Le Mont-Blanc sera cet été placé sous haute surveillance, avec notamment le déploiement de gendarmes sur les voies d'ascension de ce sommet mythique.
Dès le week-end prochain, des militaires du peloton de gendarmerie de haute montagne de Chamonix devraient s'installer au refuge de Tête Rousse (3.167 mètres), sur la "voie normale" d'ascension du Mont-Blanc. Sur cet itinéraire, la fondation Petzl a compté 17.000 passages (à l'aller et au retour) à l'été 2011. Et de 1990 à 2011, les registres de la gendarmerie recensent 256 accidents, ayant causé 74 morts et 180 blessés entre Tête Rousse et le refuge du Goûter (3.835 mètres).
Présents 55 jours dans l'été, en fonction de la météo et de l'affluence, les gendarmes auront pour mission de prévenir "les comportements déplacés et dangereux", explique Georges-François Leclerc, préfet de la Haute-Savoie. "La montagne est un espace de liberté mais ça ne veut pas dire que c'est une zone de non droit", souligne-t-il.
Camping interdit
Le camping est interdit sur le Mont-Blanc, qui est un site classé. Durant la saison d'alpinisme (15 juin-15 septembre), une vingtaine de tentes sont pourtant habituellement installées en face du refuge du Goûter, certaines de manière permanente, avec les nuisances qui y sont associés en terme de pollution. "On les invitera à consigner leur tente au refuge afin de s'alléger et d'éviter de monter plus haut avec une charge inutile", explique le capitaine Emmanuel Vegas du PGHM. Si le problème persiste, "il pourra y avoir quelques opérations de démontage de tentes", prévient le préfet.Les gendarmes auront en outre un rôle d'information et de conseil en direction d'un public pas toujours bien préparé aux difficultés d'une course en montagne. "Si on voit un groupe d'alpinistes sous-équipé, pas suffisamment encadré, on leur distillera les bons conseils", explique la capitaine Vegas.
Un dispositif controversé
Inauguré à l'occasion de l'ouverture du nouveau refuge du Goûter, ce dispositif a été fortement inspiré par le maire de Saint-Gervais, Jean-Marc Peillex, détracteur du "laxisme prôné par les ayatollah de la montagne". Sa mise en place ne fait, pour le moins, pas l'unanimité dans le monde de la montagne. "Faire appel à des gendarmes, c'est un constat d'échec pour la communauté montagnarde", juge Philippe Descamps, directeur de la fondation Petzl. "Il y a consensus pour dire qu'on ne peut pas accepter des tentes en permanence", reconnaît-il. "Mais ce n'est pas le principal problème. C'est une toute petite partie du débat", estime-t-il."Ce n'est pas parce qu'on va mettre des gendarmes que personne ne va se tuer. Il faut être prêt techniquement", pointe pour sa part Jean-Louis Verdier, adjoint au maire de Chamonix chargé de la montagne.
Une campagne d'information européenne
Un collectif d'associations d'alpinistes baptisé "La Coordination montagne" et la Chamoniarde, une société de prévention et de secours en montagne, ont donc décidé de jouer sur un autre tableau en lançant une campagne d'information européenne. Une brochure doit être diffusée à 213.000 exemplaires en 9 langues (français, italien, anglais, allemand, espagnol, polonais, tchèque, néerlandais et russe) par le biais des magazines spécialisés et des clubs alpins.Intitulé "Réussir le Mont-Blanc, une affaire d'alpinistes", ce dépliant résume les consignes à connaître pour gravir le toit de l'Europe (4.810 mètres): équipement, forme physique et psychologique, passages dangereux. "Il y a une image fausse du Mont-Blanc qui est vu comme un sommet certes très haut mais peu difficile. Or, c'est une vraie entreprise d'alpinisme", explique Philippe Descamps.
"Si on n'est pas vraiment préparé, on est en danger", confirme Georges Elzière, président de la fédération des clubs alpins (FFCAM). La campagne est déjà bien reçue à l'étranger, selon ses initiateurs. "Les gens ne savent pas toujours qu'il y a des avalanches toute l'année sur le Mont-Blanc", raconte Georges Elzière avant d'ajouter "Des copains slovènes m'ont dit:'heureusement que vous nous le dîtes!'"