Coronavirus : à Grenoble, des chercheurs auraient trouvé comment prévoir la "tempête inflammatoire"

Le COVID a la particularité de déclencher un emballement du système immunitaire. C'est cette "tempête inflammatoire" qui détruit les poumons. Une équipe de scientifiques et médecins de l'Université et du CHU de Grenoble aurait trouvé comment anticiper cette aggravation. Pour mieux la combattre.

Certains patients atteints du Covid-19 présentent, entre le sixième et le huitième jour de la maladie, une atteinte respiratoire sévère, responsable de presque tous les séjours en service de réanimation.

Les soignants doivent alors les aider à respirer, sous peine de mort. C’est la deuxième phase virale, celle de l’inflammation.

« Chez certaines personnes, l’inflammation, nécessaire pour combattre le virus, dérive, manque sa cible, devient trop importante et déclenche des lésions pulmonaires » explique le Professeur Olivier Epaulard, infectiologue au CHUGA, le Centre Hospitalier Grenoble-Alpes. 
 

C'est l'inflammation disproportionnée qui tue


« En fait, les gens ne sont pas malades parce que le virus détruit les cellules, mais parce que le virus déclenche une inflammation respiratoire très importante » ajoute le Professeur Epaulard.

Cette inflammation, c’est la réponse, la défense de notre corps, de notre système immunitaire, à l’attaque virale.

« Avec le Covid-19, le sytème immunitaire s’emballe, la défense est non-appropriée, disproportionnée. C’est elle qui a un effet délétère. »

En résumé, ce n’est pas le virus qui tue, c’est la « tempête inflammatoire ». Ce que les anglo-saxons ont baptisé « cytokine storm », l’orage ou le choc cytokinique.

Schématiquement, les cytokines sont des protéines qui alertent notre système immunitaire en cas d’agression virale. Et qui déclenchent, en l’occurrence, une réaction excessive.

Comme une petite brise qui annoncerait… la tempête. 
 
 

Les cytokines, « bio-marqueurs » de l’inflammation


L’étude menée par les chercheurs grenoblois a permis d’identifier ces cytokines comme étant des « bio-marqueurs » de l’inflammation, c’est-à-dire de l’aggravation de la maladie.

Ces scientifiques du CHUGA et de l’UGA se sont intéressés en particulier à la cytokine dénommée Interleukine 6 ou "IL6".

C’est elle qui alarme le système immunitaire. Elle stimule la sécrétion des protéines dans la phase aigüe de l’inflammation. Elle joue un rôle-clé dans la régulation de ce phénomène.

Les chercheurs ont donc établi une corrélation entre un certain dosage de cette IL6, prélevée dans le sang de patients dès leur entrée à l’hôpital, et l’aggravation de la maladie.

En ce sens, cette protéine se révèle un « bio-marqueur » de l’inflammation. Sa présence peut trahir l’emballement du système immunitaire.

Si on repère l'IL6, on peut donc prévoir le phénomène. Et l’anticiper.
 
 

Prévoir la tempête pour mieux la maîtriser


C’est tout l’enjeu de cette recherche. Anticiper l’aggravation, dès le troisième ou quatrième jour. Pour mieux prendre en charge le patient.

« Il s'agit de savoir quels sont les patients à surveiller absolument pour commencer sans tarder un traitement actif, pour moduler l’inflammation, avec par exemple des corticoïdes» commente le Professeur Epaulard.

« L’idée, c’est d’identifier tôt l’aggravation, pour casser l’inflammation, ce processus néfaste qui va envoyer le patient en réanimation » ajoute-t-il.

Les corticoïdes, bien connus comme « anti-inflammatoires », sont un premier recours.

Mais le Professeur Epaulard évoque aussi l’utilisation d’un anticorps, le "Tocilizumab", qui s’attaquerait directement à la protéine IL6 pour réguler son alerte disproportionnée, en bloquant ses récepteurs.

Cet anticorps est notamment utilisé dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde.

 
 

Médecins au CHU, ils sont aussi chercheurs à l'Université


Les analyses sanguines qui ont permis de doser le "bio-marqueur", la fameuse protéine IL6, ont porté sur les prélèvements de plus de 200 patients Covid-19 hospitalisés à Grenoble depuis le 7 mars 2020.

Elles ont été réalisées à l'IBP, l'Institut de Biologie et de Pathologie, le laboratoire géant de l'hôpital Michallon. 

Un bâtiment de plus de 13 000 mètres carrés, où deux médecins biologistes, 11 techniciens de laboratoire et deux ingénieurs ont travaillé d'arrache-pied pour obtenir ces résultats.

Tout s'est déroulé au sein du laboratoire de Biochimie des protéines, sous la direction conjointe du Professeur Olivier Epaulard, infectiologue au CHU Grenoble Alpes, du Dr Audrey Le Gouellec et du Professeur Bertrand Toussaint, tous deux biologistes médicaux au CHUGA et chercheurs au sein du laboratoire TIMC-IMAG (CNRS / UGA / Grenoble INP-UGA).

Dans les semaines à venir, cette recherche devrait faire l'objet d'une publication dans une très prestigieuse revue internationale.


Une recherche soutenue par la Fondation "Université Grenoble Alpes"


En plus des apports des institutions universitaires et hospitalières, la Fondation UGA s'est mobilisée pour permettre à cette recherche de démarrer sans attendre.

Début mars, dans l'urgence, la Fondation est parvenue à rassembler 160 000 euros de dons auprès de ses mécènes : Air Liquide, Caisse d'Epargne Rhône-Alpes, bioMérieux, MGEN, Banque Populaire AURA, Compagnie de Chauffage et GEG.

La Fondation a pour vocation de fédérer entreprises, enseignants-chercheurs et étudiants autour de projets d'intérêt général. 

Parallèlement à cette recherche, le Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble participe à bien d'autres essais cliniques depuis l'apparition du coronavirus.
  
Pour en savoir plus sur les recherches en cours dans toute la France, en évitant de surcroît les fake news, n'hésitez pas à visiter le site internet de l'INSERM, l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale.
 
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