A l'annonce du décès de cette figure de la littérature, les et les autres saluent le "chiffonnier-poète". Le maire de Lucinges, le village où l'écrivain vivait, a indiqué que les obsèques de Michel Butor auraient lieu le lundi 29 août. Le village lui prépare un hommage tout particulier.
Michel Butor est décédé mercredi à l'hôpital de Contamine-sur-Arve, en Haute-Savoie. Il résidait à proximité, dans le village de Lucinges, où il avait acquis une maison en 1989.
Jean-Luc Soulat, le maire, confie que ce décès est vécu comme une onde de choc avec également un grand nombre de réactions sur les réseaux sociaux et toujours "beaucoup d'émotion".
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"C'était une figure du village, quelqu'un de très disponible, qui n'était jamais avare d'une discussion sur toutes sortes de sujets, qui était encore extrêmement curieux."
Interview
Lucinges se préparait à fêter le 90e anniversaire de l'auteur, né le 14 septembre 1926 à Mons-en-Baroeul (Nord). Un hommage lui sera rendu le 15 octobre lors de la fête du livre d'artiste. Par ailleurs, un registre de condoléances va être installé en mairie pour recueillir toutes les réactions qui affluent depuis l'annonce du départ de Michel Butor.
Lucinges a pour projet de créer "une maison de livres d'artistes, autour de l'oeuvre de Michel Butor et de ses collaborations", a indiqué Jean-Luc Soulat.
Reportage Florine Ebbhah et Franck Ceroni
Audrey Azoulay, la ministre de la Culture, a rendu hommage à l'auteur, "un écrivain inclassable" qui aura été une des figures du Nouveau Roman et qui laisse derrière lui une oeuvre protéiforme. "Michel Butor était un écrivain inclassable, compagnon d'aventure du Nouveau Roman, d'Alain Robbe-Grillet, de Nathalie Sarraute ou de Claude Simon", rappelle la ministre dans un communiqué.Un écrivain inclassable"
Ce "chiffonnier-poète", prix Renaudot en 1957 pour "La modification", "semblait animé d'un formidable appétit de découvertes et d'expériences mais sans doute plus encore du plaisir de transmettre et de partager chacune d'elle par le texte-prose ou la poésie", souligne Audrey Azoulay. Michel Butor laisse "une oeuvre immense aux formes les plus inattendues, anthologie, collages, récits de rêves" ainsi que des "ouvrages sur des artistes comme Barcelo ou Alechinsky".
Pour l'écrivaine et psychanaliste Julia Kristeva l'oeuvre de Michel Butor "a bouleversé le feuilleton romanesque qui commençait à devenir soporifique" dans les années 50. Dans "La modification" par exemple, l'auteur "expose" plus qu'il ne "raconte une rupture sentimentale", explique-t-elle. "A la place d'une confession sentimentale par le personnage, nous avons une filmographie des micro-changements de ses postures, de son rapport au temps, à l'espace, le tout à travers un personnage qui est désigné par le pronom personnel "vous". Dans ce livre, "le personnage sentimental disparaît au profit de l'école du regard, c'est-à-dire un regard minutieux, à la fois absent et réfléchi qui nous fait subir la rupture" et qui mêle "surveillance et abandon". Cela donne "une fragmentation du récit à travers des images recomposées" et permet de rendre compte d'une autre manière d'une séparation amoureuse. "La séparation est là et en même temps à distance, à distance du pathos", souligne Julia Kristeva.
S'il a été une figure du Nouveau Roman, Michel Butor n'a publié que quatre romans, le reste de son oeuvre foisonnante comprend de nombreux autres genres (essais, poésie, etc.). Également passionné de musique et de littérature, il avait publié plusieurs livres d'artistes (Alechinsky, Barcelo, Jiri Kolar...).
L'écrivain, qui au cours de sa carrière avait parcouru le monde pour donner cours et conférences, avait encore des projets d'écriture.