Dessinatrice de procès, Yolande Rinchet a croqué pendant 37 ans les accusés et les victimes sur les bancs des cours d’assises de Rhône-Alpes. Ses dessins, marqués par des procès emblématiques comme celui de l'Ordre du temple solaire, sont exposés à la Maison de l’Avocat de Grenoble.
Les dessins de Yolande Rinchet sont comme des albums souvenirs. Au fil des pages, les coups de crayon racontent des moments clés, comme des instantanés d’une vie judiciaire tumultueuse. "Moi, j’aime bien jeter le croquis sur le papier, sur la page vierge rapidement… Vous êtes pris tout de suite par le personnage. Je dessine automatiquement… Parfois, c’est raté, mais c’est toujours spontané", raconte la dessinatrice.
Des pages féminines aux procès d’assises
Dès l’âge de 15 ans, la jeune Yolande sait qu’elle veut dessiner, mais elle ne sait pas quoi. Dans les années 60, elle est engagée par le Dauphiné Libéré pour illustrer les pages féminines. Alors pour s’entraîner à dessiner des visages, elle passe du temps sur les bancs du tribunal correctionnel. La découverte du milieu judiciaire est pour elle une révélation.
Pendant 37 ans, Yolande enchaîne les grands procès d’assises de la région Rhône-Alpes. Celui de Klaus Barbie en 1987 est resté gravé dans sa mémoire. "Barbie a un visage beaucoup plus connu de face avec un sourire sadique et un grand visage assez plat… Sur ce dessin, j’ai préféré le prendre lorsqu’il se retournait, car son visage était plus actif" explique-t-elle.
Au fil des années, elle suit l’affaire du meurtre de la petite Céline et assiste à l’acquittement surprise de Richard Roman. Elle dessine l’affaire de l’Ordre du temple solaire, et assiste aux débats sur la question de l’emprise sectaire portée par la famille Vuarnet. Elle est aussi aux premières loges lors du procès des Filles de Grenoble, qui témoignent pour la première fois contre les proxénètes du gang italien. Autant d’affaires qui ont marqué l’histoire française, jusqu’à changer la loi.
Des dessins exposés à Grenoble
Il y a quelques années, Yolande Rinchet a fait don de ses croquis au barreau de Grenoble. Ses dessins sont aujourd’hui exposés à la Maison de l’Avocat. "Je la voyais gratter, gommer et tant que ce personnage ne vivait pas ça ne l’intéressait pas, se souvient, Maître Ballestas, bâtonnier du barreau de Grenoble. Ses dessins lorsqu’on les regarde, on a l’impression que les gens parlent. Certains de nos anciens avocats sont morts alors il y a ce plaisir de les revoir et presque de les entendre et ça, c’est très émouvant".
Yolande Rinchet a su immortaliser les traits, les expressions et les caractères des pénalistes, des experts, des victimes et des criminels. Ses dessins sont à voir jusqu’au mois de décembre.