Véritable centrale électrique virtuelle, Energy pool aide la France à éviter la panne généralisée d'électricité.
Bourget-du-Lac : Energy Pool module l'électricité
Récupérer de l'énergie auprès de gros consommateurs pour la remettre dans le réseau national et éviter une coupure de courant (un black out ) : c'est le principe développé par Energy Pool implantée à Savoie Technolac, au Bourget du Lac, en Savoie.
Sa méthode : éteindre à distance les machines de certains industriels lors des pics de consommation hivernaux. Dans la salle des commandes d'Energy Pool, au bord du Lac du Bourget, graphiques et tableaux multicolores défilent sur un mur d'écrans: centrales en panne, prix de l'électricité, consommation...
En ce jour de grand froid, où les températures descendent jusqu'à -16 degrés, une des informations les plus surveillées est sans doute la courbe de consommation de la France.
A 19H00 ce mardi 7 février, un pic à plus de 100.000 mégawatts est attendu, ce qui exploserait le précédent record établi à la mi-décembre 2010 (96.710 MW).
Droguée au chauffage électrique, la France a pris l'habitude année après année d'augmenter sa consommation lors des périodes de grand froid, mettant son système électrique sous forte tension.
C'est dans ce contexte qu'est née l'idée d'Energy Pool. Olivier Baud, président et fondateur de 54 ans, avait expérimenté "l'effacement électrique" en 2003, alors qu'il était patron de l'usine d'alumium de Péchiney à Dunkerque (Nord).
"J'avais compris qu'il y avait un potentiel mais que c'était très douloureux à faire pour un industriel", raconte-t-il. Créée en 2008, la start-up, qui emploie 45 personnes, produit ses premiers "négawatts" (des "mégawatts" non consommés) à l'hiver 2009-2010.
Et depuis le début de la vague de froid qui frappe la France, elle intervient presque tous les jours pour libérer de la consommation d'énergie. Lundi 6 février, entre 7H00 et 9HOO, pendant le pic de consommation du matin, Energy Pool a ainsi éteint à distance les machines d'un papetier des Vosges, d'un sidérurgiste du Nord et d'un fabricant de carbone savoyard.
"Lorsqu'on a un pilotage direct, on peut couper leur consommation en moins de 30 minutes", raconte Olivier Baud. Energy Pool vend ce service au Réseau de Transport d'électricité (RTE), chargé de l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité en France. Et elle rémunère les industriels pour l'arrêt de leur consommation.
La solution présente des avantages multiples. "La raison d'être d'Energy Pool, c'est d'éviter de construire des centrales thermiques qui tournent 500 heures par an, coûtent des fortunes et polluent beaucoup", avance M. Baud.
Ces dernières années, les producteurs d'électricité (EDF, GDF Suez, etc.) ont construit de nombreuses centrales au gaz, qui peuvent démarrer en quelques minutes, afin de répondre aux sursauts de la demande hivernale.
Energy Pool propose en outre un service spécial pour la Bretagne, une région particulièrement exposée aux risques de coupures, car ne produisant que 8% de l'électricité qu'elle consomme. "Cela nous intéresse particulièrement pour la Bretagne étant donné la situation", confirme Didier Bény, directeur de RTE pour le grand ouest.
Dans cette région, la start-up compte une demi-douzaine de clients, représentant 20 mégawatts de consommation. "Ce n'est pas énorme comme volume, mais en Bretagne, c'est déjà utile", remarque M. Bény.
En plein développement, Energy Pool embauche 5 personnes par mois et compte s'installer dans trois pays étrangers, dont le Royaume-Uni, cette année. "Dans les années qui viennent, c'est un marché qui va devenir consistant", veut croire M. Baud.
Selon les prévisions de RTE, les pointes de consommation devraient en France marquer de nouveaux records, à 104.000 MW en 2015 et 108.000 en 2020.