Mort du résistant Raymond Aubrac

Le symbole de la résistance Raymond Aubrac s'est éteint mardi à l'âge de 97 ans.

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En mai 2009, sur le plateau des Glières, Raymond Aubrac s'associait à Stéphane Hessel pour un nouvel appel à la résistance, le célèbre « Indignez-vous! ».

Un hommage lui sera rendu les 26 et 27 mai.

Il était devenu, avec son épouse Lucie, un symbole et une légende de la Résistance: mort mardi à 97 ans, Raymond Aubrac était l'ultime survivant de la réunion de Caluire fatale à Jean Moulin.


Ce 21 juin 1943, dans le cabinet du docteur Dugoujon de cette commune de la banlieue de Lyon, la Gestapo et son chef redouté, Klaus Barbie, décapitent la Résistance intérieure : ils arrêtent le chef du Conseil national de la Résistance (CNR) Jean Moulin, et huit autres résistants.
Raymond Aubrac échappe aux nazis par une opération commando montée par Lucie, épisode digne d'un roman relaté en 1997 dans le film de Claude Berri "Lucie Aubrac". Le couple, marié l'année de sa rencontre en 1939, rejoint Londres avant que Raymond ne gagne Alger où il sera, en juin 1944, délégué à l'Assemblée consultative.


Mais Caluire, terrible coup à la Résistance, devait susciter les polémiques plusieurs décennies : qui a livré à la Gestapo le lieu de la réunion?
Mis en cause par Klaus Barbie et son avocat Jacques Vergès, Raymond Aubrac, brièvement arrêté par les Allemands en mars 1943 avant d'être relâché sur un coup de bluff, avait gagné tous ses procès en diffamation.


En 1997, lui et Lucie, entrés ensemble dans l'Armée secrète dès 1940, avaient fait face à un "tribunal" d'historiens mis en place par Libération. Une réunion "pénible" qui a toutefois "fait justice de certaines allégations ou insinuations".
De l'épisode, il était resté "blessé", a témoigné mercredi sur RTL son petit-fils Renaud Elfer-Aubrac.


En 1947 et 1950, il avait été témoin à charge lors des deux procès du résistant René Hardy, accusé d'avoir livré Jean Moulin et deux fois acquitté avant de décéder en 1987 sans élucider le secret de la dénonciation de Jean Moulin.


Inlassables témoins de la Résistance qu'ils vont raconter dans les écoles, unis jusqu'au décès de Lucie en 2007, les Aubrac, qui avaient trois enfants et dix petits-enfants, finissent par incarner la Résistance.

De son vrai nom Raymond Samuel, Aubrac était né dans une famille de commerçants juifs de Vesoul, la veille du déclenchement de la Grande Guerre, le 31 juillet 1914. Déportés, son père Albert et sa mère Hélène ne devaient jamais revenir d'Auschwitz.


Sympathisant communiste mais hostile au pacte germano-soviétique, fait prisonnier durant la Drôle de guerre puis évadé, il participe dès 1940 à Lyon, berceau de la Résistance, à la création de Libération-Sud, fondé par Emmanuel D'Astier de la Vigerie. Ce mouvement se fédèrera avec Combat et Franc-Tireur, pour former l'Armée secrète du général Charles Delestraint.

A la Libération, il est nommé en août 1944 commissaire régional de la République à Marseille avant d'être chargé par De Gaulle, début 1945, de la rude tâche du déminage du littoral.
Mais les relations entre le chef de la France Libre et celui qui reste proche des communistes, sans jamais s'encarter, sont difficiles.


Directeur puis inspecteur général à la Reconstruction, cet ingénieur en Travaux civils renonce à une carrière de haut fonctionnaire. Il cofonde en 1948 le BERIM, Bureau d'études spécialisé dans le commerce avec le bloc communiste, qu'il dirigera dix ans, et qui sera accusé de financer le PCF.
Ses réseaux le rendent influent: il rencontre Ho Chi Minh, venu négocier à Fontainebleau
l'indépendance de l'Indochine et qui deviendra son ami, l'accueillant chez lui.

Durant la guerre du Vietnam, il jouera un rôle discret mais déterminant durant les négociations secrètes entre les Etats-Unis et le Vietcong, faisant la navette entre le secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger et Ho Chi Minh.

Devenu spécialiste de l'alimentation dans le monde en développement, cet homme de gauche, qui avait publié son autobiographie "Où la mémoire s'attarde" en 1996, n'a jamais cessé de s'engager. Récemment, il appelait à voter François Hollande.

En 2010, il expliquait que résister c'était "réagir à l'injustice", "pas seulement la constater mais essayer de faire quelque chose".

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