Le cadre est certes inhabituel. C'est derrière les barreaux, au centre pénitentiaire de Varces que s'est déroulée jeudi 1er décembre une opération "job-dating". Les entreprises sont venues à la rencontre de détenus de courtes peines, pour accompagner vers l’emploi ceux sur le point de recouvrer la liberté.
C’est la seconde fois que de telles rencontres sont organisées par l’administration pénitentiaire, le service Pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP), en partenariat avec Pôle emploi et plusieurs agences d’interim.
Jeudi 1er décembre, a eu lieu la dernière étape d’un travail initié il y a des semaines à la prison de Grenoble-Varces, en Isère. Ce fut d'ailleurs la phase cruciale au cours de laquelle la maison d'arrêt met en relation les détenus proches de la sortie - à l'échéance de quelques mois au maximum - avec de potentiels employeurs. Présentes à cette rencontre, principalement des agences d’Intérim pour des postes dans le BTP, les espaces verts ou encore le service à la personne.
L’emploi est un maillon essentiel pour prévenir la récidive.
Patrick Malle, directeur du centre pénitentiaire de Grenoble-Varces
"La seule certitude que nous avons, c'est qu'une sortie "sèche", sans préparation, conduit presque invariablement à la récidive, l'emploi est une composante fondamentale pour la réinsertion, un maillon essentiel pour prévenir la récidive", assure Patrick Malle, directeur de la prison Grenoble-Varces.
Parler peu du passé, et préparer l'avenir.
Didier Dasseler, chargé de placement et d'accompagnement pour Ulisse intérim
"Parler de l’avenir, peu du passé". C’est la démarche de la société Ulisse Interim spécialisée dans l’intérim d’inclusion. Elle propose non seulement du travail, mais surtout tout un accompagnement.
À un jeune détenu de 26 ans qui sortira de prison dans peu de temps, les questions du recruteur ne concernent pas seulement "l'emploi pour l'emploi", mais prennent en compte tout son environnement : a-t-il de la famille qui pourrait l'épauler, comment peut-il accéder à un logement ? Quel est l'état de ses finances ? Autant de questions importantes à l'heure de retrouver le monde extérieur.
Ne plus porter l'étiquette de la réinsertion
"Moi, je pars du principe qu’ils ont été jugés, leur peine est faite. On ne va pas les rejuger une deuxième fois et je ne veux pas leur faire porter l’étiquette de la réinsertion. Cela veut dire que quand ils sont en condition de travail, je ne veux pas que cela se sache. Je leur demande de ne pas en parler et je n’en parlerai à personne", précise Didier Dasseler, chargé de placement et d'accompagnement pour Ulisse intérim.
Parmi ces détenus, souvent jeunes, certains n’ont encore jamais travaillé. Des ateliers ont donc été organisés pour qu’ils puissent "mettre toutes les chances de leur côté". Il y a eu six séances de préparation, pour mettre à jour ou créer un CV, rédiger une lettre de motivation et faire des simulations d’entretiens d’embauche avec l’aide de professionnels. Pour se présenter, la plupart des candidats, sont d'ailleurs allés chez le coiffeur.
Là on est un peu dans un cocon, même si c'est un cocon carcéral, et il va falloir se réhabituer à vivre à l'extérieur.
Patrick, détenu
À 15 jours de la sortie, victoire pour Patrick, 55 ans. Il vient de décrocher un poste dans le secteur des transports. Un univers qu’il connaît bien : "J’étais chauffeur routier pendant 10 ans, je reviens à mes premiers amours. C'est un avant-goût de ce qui nous attend à la sortie. Là on est un peu dans un cocon, même si c'est un cocon carcéral, et il va falloir se réhabituer à vivre à l'extérieur, c'est important ce premier pas vers la sortie avec des professionnels. C'est important surtout d'avoir des projets, ce n'est pas parce qu'on est prisonnier un jour, qu'on est prisonnier toujours", témoigne-t-il après son entretien.
Au centre pénitentiaire de Varces, plusieurs promesses d’embauches ont ainsi été signées. L’établissement souhaite renouveler l’opération une fois par trimestre.