra son aventure dans les montagnes. Mais plusieurs de ses proches se sont rassemblés ce mercredi dans une micro-brasserie de la ville pour évoquer sa performance.

Je ne pensais pas qu'il pouvait aller aussi vite, qu'il pouvait enchaîner de la sorte.

Vivian Bruchez, alpiniste

Parmi eux, Vivian Bruchez, alpiniste et guide de haute montagne, a partagé plusieurs ascensions avec le Catalan. Avec du recul, il ne se dit pas surpris du projet de son ami : "À la fin du printemps, il avait commencé à m'envoyer des messages pour savoir si ça pouvait passer à certains endroits. Je me suis dit qu'il préparait quelque chose. Mais je ne me doutais pas que ça allait être aussi gros. Je ne pensais pas qu'il pouvait aller aussi vite, qu'il pouvait enchaîner de la sorte."

Cinq heures de sommeil par jour

"Je suis extrêmement impressionné. Je connais tous ces sommets, je connais toutes les distances. Et je n'arrive même pas à tout comprendre", confie le Chamoniard. "Même là, sa façon de traverser le Mont-Blanc, je ne la comprends pas. C'est très logique et intelligent dans l'approche alpinistique. Mais dans les longueurs d'effort, je ne comprends pas."

Depuis le début de son aventure, l'Espagnol partage quelques informations sur les réseaux sociaux. Notamment sur son avancée et ses longues journées d'effort. Il dort ainsi, en moyenne, un peu moins de cinq heures par jour pour près de 18 heures d'activité physique.

"Il bouge beaucoup de nuit, il avance, il est toujours en mouvement... C'est une manière de réinventer la pratique", poursuit le Haut-Savoyard. Cette façon de se déplacer à haute altitude n'a pas toujours été comprise par les professionnels de la montagne : "Quand il est arrivé à Chamonix il y a quelques années pour y vivre (il vit désormais en Norvège, NDLR), il a beaucoup changé la vision des guides de montagne ici. Au début, ils ne comprenaient pas. Certains attendaient un drame pour dire que ce n'était pas assez sûr de bouger comme ça. Mais années après années, il a obtenu beaucoup de respect de la part des guides."

Dans "l'exploration de son physique"

Kilian Jornet avait confié à nos confrères du journal L'Equipe vouloir désormais "repousser ses limites et de découvrir jusqu’où il peut aller physiquement et mentalement". Pour Vivian Bruchez, l'athlète a "toujours été dans l'exploration de son physique. Ce qui l'intéresse, c'est d'aller voir plus loin. C'est hors norme et très dur à comprendre."

"Le plus impressionnant, c'est qu'il dort très peu. Puis, il parcourt une montagne très sèche et en mouvement à cette époque de l'année." En effet, durant l'été et sous l'effet du réchauffement climatique, Kilian Jornet s'expose à des dangers tels que des éboulements dûs à la fonte du permafrost, ou encore des crevasses cachées dans les glaciers. Une manière pour le Catalan de mettre en lumière les conséquences du réchauffement climatique en montagne.

En 2008, deux guides italiens, Franco Nicolini et Diego Giovannini, avaient réalisé l'exploit de boucler les 82 sommets de plus de 4 000 mètres d'altitude en 60 jours. Nul doute que ce record devrait être battu si Kilian Jornet parvient à mener ce projet à son terme.