Le malaise s'amplifie au CHU de Grenoble. Alors que deux pédiatres sont en arrêt maladie pour "épuisement professionnel", le personnel soignant dénonce de "graves souffrances humaines", liées notamment à une "logique de rentabilité".
C'est une situation grave que décrivent deux pédiatres-diabétologues du CHU Grenoble Alpes. En arrêt maladie pour "épuisement professionnel", elles ne peuvent assurer le suivi de leurs patients, environ un millier d'enfants. Elles en expliquent les raisons dans une lettre, adressée à leurs patients.
Dans cette lettre, les deux médecins dénoncent le "discours comptable" de la direction : "Des consultations de 45 min de diabétologie, ce n’est pas rentable ! Il faut faire des consultations plus rapides ou plus souvent ou bien faire venir les patients en Hôpital de jour en rajoutant des examens complémentaires…"
Elles dénoncent une "pression énorme". "Nous ne pouvons plus supporter cette maltraitance institutionnelle et ce mépris de notre souffrance au travail qui nous fait venir au CHU avec angoisse et en repartir affectées".
Le cas de ces deux pédiatres est loin d'être isolé au CHU Grenoble Alpes. Laurence Bouillet, chef de service, constate "depuis deux ans une dégradation progressive des conditions de travail". "Nous sommes conscients des contraintes financières. Mais la façon dont elles sont appliquées au CHU de Grenoble induit de graves souffrances humaines au CHU de Grenoble : burn out, arrêt de travail, démissions..."
Pour Laurence Bouillet, l'hôpital public doit en finir avec la "tarification à l'activité", aussi appellée T2A, qui privilégie la rentabilité. "On est arrivés au bout de ce système !" déclare-t-elle. Laurence Bouillet connaît bien le contexte contraint des finances publiques, puisqu'en plus de son service de médecine interne, elle est aussi responsable de la commission des prescriptions au sein de la Communauté Médicale d'Etablissement, qui co-gère le CHU avec la direction administrative.
La situation du CHU de Grenoble a même été pointée du doigt à l'Assemblée Nationale par le député LREM Olivier Véran, neurologue dans cet hôpital. Le député a interpellé la Ministre de la Santé Agnès Buzin lors de la séance de questions au gouvernement ce mardi 19 décembre 2017. La ministre, qui fut, comme Laurence Bouillet, responsable d'un service hospitalier, a diligenté un rapport sur la question. Elle confirme la souffrance au travail du personnel soignant grenoblois.
La Ministre Agnès Buzyn a prévu de rencontrer la directrice générale du CHU de Grenoble, le président de la commission médicale d'établissement et le doyen de la faculté de médecine début janvier.