Procès de Mourad Farès : le "rabatteur" de jihadistes minimise son rôle lors de la première audience

Jugé aux assises de Paris pour avoir envoyé des dizaines de jeunes au jihad, Mourad Farès a tenté de minimiser sa responsabilité lors de la première audience ce lundi 20 janvier. Originaire de Thonon-les-Bains, Mourad Farès affirme avoir lui même été sous "l'emprise" d'un "recruteur".

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"J'étais sous son emprise": Mourad Farès, jugé aux assises de Paris pour avoir dirigé un groupe de jihadistes francophones en Syrie, a tenté lundi de minimiser sa responsabilité en décrivant son propre "recrutement" par son "mentor", Oumar Diaby. 

L'accusé de 35 ans, transfuge du groupe Etat islamique (EI), présente un profil assez atypique: une enfance choyée dans une famille soudée à Thonon-les-Bains (Haute-Savoie), un bac scientifique décroché avec mention, des études supérieures vite abandonnées faute d'intérêt mais aussi "d'argent". 
    
Ce parcours presque sans anicroche prend fin au décès de son cousin, d'une méningite, à l'automne 2012. "Ebranlé" et "en quête de spiritualité", ce fils d'immigrés marocains, sans travail depuis deux ans, cesse alors toute consommation d'alcool et s'abreuve de vidéos "religieuses" sur Internet. "A cette époque, j'en regardais énormément", retrace Mourad Farès, lunettes, barbe fine et courts cheveux bruns. Une vidéo "complotiste" sur la mort d'Oussama Ben Laden le marque. Il répond alors à la "petite annonce" postée sur Facebook par son auteur, Oumar Diaby, qui cherche des "voix off"
 

Très actif sur les réseaux sociaux


Les deux hommes parlent d'abord "technique de voix", puis de "hijra" (émigration vers une terre d'islam) et se rencontrent à Nice, où vit Oumar Diaby, un Franco-sénégalais également connu sous le nom d'Omar Omsen et autre figure du recrutement pour le jihad en Syrie. C'est après avoir fait sa connaissance, selon lui, que Mourad Farès, très actif sur les réseaux sociaux, aurait incité des dizaines de jeunes à partir faire le jihad. Les juges lui imputent aussi l'organisation de plusieurs réunions évoquant des départs en Syrie.  

Il est notamment soupçonné d'avoir orchestré le départ en décembre 2013 de dix jeunes Strasbourgeois, dont Foued Mohamed-Aggad, l'un des futurs kamikazes du Bataclan. Des échanges entre le frère de ce dernier et Mourad Farès pourraient présumer d'une radicalisation plusieurs mois avant sa rencontre avec Diaby. "C'est totalement inexact", affirme l'accusé. C'est sous "l'emprise" de son "recruteur" qu'il aurait "rapidement adhéré à ses thèses affreuses", insiste-t-il, tentant de réduire son "rôle réel" à la diffusion de vidéos. 

Il réfute avoir fait des "appels au jihad proprement dit", parle d'incitations "indirectes", sans beaucoup convaincre la présidente qui lui demande de sortir de sa "position victimaire"
    
Au premier jour de son procès, Mourad Farès, qui encourt la réclusion criminelle à perpétuité pour "direction d'un groupe terroriste" et doit être interrogé sur les faits vendredi, semble surtout préoccupé par des révélations sur certains éléments de sa personnalité. Se fermant et baissant la tête quand la cour le questionne sur son homosexualité, confirmée par son ex-compagnon entendu en fin d'après-midi, il dit "(préférer) éviter le sujet", mettant en avant sa nature "pudique" et affirmant qu'il aurait "été plus à l'aise" si son procès avait été à huis clos. Il s'est contenté de confirmer qu'il avait informé Oumar Diaby de son "orientation" sexuelle et que ce dernier lui aurait lancé qu'aller en Syrie lui permettrait d'"effacer ses péchés". 
 

Une "posture de repenti"


A son arrivée en Syrie à l'été 2013, Mourad Farès avait rejoint les rangs de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL, devenue Etat islamique en 2014), mais il s'en est "désolidarisé" à l'automne. Fin 2013, il avait alors intégré la brigade de jeunes combattants francophones constituée par Oumar Diaby, qui sera affiliée au Front al-Nosra et dont il est accusé d'avoir assuré l'intérim en l'absence du Franco-Sénégalais. Il aurait quitté ce groupe au printemps 2014. 
    
Arrêté en Turquie en août 2014, Mourad Farès avait été remis à la France en septembre. En détention, il aurait adopté une "posture de repenti" et montré des signes de "désengagement" selon les rapports de l'administration pénitentiaire.
 
Le jeune homme, qui a obtenu en prison une licence en mathématiques avec mention très bien, voudrait à sa sortie "enseigner", mais s'est dit "conscient" de l'impossibilité de travailler dans le public compte tenu de ses antécédents."Vous voudriez continuer à transmettre, mais les mathématiques", lui demande la présidente, après avoir rappelé que ce qu'on lui "reproche aussi, c'est la transmission".  
    
Verdict attendu vendredi soir. 
 
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