Grand débat : à Grenoble, l'expérience contrastée de la démocratie participative

Au menu du grand débat, la "pratique de la démocratie" fait l'objet d'une déclinaison singulière à Grenoble, où trois dispositifs participatifs lancés dès 2014 pour donner davantage de "pouvoir d'agir" aux habitants livrent des résultats contrastés.

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Élu en 2014, le maire écologiste Éric Piolle avait fait de ces expérimentations l'une des promesses phares de sa campagne.
La plus ambitieuse, qui permettait aux Grenoblois de déclencher sur simple pétition un débat au conseil municipal, puis un référendum en cas de rejet, a été suspendue en 2018 après que la préfecture eut saisi le tribunal administratif.

Jugé inconstitutionnel, cet outil "d'interpellation citoyenne", testé depuis 2016 par la municipalité, a été annulé au motif qu'il était ouvert aux mineurs de 16-17 ans et aux résidents étrangers. Au total, une dizaine de pétitions, sur les vingt-six lancées par les habitants avant ce coup d'arrêt, avaient été retenues par la mairie, et leurs requêtes mises en débat lors du conseil municipal.

"Cela reste une tentative positive car il revient aux élus d'organiser des formes de concurrence à la démocratie représentative", estime Pascal Clouaire, l'adjoint en charge de piloter les dispositifs.
Prononcée à l'issue d'une forte opposition préfectorale, cette décision judiciaire "a pointé la rigidité d'un cadre législatif peu enclin à accueillir les initiatives locales innovantes. Il faut l'assouplir", analyse-t-il.
 

 "Décider directement" 


En 2018, la municipalité a aussi revu le fonctionnement de ses sept Conseils citoyens indépendants (CCI), autre outil phare de sa politique participative, mais qui a peiné à trouver sa place au sein du maillage associatif et d'unions de quartiers déjà existant. Ces instances, qui ont le pouvoir d'interpeller le maire en conseil municipal, ont peu mobilisé dans les quartiers populaires et reproduit les travers qui caractérisent ce type d'assemblées: forte sélection sociale et absentéisme.

Pour rebondir, l'équipe municipale a lancé en septembre l'expérimentation d'un jury citoyen composé de trente habitants tirés au sort qui, durant trois mois, mènent une réflexion pour lui faire des propositions sur une thématique imposée.
Deux autres seront créés en ce début d'année. Quant aux "budgets participatifs", qui offrent depuis 2015 la possibilité aux habitants de décider grâce à un vote en ligne de projets "citoyens" qui seront financés - à hauteur de 800.000 euros par an -, ils ont permis de mobiliser une population réfractaire à l'exercice démocratique classique.
 

"L'audace" iséroise 


Selon la mairie, qui vise "l'équité dans le débat public", 25% des participants à ces "votations" ne sont pas inscrits sur les listes électorales. "Ces outils ne fonctionnent que si l'on donne au citoyen les moyens de décider directement. Confier du pouvoir d'agir pour trouver un point d'équilibre, c'est accepter d'en perdre", rappelle Pascal Clouaire.
L'élu estime cependant que les habitants ne sont pas encore suffisamment "acculturés" à ces dispositifs et à leurs enjeux pour s'en saisir spontanément.

"Ce ne sont pas les dispositifs qui posent problème. Ni même un manque d'envie des Grenoblois de s'en saisir. C'est qu'ils coexistent toujours avec des décisions arbitraires sur les politiques publiques majeures", décrypte Guillaume Gourgues, politologue à l'Université de Franche-Comté, pointant des "incohérences". Pour ce bon connaisseur du paysage participatif grenoblois, les résultats de l'expérience menée sont symptomatiques d'un "fonctionnement à deux vitesses" au sein des villes françaises: écartelées entre la "volonté d'expérimenter d'une poignée d'élus" et "les schémas représentatifs classiques privilégiés par les cabinets". Le politologue souligne "l'audace" de l'expérimentation iséroise mais regrette une "frénésie de procédures" qui "n'engage pas de vraies priorités d'actions publiques".

"Il n'existe pas de culture de délégation de la décision", admet Pascal Clouaire. "L'une des clés sera de penser la décentralisation au niveau local, en identifiant quelle part des politiques publiques nous pouvons déléguer au citoyen pour travailler sur les changements de comportement".

En 2019, environ 370.000 euros devraient être investis dans le fonctionnement de la démocratie locale, soit 0,2% du budget prévisionnel de la ville. Grenoble organisera les 11, 12 et 13 mars les troisièmes Rencontres nationales de la participation.
 
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